"Dans le film, j'ai évité d'aborder le caractère social des personnages; il n'est question ni de pauvreté ni de marginalité. J'ai essayé de les définir avec un regard plutôt neutre. Ce sont des hommes, des femmes, des pères, des mères, des épouses ou époux. Je voulais que l'attention se porte sur leur état d'esprit. Ces gens vivent dans une ville sans caractère. Ils ont un problème pour lequel ils n'ont ni choix, ni solutions. Ils doivent faire face et subir. Peu importe où se déroule cette histoire, je pense que les personnages feraient le même choix. Face à la vie et la mort, l'amour et la confiance montrent leur vrai visage."
Contrairement aux précédents longs métrages de Wang Xiaoshuai, dont l'histoire ne pouvait se passer qu'en Chine, celle d'Une famille chinoise a une résonnance un peu plus universelle, comme l'explique le réalisateur : "Mon idée était de donner l'impression d'une vie ordinaire, normale qui aurait pu se dérouler dans n'importe quel pays. Ces derniers temps, en Chine, les cas de leucémie semblent être de plus en plus nombreux. On en parle de plus en plus. Mais ce qui m'a intéressé dans ce sujet, ce n'était pas le problème spécifique d'un pays face à cette maladie, mais la situation contemporaine de ces personnages : leurs espoirs, leurs problèmes de santé, et leur attitude face à la mort. Ce sont des hommes et des femmes avant d'être des Chinois."
Une famille chinoise évoque les "bébés médicaments", "les bébés donneurs ou docteurs" et les "bébés du double espoir". Soient trois termes qui évoquent tous la même chose, à savoir la possibilité de mettre au monde un enfant conçu pour soigner un grand frère ou une grande soeur atteint d'une maladie rare. Une pratique autorisée (mais strictement règlementée) en France depuis l'application de la loi de bioéthique du 23 décembre 2006, et qui a pris une ampleur toute particulière en Chine, politique de l'enfant unique oblige.
Elément de réponse avec Wang Xiaoshuai : "Le film n'est pas très réaliste : je pense que dans la vraie vie, cette situation serait beaucoup plus compliquée, et que de nombreux autres problèmes s'y ajouteraient. Mais j'ose espérer que les gens prennent leurs responsabilités et comprennent les problèmes. Pour moi, lorsque l'on est au milieu de sa vie, on doit savoir faire des choix. En tout cas c'est comme cela que je vois les choses. Je ne sais pas comment cela qualifie mon film..."
Si l'évocation de la ville de Pékin éveille certains rêves chez certains, il n'en va pas de même chez Wang Xiaoshuai : "Pour moi, Pékin n'a plus rien de spécial. Ce n'est plus qu'un lieu où l'on vit. C'est pourquoi, lorsque nous avons cherché les décors du film, nous avons choisi les lieux les plus ordinaires. Mon intention était de donner à voir ce nouveau Pékin." Le metteur en scène d'Une famille chinoise ajoute également : "J'ai [...] choisi des chantiers de construction, car aujourd'hui Pékin est un immense chantier. Pour la scène d'ouverture, avec l'entrée dans la cité, je voulais donner l'impression de ces vies qui semblent ne plus avoir de sens. C'est de plus en plus froid et triste. Il n'existe plus de relation entre les voisins. Les gens ne se connaissent plus."
Une famille chinoise est le dixième film réalisé, en l'espace de 15 ans, par Wang Xiaoshuai.