Un thriller sans concession avec des couilles et un psychopathe de légende en 2011 ? Si, si, c'est possible ! C'est en tout cas le pari, risqué, du sieur Winterbottom qui nous livre ici un film noir comme on en fait plus et dont la seul faute de gout pourrait être qu'il soit en couleur...
Mais la palme revient définitivement à Casey Affleck dont le brio mériterait bien plus que la reconnaissance populaire et critique (une statuette bien distribuée pour une fois...) et qui parvient à se hisser au sommet du panthéon aux cotés de ce cher Anthony "Hannibla Lecter" Hopkins. Son coté calculateur, son cynisme font en tout cas indéniablement penser au maitre et donne à ce petit adjoint au shérif, tout endimanché dans son costume de gentleman sudiste, une aura, une sorte de grandeur, au-delà du pourtant pas si anodin sociopathe. Et c'est sans nul doute ce qui fit peur aux censeurs et aux bonnes âmes bien-pensantes, cette sorte de légitimité aussi destructrice et suicidaire que rédemptrice. Les monstres sociaux sont les enfants de la société, un reflet pas si déformé qui renvoit aux pulsions les plus primitives de l'être humain. Pulsions issues d'un état de Nature et mises en exergue sous la pression de cette même société.
Toute la maestria du réalisateur est d'ailleurs de laisser ce sujet plâner en toile de fond, sans jamais l'aborder de front, préférant se concentrer sur le triste spectacle, au combien réaliste, des conséquences de l'hypocrysie ambiante. L'image en est d'ailleurs très brut mais là encore, et c'est ce qui est le plus choquant, c'est que, pour une fois, un réalisteur montre la violence de manière réelle. Pas de gerbes de sang ou d'effets visuels, rien n'est ajouté pour distancer le spectateur de la brutalité, de la violence. Le spectateur est plus que témoin, il est également parti prenante de cette "tragi-comédie humaine", il l'a vit, étant à la fois juge, victime et bourreau.
Un film brutalement vrai qui pose un état de fait sans chercher à jouer les moralisateurs, car c'est à chacun de remettre en question, vis-à-vis de soi-même, et non par rapport à un modèle prédéfini et bien souvent inaccessible. Un pur chef-d'oeuvre qui parsemé de quelques longueurs mais qui nous offre, en plus d'une réflexion cruciale, une vraie leçon de cinéma. Chapeau bas.