"Our hospitality" surprend par une entrée en matière qui prend au premier degré l'argument dramatique de la querelle entre deux familles voisines; cette introduction sérieuse permet mieux le décalage avec le burlesque qui gagne la suite du film, de la longue séquence du train jusqu'aux nombreux gags mettant en scène l'opposition entre Willy McKay et la famille Canfield. "Our hospitality" commence doucement, le voyage menant à New York étant inégalement drôle et finalement sans grands enjeux; c'est à partir du moment où les Canfield apprennent que le nouvel arrivant est leur rival et qu'ils doivent le tuer, par respect de la querelle ancestrale, que le film prend son envol, trouve son rythme en enchaînant les situations irrésistibles. Chaque scène où Willy trouve un moyen de rester dans la maison de ses hôtes – ces derniers ne peuvent l'attaquer sous prétexte qu'il est leur invité – est un délice, le jeu génialement nonchalant de Buster Keaton s'opposant à l'agressivité des autres personnages, prêts à bondir dès lors que l'intrus aura sauté sur l'occasion pour fuir la demeure. Loin de n'être que le brillant huis-clos à travers lequel s'exerce un malicieux jeu du chat et de la souris, le long-métrage se déploie progressivement pour devenir un film d'aventure haletant avec course-poursuite dans la campagne, scènes de noyades dans la rivière et risques de chutes mortelles à causes des cascades, tout en conservant se puissance comique. C'est donc par la clarté de sa mise en scène (l'économie de cartons est frappante, l'image dit tout) et sa générosité narrative que "Our hospitality" nous emballe, le film parvenant même à mêler rire et émotion dans une dernière scène étonnante.