Avec ce quatrième long métrage, c'est la première fois que Jérôme Bonnell aborde le polar. "La Dame de trèfle est né d'une envie de polar. L'envie profonde d'une nouvelle forme, d'explorer un terrain inconnu pour moi", reconnaît-il. "Mais j'ai très vite réalsié que ce désir de départ, ludique, un brin théorique, n'était qu'un alibi pour raconter des personnages. Et j'ai constaté que le forme du polar était un moyen d'aller beaucoup plus loin, justement dans quelque chose d'intime et de personnel (...) S'est ajouté aussi le plaisir d'écrire et de tourner un film beaucoup plus narratif que mes précédents, un désir de péripéties (...) Mais ce qui m'importait le plus était justement d'en faire un terrain de liberté, de ne rien trop ficeler ni verrouiller à l'écriture."
Jérôme Bonnell parle de ce qui est essentiel selon lui dans La Dame de trèfle : (...) au-delà d'une dimension romanesque et immorale, c'est avant tout le trajet intérieur d'Aurélien qui me bouleverse. Passer par l'horreur pour sortir de soi-même". Pour autant, le cinéaste n'a pas souhaité insister sur la dimension psychologique : "Je n'ai pas cherché à donner de raisons trop apparentes d'agir aux personnages, sans doute par peur de tomber dans une compassion un peu douteuse. Je n'ai surtout pas voulu surcharger le contexte psychosocial, ni réduire les personnages à des victimes de leur condition. L'essentiel à mes yeux réside dans le lien entre le frère et la soeur. Il est le coeur du film, il illustre une quête d'identité désespérée, qui pour moi fait écho à notre génération (...) Le film raconte la simple histoire d'un frère et d'une soeur, dont la peur du monde est si grande qu'ils ont décidé de ne jamais se quitter, le meilleur moyen pour tous deux, chacun à sa façon, de ne jamais connaître un autre amour. Ni d'affronter l'existence. Donc l'histoire d'un chemin, vers une séparation inévitable. Et libératoire. En sauvant son frère, Argine se sauve sans doute elle-même."
Si Malik Zidi et Marc Barbé sont deux nouveaux venus dans son univers, Jérôme Bonnell s'est entouré de vieilles connaissances : Florence Loiret-Caille tenait déjà l'un des rôles pricnipaux du Chignon d'Olga puis de J'attends quelqu'un (premier et troisième long métrage du réalisateur). Jean-Pierre Darroussin incarnait aussi l'un des protagonistes de J'attends quelqu'un, il fait cetet fois une participation -dans un rôle-clé. Bonnell a aussi de nouveau fait appel à Marc Citti et Judith Rémy.
Jérôme Bonnell parle de ses deux comédiens principaux, Malik Zidi et Florence Loiret-Caille : "J'ai songé à Malik en le voyant dans Les Amitiés maléfiques d'Emmanuel Bourdieu où je l'ai trouvé magnifique (...) Il y a sur son visage un mélange confus d'enfance et de noirceur. Tout comme Florence Loiret Caille, Malik est un acteur qui retient constamment une grande émotivité. Il se passe donc toujours mille choses quand il est devant la caméra (...) Penser à [Florence] dès le scénario m'a beaucoup aidé à écrire le personnage, à franchir des barrières, à me mettre en danger. Florence est une comédienne dont la générosite vous tire le haut et donne des ailes à toute une équipe. Elle ose des choses d'une liberté incroyable. Comme Malik, elle n'est qu'instinct et vitalité. Elle ne sait jamais d'avance ce qu'elle va faire avant une prise."
L'héroïne du film se prénomme Argine... comme la figure de la dame de trèfle dans les jeux de cartes. Contrairement aux autres dames, ce nom (anagramme de Regina) n'est pas d'origine biblique. Un tatouage sur la main d'Argine vient compléter l'explication.
SI la musique classique est présente, comme dans les autres films de Jérôme Bonnell, une bande originale a été composée par le contrabassiste Marc Marder, qui a travaillé entre autres avec Rithy Panh. A cela s'ajoutent des scènes de concert rock, le leader du groupe étant Yann Destal, artiste à multiples facettes. Ce musicien rock qui a enregistré en solo mais a aussi été une moitié du duo éléctro Modjo, à qui on doit le tube Lady. On reconnait aussi Paul de Homem Christo, musicien et remixeur, frère d'un des membres de Daft Punk, autre fameux duo...
Au départ, le cinéaste avait pensé intituler son film Les Aventureux.