Jean-Pierre Jeunet travail en solo pour la quatrième fois, toujours associé aux mêmes techniciens, scénaristes et directeur de la photographie. Le cinéaste nous plonge une fois du plus dans un univers sépia d’un effet appréciable qui ne saura toutefois captivé tout le monde. Si majoritairement, Micmacs à tire-larigot n’aura pas impressionné les foules, il s’agit pour ma part d’un petit coup de cœur, d’une comédie à la fraicheur inespérée qui refait découvrir les dessous d’un cinéma très personnel, que l’on apprécie ou pas. Oui, c’est bien le problème de Jeunet, artisan d’un cinéma soit adoré soit conspué, sans entre deux. Relativement homogène en regard à la filmographie du réalisateur français, tout de même metteur en scène du quatrième volet de la franchise Alien aux Etats-Unis, Micmacs se place peut-être bien au rang du film le plus accessible du lot.
Un film esthétiquement très particulier qui se cache derrière une comédie française traditionnelle. Les déshérités qui mènent la vie dure aux fortunés, aux profiteurs, aux mauvais, en somme. Victime de deux arsenaux, marchands d’arme pour parler franchement, Bazil, une balle en suspend dans le cerveau, s’associe à une troupe de marginaux pour faire payer aux armuriers leurs cupidités, leurs mesquineries et leurs ignorances. Si j’ai trouvé le script très drôle, je comprends toutefois qu’un pan du public ait été pris de répulsion devant un récit à la morale simpliste qui voit les marchands de mort mis au tapis par la naïveté et la bonté du bas peuple. Passé là-dessus, l’inventivité du cinéaste reprend le dessus, dans les babioles, les détails.
Une comédie drôle, c’est déjà un bon début, au jour d’aujourd’hui. En effet, l’esthétisme ne faisant pas tout, Jeunet aura concilié sa méthode à la recette éprouvée de la comédie traditionnelle. Recherchant un personnage principal digne d’intérêt, dans le jeu mais aussi pour le buzz de son film, Jeunet fait signer Dany Boon, acteur populaire tout droit sorti du One Man Show. Le bonhomme, exubérant, convient parfaitement à la définition du personnage de Bazil, sachant jouer le naïf, l’astucieux simplet, le grimaçant. Pour tout dire, Dany Boon, ici dirigé par un cinéaste d’expérience, délivre sa meilleure performance au cinéma. Là encore, tout est question d’opinion.
Autre force de Micmacs à tire-larigot, un titre en lui seul original, une vision de la métropole parisienne sans pareille. Les tons jaunâtre, verts, sépias, de Jeunet, associés des prises de vues dans un décor naturel ou urbain recherché transforme la capitale française que l’on connaît en une cité intemporelle, toute aussi industrielle que champêtre, un drôle de mélange. Coté photographie, Jeunet privilégie une association de modernisme et rétro, année 60 entre autre. Oui, un film remarquable selon moi, qui démontre que l’on peut sans cesse se réinventé à force d’idées. 16/20