Night and Day : les secrets du tournage

Night and day a été présenté en 2008 au Festival de Berlin, en compétition.

Huitième long métrage d'Hong Sangsoo, Night and day est le premier qu'il tourne hors de la Corée. Le réalisateur a vécu un an à Paris, en 1991. "Le film est donc plus ou moins basé sur cette expérience", reconnaît-il, lui qui avait depuis longtemps l'envie de tourner un film à l'étranger. Il confie avoir été surpris par la fraîcheur du climat dans la capitale française -Night and day a été tourné essentiellement au mois d'août 2007. L'équipe de tournage était en grande majorité coréenne, même si quelques comédiens français apparaissent à l'écran, comme, brièvement, Jérémie Elkaïm, vu dans Presque rien et Sexy boys.

Hong Sangsoo revient sur la genèse du projet : "Je me suis souvenu de cet évènement, qui est en fait banal ; lorsque j'ai appelé ma femme des Etats-Unis, alors qu'il faisait jour aux Etats-Unis, il faisait nuit chez elle. Faire de cela une base pour un film, était une des idées de départ. Ce qui attise ma curiosité dans la naissance d'un nouveau film, c'est l'inconnu. Certes, je savais comment débuterait le film : avec un homme qui pour la première fois de sa vie fume un joint, qui est dénoncé et qui à cause de cette raison ridicule décide de fuir précipitamment à Paris. Je savais aussi qu'à la fin il allait retourner dans son pays grâce à un mensonge bien intentionné. Mais par contre je ne savais pas comment arriver d'un tel début à une telle fin ? Il est très important que je ne le sache pas. Je dois le découvrir moi-même petit à petit. Le premier jet de mon scénario ne constitue pas plus de 30 % du film au final, il n'y a presque pas de dialogues."

Quelques semaines avant la sortie de Night and day, on a pu voir en France un autre film tourné à Paris par un réalisateur asiastique majeur : Le Voyage du ballon rouge de Hou Hsiao Hsien avec Juliette Binoche. Alors que Hong Sangsoo arpente les rues du XIVe arrondissement (du côté d'Alésia), l'auteur de Millennium Mambo montre essentiellement le Quartier latin et le Musée d'Orsay. Et c'est dans le cimetière Montparnasse que Tsai Ming-liang, grand admirateur du cinéma de la Nouvelle vague, filme Jean-Pierre Léaud dans Et là-bas, quelle heure est-il ? (2001). A l'inverse, plusieurs cinéastes français sont partis tourner en Asie ces derniers années, d' Olivier Assayas (Boarding gate) à Barbet Schroeder (Inju, la bête dans l'ombre) en passant par Jean-Pierre Limosin (Tokyo Eyes, Young Yakuza). Précisons que le Musée d'Orsay est également présent dans Night and day, comme on peut le voir sur l'affiche, et que Hong Sangsoo a aussi tourné quelques séquences à Trouville.

Hong Sangsoo, dont les films semblent laisser place à l'improvisation, parle de sa méthode de tournage : "J'essaie de tourner si possible chronologiquement. Les dialogues, je les écris toujours le matin du tournage. J'allume l'ordinateur et l'imprimante, je fais un tour des décors et j'écris les dialogues. Les idées et les influences viennent donc de partout. Je suis influencé par le matériel qu'on a déjà tourné, je parle un peu avec les comédiens, je me concentre sur moi-même et je deviens un peu un aimant qui attire les idées et les motifs. Naturellement j'y pense là et j'élabore un plan. Puis je lâche ces idées et j'essaie d'accepter les choses comme elles arrivent. Peut-être que ce sont des bouts de conversation, un souvenir, ou un élément tiré d'un livre. Ce que j'adore par-dessus tout dans ce travail est l'irruption de l'inattendu." Il ajoute, concernant la forme du récit : "J'ai choisi une narration qui utilise la voix intérieure de l'homme ainsi qu'une structure qui l'apparente à un journal intime. J'ai aussi choisi d'utiliser une voix off pour que l'on comprenne le ressenti qu'a cet homme des gens qui l'entourent."

Hong Sangsoo évoque ses influences cinématographiques... et picturales : "A vrai dire j'admire beaucoup de réalisateurs : Ozu, Buñuel, Murnau. Mais l'artiste dont je me sens le plus proche, c'est Paul Cézanne car il allie avec brio l'abstrait et le concret. Quand j'ai vu ses tableaux pour la 1ère fois, j'ai eu comme une révélation."