Ce film se regarde non par intérêt pour l'histoire, plaisir des situations ou attachement aux personnages, mais pour l'idée que se fait Besson, film après film, du monde dans lequel nous vivons et de la manière dont il croit pouvoir le décrire. C'est donc une énième farce à la Besson que ce From Paris with Love.
Ici deux personnages sont à suivre, joués par John Travolta (JT) et Jonathan Rhys Meyer (JRM). Ce sont les seuls personnages à avoir été "développés" (guillemets de rigueur, le développement étant très léger, "surfacés" conviendrait mieux). Ce sont même les seuls êtres vivants du film, capables de réflexion, de réactions, de mouvements. Les autres intervenants sont ce que l'on nomme dans les jeux vidéos des personnages non joueurs. Ce sont des playmobils placés selon le besoin des scènes, parfois selon rien du tout, pour rebondir ou glisser contre les deux héros. C'est assez révoltant ce culot de Besson, cette manière abjecte de se moquer complétement du spectateur et de son sens critique.
Jugez plutôt : lors d'une énième scène de bravoure JT, surplombant le périph', balance une roquette sur la voiture d'un terroriste qui fonce à contre sens sur un cortège d'officiels américains. La voiture explose. Le cortège, qui avait contemplé le danger lui arriver dessus sans s'émouvoir plus que ça, dépasse ensuite tranquillement la carcasse en flamme du véhicule et continue son petit bonhomme de chemin. Sans ralentir, sans faire demi-tour, sans changer d'itinéraire, sans annuler la délégation, sans même hausser un sourcil devant le carnage, comme si tout ça était normal et attendu, comme si la France c'était l'Afghanistan et le périphérique un repaire de talibans. Bref le cortège ne réagit pas parce qu'il en est incapable, c'est un cortège de playmobils poussé par la main potelé de Besson.
Luc Besson ne sait pas imaginer une histoire où chaque personnage serait doué d'une vie propre. C'est trop compliqué, trop fastidieux. Du coup JT, seul acteur à partager dans le film avec JRM ce don rare qu'est la vie, pour tuer son ennui, va passer tout le film à dézinguer tous les foutus playmobils qui l'entourent, pour un oui ou pour non, juste parce qu'ils sont là. On le comprend, autant se défouler puisque dans ce monde tuer ne porte pas à conséquence. Et même faut bien s'occuper tout simplement, ils ont beau être les seuls êtres vivants dans ce triste univers, JT ne va quand même pas développer une histoire d'amour apocalypique avec JRM, on est chez Besson tout de même ! Y a un cahier des charges.
Je passe sur les clichés. A croire que Besson n'a jamais mis les pieds à Paris, voire en France, et qu'il faut donc prouver à chaque plan que l'on y est bien. Une scène toutefois, pour son ridicule : JT et JRM sont sur la tour Eiffel. Personne n'en tombe mais la question est : que font-ils là ? On ne sait pas. Ils prennent l'ascenseur bondé et en profitent pour sniffer de la coke dedans (les playmobils autour ne voient rien puisque ce sont des playmobils). Arrivés en haut ils lâchent deux banalités qui ne servent en rien la progression de l'intrigue et le plan suivant ils ne sont plus sur la tour Eiffel. Pourquoi étaient-ils donc sur la tour Eiffel ? Et même comment ont-ils fait ? Car toute personne ayant déjà approché le monument sait qu'il faut bien compter à minima une heure de file d'attente pour y grimper. C'est un peu longuet pour ne rien y faire.
Chez Besson même l'histoire semble le fait d'un enfant jouant avec ses playmobils : "alors là on dit qu'ils sont sur la tour Eiffel", et hop ! l'enfant les pose sur sa tour Eiffel playmo.
Je pourrais continuer longtemps et me lamenter du niveau de chaque scène, chaque dialogue...
En conclusion et pour ceux qui n'auraient pas vu ce film : ménagez vos deniers, si vous voulez le voir, attendez le passage TV.