Le Village des ombres a une moyenne très faible sur allocine, et forcément, on peut se dire que ça va être la cata. Mais j’ai tout de même tenter le visionnage, et mon verdict n’est pas aussi tranché que ça. Oui, le film n’est pas une pépite malaimée, mais très honnêtement, c’est loin d’être le désastre général. Le métrage, tout d’abord, est plutôt esthétique. Dès l’ouverture du film on sent un certain soin apporté à la photographie (qui souffrira cependant de scènes de nuit qui ne font pas toujours vraiment nocturnes), aux décors, en dépit d’un budget que l’on imagine famélique. Le film veut clairement jouer sur son ambiance, et de ce point de vue, il est honnête. Tout du long, elle est bien là, mystérieuse, un peu poisseuse, parfois poétique, souvent inquiétante, soutenu par une musique sans grand relief mais pas hors sujet non plus. Je regrette tout de même que le film, qui se déroule essentiellement dans des teintes bleu nuit ne varie pas plus souvent. Il y a parfois des séquences en intérieur dans des teintes plus chaudes qui viennent créer un peu de contraste, mais elles sont trop rares. Côté mise en scène, c’est propre, avec des cadrages astucieux, quelques travelling malins, et même si le film est souvent trop pépère pour susciter de réelles trouvailles visuelles, il y a des séquences vraiment réussies, comme celle du camion. Toutefois, il faut reconnaître qu’il y a également des flash back dans le métrage, et que les choix esthétiques pour ceux-ci sont plus douteux et que le manque de moyens devient alors trop flagrant pour ne pas sombrer dans la série Z fauché (j’ai parfois revu du cinéma français fantastique des années 80 dans les costumes et la photographie qui se veut vieillotte).
Le casting est très inégal. Beaucoup de jeunes acteurs qui pour certains ont fait de belles carrières depuis, mais dans des rôles sans reliefs ni consistance. Ils ont pour la plupart très peu de background, certains disparaissent sans susciter de vraies questions vu qu’on s’en fiche, et on ne sent quasiment aucune alchimie dans cette bande d’amis, ce qui est pour le moins surprenant car ils vont quand même se perdre ensemble dans un trou paumé ! Leurs relations ne fonctionnent pas, et les acteurs eux-mêmes sont aléatoires dans leurs prestations. Peu aidés il est vrai par des dialogues parfois ridicules, très explicatifs, peu réalistes vus les circonstances, ils ne sont pas vraiment à l’aise dans le registre, ça se sent, et le meilleur exemple est sûrement l’évolution de carrière de Jonathan Cohen.
Le scénario pour sa part a des idées intéressantes, mais le film ne peut que souffrir la comparaison avec d’autres métrages de villages hantés, style Phantom. Il est moins efficace à tous les niveaux, en particulier sur le rythme qui après un départ rapide et un mystère prometteur, s’enlise, se perdant en longueur, surajoutant des éléments qui, à priori intégrés pour que l’on comprenne mieux les tenants et les aboutissants complexes du propos, finissent soit par le rendre plus complexe, soit carrément par le conduire vers les incohérences ou de nouvelles questions sans réponse. Pour ma part, le film aurait dû faire un choix plus trancher. Soit virer carrément au métrage métaphysique à la David Lynch, et laisser plus de questions que de réponses au spectateur, ce qui aurait allégé sensiblement le didactisme de son récit et de ses dialogues, soit virer beaucoup plus à l’horreur graphique, avec des meurtres, du sang, une imagerie sûrement un peu racoleuse mais qui aurait comblé les longueurs. Du reste, le film prend des chemins complexes pour arriver à une conclusion commune à beaucoup de films d’horreur.
En conclusion, Le Village des ombres n’est pas une calamité. C’est un film malade, plein de bonnes intentions, mais qui comme beaucoup de films de genre français de ces années-là, n’avait pas le casting, pas les moyens, une histoire maladroite, et s’est finalement enlisé dans un semi-amateurisme qui curieusement n’est pas sans rappeler la précédente vague du fantastique français, celle qui sentait bon le Jean Rollin et le Delpard. 2