Il aura fallu huit ans à Kirk DeMicco (Les Chimpanzés de l’Espace) pour développer son film, basé sur une idée qu’il avait eue en 2005 avec l’ex-Monty Python John Cleese. S’associant pour l’occasion avec Chris Sanders, qui délaisse son comparse Dean Deblois (Lilo & Stitch, Dragons), le cinéaste livre ce qui reste aujourd’hui comme l’une des meilleures œuvres de DreamWorks Animation, se plaçant sans mal aux côtés des Cinq Légendes et de la franchise Dragons.
Pourtant, ce n’était pas gagné d’avance ! Et pour cause, pour ceux qui découvraient le synopsis et/ou les extraits du long-métrage avant sa sortie en salles, Les Croods s’annonçait comme une énième aventure préhistorique. Un genre de divertissement pour enfants vu maintes et maintes fois au cinéma et surtout dans le domaine de l’animation. D’autant plus que les studios Blue Sky sont déjà passés par là avec leur saga L’Âge de Glace, véritable référence du genre. Malgré cela, Les Croods les supplante tous grâce à ses nombreuses qualités, à commencer par son scénario qui en fait un Tomorrowland avant l’heure. Et pour cause, autre une histoire classique (une famille fuyant un monde en pleine métamorphose), ce film d’animation est porteur d’un message : l’homme est effrayé par la nouveauté, par ce qu’il ne connait pas. Si pour le jeune public cela se présente comme une morale, une leçon de vie à laquelle ils peut adhérer, les adultes ne sont pas mis de côté, pouvant percevoir cette thématique comme un avertissement à échelle sociétale (le fait que certains restent ancrés dans les traditions et ne s’ouvrent pas à la modernité), personnel (évoluer pour grandir) ou encore culturel (les productions qui privilégient les remakes et les suites plutôt que l’originalité, aussi bien les films que les chansons et les livres). Vous l’aurez compris, Les Croods n’est pas un banal DreamWorks qui se contente de personnages et de quelques gags discutables. C’est un véritable récit qui ne prend nullement le spectateur pour un abruti, et Bon Dieu que cela fait du bien ! N’est-ce pas, Madagascar ?
Surtout que pendant 1h38, le film parvient à imposer sa thématique sans oublier le divertissement. Et sur ce point, Les Croods est une franche réussite question rythme et efficacité, sachant alterner personnages bien écrits et seconds rôles loufoques. Séquences touchantes et délires humoristiques. Références culturelles et trouvailles visuelles à mourir de rire. Regarder Les Croods, c’est passer un très bon moment en famille devant son écran, sans s’ennuyer une seule seconde comparé à la majorité des œuvres DreamWorks qui se présentent comme des enchaînements de gags sans imagination). Ici, nous avons un fil rouge qui se met suffisamment en valeur pour exister, ne s’effaçant jamais derrière un humour mettant pourtant dans le mille à chaque fois.
Mais c’est également du côté de l’animation que Les Croods en met plein la vue, arborant un visuel des plus impressionnants. Premièrement sa fluidité. Il est vrai que depuis ces dernières années, les longs-métrages estampillés Pixar, DreamWorks et Blue Sky Studios se sont montrés de plus en plus maîtrisés question énergie. Mais là, Les Croods bat bien des records avec son animation qui fuse dans tous les sens sans perdre le spectateur, comme en témoigne la séquence du petit déjeuner faisant l’ouverture du film. Un dynamisme rarement atteint qui envoie du pâté n’ayant jamais peur du spectaculaire, se permettant d’avoir des plans dignes des plus grandes productions hollywoodiennes. Sans compter la musique d’Alan Silvestri (Retour vers le Futur, Forrest Gump) qui vient souligner tout cela avec aisance. Et enfin vient la question de l’allure visuelle de l’ensemble. Un délice, tout simplement ! Une foire aux belles couleurs faisant oublier le manque de poésie propre aux DreamWorks. Une fresque constamment en mouvements qui apaise le regard tout en se permettant bien des délires, à commencer par son bestiaire animalier. S’il fallait le comparer à une autre œuvre cinématographique, Les Croods est sans conteste l’Avatar de l’animation, ni plus ni moins !
Beau, hilarant, intelligent, divertissant et travaillé sont les qualificatifs clés des Croods, véritable prouesse de l’animation prouvant que DreamWorks est capable de bien des choses quand il a les artisans adéquats sous la main. Voire même de dépasser Pixar qui commence à se perdre avec ses suites purement commerciales (Cars 2, Monstres Academy), c’est pour dire ! Une chose est sûre : c’est de pied ferme que l’on attend la suite, annoncée pour 2017, étant donné que l’on y retrouvera toute l’équipe responsable de ce divertissement de très grande qualité.