Je suis obligé de reconnaitre qu'au niveau de la mise en scène, Drive a totalement mérité son prix de la Mise en Scène au dernier festival de Cannes. Le cinéaste, un danois, reconnu notamment pour sa trilogie Pusher et qui tournait là son premier film américain, affiche ici une maitrise absolue et totalement subjugante de sa caméra. Tous les plans sont au cordeau, sans une once de gras ou de superflu, et on pense évidemment au cinéma de Michael Mann pour sa stylisation parfaite de la nuit urbaine.
Le film, en fait, aurait pu être tourné dans les années 80 car, de la musique ( bande son aux synthés électro et à la voix aérienne qui participe au coté hyptonisant de la mise en scène) au personnage principal, figure représentative du cinéma de Don Siegel ou William Friedkin, on est bien là dans le hommage revendiqué au cinéma d'il y a 30 ans.
Mais pour moi
(et c'est pour cela que je n'ai pas applaudi à tout rompre avec mes voisins spectateurs),
c'est aussi là la limite du film qui ne dépasse jamais totalement l'exercice de style, et qui surtout manque quand même de profondeur au niveau du scénario. Le driver en question reste totalement un archétype, un personnage comme on en voit que dans les films, et jamais un être de chair et de sang pour lequel on peut éprouver une vraie empathie. Ryan Golsing, encensé pour sa prestation est certes impressionnant de douleur muette et de virilité affichée, mais personnellement je le preferais dans Blue Valentine, dans un rôle bien plus humain et touchant.
Et le personnage joué par Carey Mulligan a bien peu de chair à défendre : on ne sait pas exactement ce qu'elledrive-photo-carey-mulligan ressent, ni ce qu'elle désire réellement, elle reste en l'état de (joli) pantin. Et que dire encore de ces mafiosos un peu croquignolesques qu'on croirait sortis d'un film des frères Coen?
Bref, l'absence - pourtant- assumée- de psychologie m'a un peu géné, et ce qui est d'autant plus dommage que les scènes d'émoi amoureux au début avec ralentis et troubles sur les visages en gros plans, sans le moindre mot échangé sont vraiment d'une beauté visuelle renversante.
Encore une fois, je trouve que Drive est l'exemple même du film où la forme prime sur le fond. Chez James Gray, Alejandro Gonzales Inarritu ou Fatih Akin , pour ne citer que ces 3 là, la virtuosité de la réalisation s'accompagne également d'un scénario éblouissant de fluidité et de complexité.
Ici, et même si le noeud de l'histoire est assez original et romanesque (le "driver" va se trouver enfermé dans une sale histoire car il a voulu aider le mari de l'élue de son coeur), toute l'intrigue parrallèle m'a semblé trop faible, et surtout les personnages trop peu incarnés.