Décidément, Yip Man, maître chinois de wing chun, et de Bruce Lee, aura eu droit à de nombreuses adaptations, et en 2013 c'est Wong Kar-Wai qui s'y lance, axant son oeuvre durant une vingtaine d'année à partir de 1930.
Sur le papier, tout cela semble passionnant, surtout avec le metteur en scène d'In The Mood for Love derrière la caméra, et pourtant c'est une grande déception. S'il n'a pas perdu son talent pour créer de magnifiques images et des plans mémorables, on se demande où est passé celui qui savait si bien faire ressortir l'émotion des enjeux et protagonistes, ainsi que de raconter une histoire avec justesse et sensibilité.
L'oeuvre manque de vie, les événements s'enchaînent sans véritable liens et on peine à s'intéresser à ce personnage pourtant complexe et passionnant. Du coup, plusieurs passages semblent bien trop longs et surtout, on ne ressent pas grand chose devant The Grandmaster, ni tension, ni dramaturgie, ni quelconque émotion qui serait lié au sort des personnages, malgré certains aspects intéressants, notamment le déclin de ce maître.
Fort heureusement, si le fond laisse clairement à désirer, la forme est souvent remarquable, à l'image de l'introduction pluvieuse, que ce soit en eau ou en sang. L'oeuvre est formellement magnifique malgré une ou deux faute de goût, dans les ralentis notamment, avec un remarquable travail sur les lumières et la photographie, tandis que les décors sont aussi soignés. C'est pourtant insuffisant pour en faire un bon film, ça ne le sauve que partiellement, alors que les comédiens sont plutôt bons, à commencer par Tony Leung Chiu-wai.
Une oeuvre plutôt brillante dans sa forme mais très décevante par son fond, où, malgré un aspect esthétique remarquable, Wong Kar-Wai peine à faire ressortir les émotions et l'intérêt pour les enjeux et personnages.