Le réalisateur parle de l'évolution de son acteur principal, Tomer Sisley : "Il a eu un enfant, il a gagné en maturité et je pense aussi qu’il a moins de choses à prouver. Dans le premier, il y avait un manque de légitimité difficile à vivre pour lui. Donc il devait en permanence prouver à l’équipe, au spectateur et à lui-même qu’il avait le droit de jouer Largo. Plus maintenant. Ce qui lui donne donc une plus grande confiance en lui – dans le bon sens du terme – et une plus grande liberté".
Le comédien Laurent Terzieff est décédé peu après le tournage. Jérôme Salle lui rend hommage : "S’il y a une chose que je trouvais extrêmement touchante chez lui c’était son immense ouverture d’esprit, en plus d’être quelqu’un de brillant et un immense acteur. S’il a accepté Largo Winch II, éventualité peu probable, c’est parce que ça l’a amusé. (...) Et je me souviens très bien de la première chose qu’il m'a dite au téléphone : "J’ai quand même un problème : je ne suis pas sûr d’être capable de jouer ce rôle. C’est compliqué pour moi." Ce n’était pas une posture, il était vraiment sincère et dans le doute. Ça démontre son humilité".
Dans un passage du film, Sharon Stone est vêtue d’une robe blanche, croise et décroise les jambes, comme dans la scène mythique de Basic Instinct, dans lequel elle donnait des suées à Michael Douglas. Le réalisateur s'en explique : "Je trouve qu’on a le droit de faire ça dans un Largo Winch. C’est un film populaire dans lequel on peut jouer avec les codes du cinéma. Mais ce n’est pas moi qui lui ai demandé de croiser les jambes. J’ai juste amené la robe blanche. On ne s’en est d’ailleurs jamais vraiment parlé ouvertement. Mais elle est suffisamment intelligente pour savoir qu’on joue avec ça."
Jérôme Salle parle de la difficulté d'adapter une bande-dessinée en film : "On essaye toujours de donner naissance à des personnages qui ont de la chair, de la matière. Ce qui est toujours un peu plus difficile sur des films comme "Largo", puisque ce sont des films pour lesquels on part de la structure. C’est un mode de travail qui nous oblige ensuite à enrichir les personnages. Et il ne faut pas oublier non plus ce que Hitchcock disait (...) : "Le méchant est le héros de sa propre histoire". C’est-à-dire que vous devez pouvoir être capable de raconter une histoire du point de vue du méchant ou d’un autre personnage du film. (...) Car lui-même a une quête, une motivation, et c’est ça qui le rend intéressant."
Largo Winch II a été l'occasion pour les scénaristes de faire apparaitre des personnages essentiels à la bande dessinée, tels Simon Ovronaz (joué par Olivier Barthelemy), le fidèle comparse de Largo, ou Cochrane, le dirigeant du groupe W (interprété par Ulrich Tukur). Les auteurs ont par ailleurs créé des rôles féminins : celui de Sharon Stone, Procureure à la Cour Pénale Internationale,chargée d’enquêter sur le groupe W et Mamee Napakpapha Nakprasitte, une jeune villageoise karen.
Le réalisateur s'exprime sur le choix de casting du personnage de Simon, emblématique dans la BD, joué par Olivier Barthelemy dans le film : "Je pense qu’on va se faire jeter des pierres, comme toujours. Il ne ressemble pas à la BD, mais ce qu’il fait du personnage est intéressant. Par rapport aux critiques sur le choix des acteurs, je me suis blindé dès le premier film. Les critiques ont été tellement dures et violentes quant au choix de Tomer… A un moment donné, les fans s’accaparent les personnages. Et vouloir les satisfaire, c’est illusoire. Chacun a son interprétation. Si la mienne ne vous plaît pas, j’en suis navré."
Jean Van Hamme, l'auteur de la bande-dessinée originale, a eu un droit de regard sur l'histoire développée par le film, et ses critiques ont été prise en compte, notamment sur des détails qu'il ne jugeait pas clairs.
Les scénaristes ont opté pour un approfondissement de séquences passées sous silence dans la BD originale, comme l'explique Julien Rappeneau : "Dans la série de BD, il est évoqué que Largo a vécu un temps en Asie, à l’époque où il était une sorte de routard. Dans les rencontres qu’il avait pu faire à ce moment-là quelque chose stimulait notre imaginaire (...). Les compromissions ou les liens que des grands groupes peuvent entretenir avec des régimes dictatoriaux, comme celui au pouvoir en Birmanie, est un thème que nous voulions aborder. Dès le départ, on a imaginé que Largo puisse avoir affaire à quelque chose liée à ce que son père aurait pu faire dans le passé. Une "mauvaise action"".
Jérôme Salle fait part de sa vision du scénario pour Largo Winch II : "C’est une thématique proche du super héros. Souvent, le super héros se trouve en possession d’un pouvoir qu’il n’a pas vraiment cherché à posséder, et ce pouvoir lui donne des responsabilités immenses. Que va-t-il en faire ? Le Bien, le Mal ? C’est ce qui est intéressant (...)". Le scénariste poursuit sur l'évolution du personnage : "Dans "Largo Winch", c’est l’accession au pouvoir, l’acceptation du destin. Dans "Largo Winch II", c’est un adulte, il n’a plus rien à prouver, il a accepté sa position."
Jérôme Salle témoigne de l'état d'esprit du travail entrepris sur l'histoire de Largo Winch 2 : "J’avais envie d’un film rythmé, plus riche en émotions. Avec moins de "blabla" financier ! Un "blabla" pourtant nécessaire au développement de l’intrigue, mais qui doit être accessible à tous « pour ne pas faire sortir le public de l’histoire ». Il faut parfois simplifier cette partie du récit. Mais pas trop non plus car aujourd’hui l’économie fait partie intégrante de l’actualité. Il y a deux choses difficiles dans un scénario comme celui-là, explique le réalisateur. " Bâtir un complot qui soit riche et complexe mais qui reste compréhensible, et ensuite faire passer les informations financières importantes pour le complot".
Largo Winch II s'inspire de la bande-dessinée de Jean Van Hamme et Philippe Francq, plus précisément des tomes La Forteresse de Makiling et L’Heure du tigre, mais l'histoire du film a été envisagée par le réalisateur sans trop prendre appui sur ces albums : "Nous avions la volonté de bâtir un scénario qui s’inspirerait de l’univers de Largo Winch, mais qui serait une histoire originale. Notamment, parce qu’en tant que spectateur, j’aime être surpris par l’adaptation d’une œuvre que je connais, être confronté à une histoire différente. Ça participe à mon plaisir de spectateur, et c’est ce que Jérôme et moi avions envie d’offrir. Le tout est de rester fidèle à l’esprit, au rythme et au ton de la bande-dessinée et du premier film", confie-t-il.
Alors que le premier film sortait à peine en salles (en décembre 2008), la suite Largo Winch II était déjà envisagé par la productrice Nathalie Gastaldo. Dès lors, le réalisateur Jérôme Salle et le scénariste Julien Rappeneau ont commencé à imaginer une histoire.
Certains motifs d’instruments asiatiques parsèment la bande originale du film composée par Alexandre Desplat, à commencer par une petite flûte dont le compositeur, expert de cet instrument, a lui-même joué.
Le tournage a duré 99 jours, du 18 janvier au 12 juin 2010, dans de nombreux pays comme la Thaïlande (le village de Malunaï, le camp militaire puis Bangkok), la Belgique, l'Allemagne ou le sud de la France, puis un passage à Hong-Kong et Londres.
Tomer Sisley a réalisé lui-même toutes ses cascades. Il raconte que cela nécessite un entrainement particulier : "La préparation physique a été violente pour moi, car le lendemain du dernier jour de tournage du premier film, j’ai eu un accident de ski et il a fallu relancer la machine. Avant de pouvoir refaire des cascades, j’ai donc du beaucoup m’entraîner. Environ 4 à 5 fois par semaine, avec beaucoup de musculation et d’autres sports (...). Surtout pour bouger et transpirer. Chaque séance durait entre 2 et 3 heures.".
Jérôme Salle détaille la construction des deux scènes de bagarre de son film : "Pour la première, qui se déroule dans le village, j’ai pris le contre-pied du surdécoupage qui se fait depuis quelques années, essentiellement sous l’influence de "Jason Bourne". J’ai voulu profiter du fait d’avoir deux acteurs capables de combattre pour découper la séquence au minimum. Il y a très peu de plans. Il en ressort une forme de violence, car il n’y a pas de triche sur les coups. (...) La seconde scène, dans une chambre d’hôtel, est par contre tournée de manière beaucoup plus découpée."
Tomer Sisley a bénéficié des conseils des meilleurs spécialistes mondiaux : Jean-Philippe Ricordeau, trois fois vice-champion du monde, et les Babylones, champions du monde. Le comédien témoigne : "Les plans les plus dangereux, ce sont ceux où la caméra est relativement fixe – le cadreur chute à plat – alors que moi, j’arrive en passant comme un boulet à côté de la caméra. Ça, ce sont des plans où le cadreur chute à 170 km/h alors que moi, je passe moins d’un mètre à plus de 300 km/h. Si on se loupe, c’est un impact colossal. Autant dire que c’est fini.". Résultat : pour la première fois, une scène de bagarre en chute libre a été entièrement tournée en conditions réelles.
Certaines scènes de cascades ont nécessité une préparation en amont bien particulière, et surtout, l'emploi de la technologie informatique par le réalisateur : "Le storyboard traditionnel ne suffit pas. Il faut alors faire appel au storyboard animé. Comme ce fut le cas pour la course-poursuite en ouverture du film, et la scène de chute libre. C’est encore plus précis. On rentre les décors, les voitures, les acteurs dans l’ordinateur, puis on choisit les angles, les focales. On peut aussi prédécouper la scène, et c’est assez utile".
Le tournage de la séquence de la poursuite a duré trois semaines et demi pour un rendu de 3 minutes.
Le réalisateur a dû faire face à une autre difficulté que régler des cascades : celle de tourner avec un enfant thaïlandais de 4 ans : "(...). A 4 ans, ils voient un plateau de cinéma, des gens qui s’affairent, ils entendent des choses, mais ils ne comprennent pas. C’est un âge vraiment très difficile. Dans ce cas précis, il y avait en plus la barrière de la langue (...). Jusqu’où peut-on aller pour créer des émotions chez un enfant, sachant que ça n’est qu’un film et qu’on peut mettre en danger sa psychologie si on va trop loin ? Franchement, c’est compliqué. Et il y a deux ou trois fois où je ne me suis pas senti bien. Je me demandais si je n’étais pas allé trop loin…", confie-t-il.
Puggy, groupe montant belge – même s’il est composé d’un Anglais, d’un Français et d’un Suédois ! - succède aux Britanniques de Razorlight pour signer le générique de fin de Largo Winch II. C'est une reprise d’un titre de Cat Stevens : Father and son. Le réalisateur raconte sa rencontre avec le groupe : "Je ne connaissais pas Puggy. Le groupe faisait partie d’une liste qu’on m’a proposée. J’ai écouté leur album, je les ai vus à Taratata, et j’ai trouvé ça super. La rencontre avec eux s’est très bien passée, et ils ont fait quelque chose de très bien, qui colle à l’esprit du film, jusque dans leur côté cosmopolite et dans leur style de musique".