Les réactions dithyrambiques qu'a suscité "Drive" sont plutôt intéressantes à mes yeux, quoi qu'on en dise, c'est fou à quel point la forme peut prendre le pas sur le fond. Pour moi "Drive" c'est ça: un banal film d'action servi dans un emballage particulièrement léché, un film d'action pas mauvais le moins du monde au demeurant, mais à mon humble avis, franchement pas si différent sur le papier d'un "Random Jason Statham Movie" qui prendrais son temps et reverrais sérieusement le nombre de défenestrations de méchants à la baisse, et qui plus est dans lequel les flics sont étrangement absents du scénario. Je ne crache pas dessus loin de là, le film n'est pas mal, mais j'ai beaucoup de mal à me retrouver dans toutes ces critiques en chaleur à l'égard du film de Refn. Pas plus que je ne comprenne l'engouement (de Cannes en particulier) autour de la mise en scène du monsieur. Le film est très agréable à l’œil et son déroulement est fluide certes mais ça ne va pas beaucoup plus loin. Prix de la mise en scène à Cannes, mouais m'enfin une teinte rouge pour traduire la passion et une teinte verte pour le doute et le tourment, c'est joli et ça fait le boulot mais c'est quand même loin d'être le code couleur de "Breaking Bad" hein. Et je m'y retrouve encore moins quand il s'agit de la performance de Ryan Gosling, qualifier de meilleur acteur de sa génération (oui, certaines extrêmes sont effrayantes) un acteur dont le "meilleur rôle" -à en croire certains- consiste en une poker face imperméable à tout ce que nous humains appelons "émotions" mais que l'acteur et/ou le réalisateur préfèrent sûrement qualifier de "surjeu", non définitivement ça ne me parle pas du tout. Gosling semble s'être si bien accommodé à ce genre de rôles qu'il se refuse maintenant à la moindre contraction des muscles de la peau de son visage dans quelque film que ce soit, mais à la base il s'agit manifestement d'une décision de réalisateur, puisque tout le film est à l'image de cette performance: le débit de parole est excessivement lent, quand les dialogues ne sont pas carrément inexistants de l'action pendant un long moment. Pour en finir avec les points négatifs, je ne suis pas non plus fan de l'utilisation de la musique dans ce film, toujours à base de clip-shows qu'on jurerait sortis d'une page de pub. N'empêche que si le film part avec modeste un 3/5 c'est qu'il doit bien y avoir une poignée de choses qui m'ont plu. Donc oui, en dehors de la performance de Gosling, l'interprétation est tout à fait convaincante, et j'adore définitivement Bryan Cranston où qu'il soit. L'utilisation de la musique ne me plait peut-être pas, reste que les musiques en elles-mêmes sont toutes choisies avec soin. Et encore une fois même s'il faut supporter les choix du réalisateur en matière d'écriture de dialogues et de direction d'acteurs, reste que l'histoire est loin d'être mauvaise et que le personnage de Ryan Gosling, malgré son artificialité, a quelque chose de touchant. Il suscite l'empathie au moins, ce n'est pas toujours un job bien mené mais ici ça l'est. Mais surtout, "Drive" reste pour moi un exercice de style particulièrement intéressant: un fond et une forme presque diamétralement opposés, c'est un pari risqué (c.f. "Spring Breakers") et le défi n'est, après tout, pas trop mal relevé.