On ne présente plus les suites de L'Effet papillon; rendues célèbres par la fameuse émission du Fossoyeur sur les mauvaises suites de films, elles ont connu un regain de popularité, ou d'impopularité. Le second épisode, s'il tentait de reproduire la formule du premier avec une certaine fidélité, ne présente aucun rapprochement avec cette ultime suite, signe de l'étouffement d'un concept de base prometteur.
Ce troisième film n'a clairement plus rien à faire du principe de la saga; on retrouve donc notre héros qui utilise une technique différente de voyage dans le temps, jamais expliquée ou ne serait-ce qu'un poil logique. Il y a une volonté de s'envoyer des électrochocs dans une eau glacée, et de se faire surveiller par sa soeur, un personnage qui pouvait être intéressant mais n'est pas assez développé pour qu'on en ait quelque chose à faire.
Et dès les premiers voyages, on comprend que le film sera mauvais : si son idée de faire un thriller policier avec une enquête sur un meurtrier qui voyage dans le temps avait du bon, il est rapidement dépassé par ses ambitions et s'en mêlent les pinceaux dans tous les côtés; entre mise en scène de slasher inutilement gore, frontale et gratuite, et son ton sombre qui manque clairement de jeu de couleurs, c'est visuellement très plat. Surtout que son montage bordélique appuie encore plus le bordel de son scénario, et nous pousse finalement à nous questionner plus sur les défauts du film que la profondeur de son intrigue.
D'autant plus que, réalisé par Seth Grossman (qui mettait ici en scène son seul film) et pour plus développer la qualité de son travail, L'Effet papillon 3 reprend tous les défauts de photographie de l'original : le côté superficiel, film clipesque des années 2000, avec flashs insupportables et lumières éclatantes qui éblouissent, on reprend là les clichés de l'époque en les poussant à leur paroxysme, rendant le tout laid, mauvais, sans talent ni finesse.
C'est même vulgaire dans ses scènes d'horreur, qui l'enferment, la plupart du temps, dans un cinéma z avec déjà plus de budget que les autres grandes références du genre (le massacre sur la serveuse ne sera pas loin d'un Uwe Boll, niveau gratuité de la chose), et qui multiplie forcément les scènes de sexe sans savoir les montrer avec talent, ou ne serait-ce qu'une once de sensualité. Cela démontre chez Grossman l'absence d'idées de mise en scène posée, artistique : il fait du sensationnalisme pour palier à son manque d'habileté dans les registres qu'il aborde, et cache le tout sous un tas d'effets visuels insupportables et clipesques (les filtres d'images et les sursauts de flash pour souligner ses cuts).
Et si les deux oeuvres précédentes stylisaient leur fin, tentaient de la rendre émouvante, celle-ci se structure comme une conclusion à twist, avec une volonté évidente de surprendre son spectateur. La révélation du tueur ne surprendra pas dans le sens où le personnage présenté ne sera ni assez développé ni assez bien interprété pour que cet évènement soit ne serait-ce que crédible.
On se retrouve donc avec un antagoniste qui surjoue à la mort, un peu à la Nicolas Cage sans le charisme, preuve finale qu'il aurait mieux fallu partir plus loin dans le délire et, faîtes gaffe au spoil, peut-être plutôt choisir notre héros que sa soeur, qu'on connaît finalement très peu, et qui jouait tellement comme si c'était son mec que je me suis demandé, tout du long, si ce n'était pas plutôt sa copine que sa soeur. Utile pour la révélation, je vous le dis, faisant qu'on n'est pas non plus surpris de ses raisons.
D'un autre côté, l'acteur principal a tellement peu de talent d'interprète qu'il ne fait que se reposer sur sa gueule certes marquante, mais pas suffisamment expressive pour palier à son manque de crédibilité dans le rôle. Il passe le film sans jamais s'investir, et le traverse avec le charisme du Starkiller de The Force Unleashed, pour ne pas dire qu'il semble reproduire son regard. Il n'est ainsi pas étonnant de se dire qu'on n'a autrement vu Chris Carmack que dans Shark 3D.
Autant vous dire qu'à ce niveau de la critique, il est dur de lui trouver de véritables qualités : sa volonté de bien faire peut-être, de tenter des choses quitte à s'y perdre, ce qu'il fait royalement. Il essaie tellement qu'il tombe dans la caricature, à force de vouloir représenter un monde dur et qui critique, rendant ses personnages secondaires caricaturaux et grotesques (particulièrement ce flic sous calvitie qui se moque ouvertement des "prémonitions" de notre héros, tandis qu'il parle à ce commissaire qui reviendra régulièrement dans les différents mondes de notre héros).
Et par la volonté de nous impressionner, il fait un twist sur son twist, et plongeant dans un pathos gerbant, nous refait un flashback qu'on attendait depuis dix minutes, et qui du fait de son manque de surprise, ne fait qu'affirmer chez le spectateur l'idée que cet ultime épisode est encore plus maladroit et mal branlé que le film précédent, déjà bien bordélique et mauvais.
Tout cela pour nous pondre une conclusion attendue, qui tente de surprendre par un twist n'ayant plus aucun sens, et conduisant un nouveau thème dans la saga pour un hypothétique quatrième film (qui ne sorti heureusement jamais) : la réincarnation destructrice, annonciatrice d'une suite tout autant violente et laide, qui ne lésinera pas sur la vulgarité et la violence, et terminera cette duologie horrifique dans la saga, qui n'a décidément plus que l'idée du voyage dans le temps comme lien avec le film d'origine. Heureusement pour le cinéma et pour nous, cette suite ne s'est jamais faîte, et ne se fera sûrement jamais.
C'est à dire que L'Effet papillon 3 n'a même pas de sens en tant que one-shot, puisqu'il était visiblement pensé pour avoir une suite et conclure son histoire dans le film suivant; quel crédit lui apporter désormais qu'il est film unique, et qu'il tentait de plus se rattacher à cette éventuelle séquelle qu'aux films qu'il est censé suivre? On trouve là le problèmes de ces éternelles suites en DTV qui ne rapportent pas assez de succès pour remplir les plans de leurs producteurs, et terminent leur course plus comme des matériaux commerciaux, purement malhonnêtes, tandis qu'ils pouvaient passer, avant de les avoir vus, pour des films ayant la prétention d'ajouter quelque chose à une saga déjà bien approfondie.
Catastrophique.