Le Voyage aux Pyrénées a été présenté en 2008 au Festival de Cannes, dans le cadre de la Quinzaine des Réalisateurs.
"L'écriture s'est construite autour de trois thèmes... assez spéciaux !, confie Jean-Marie Larrieu, qui énumère : "1. Un couple de comédiens célèbres, dont le mari décide de confronter sa femme à la beauté des montagnes, pour la soigner de sa nymphomanie. 2. Un ours, car si on demande aux gens dans la rue d'évoquer les Pyrénées, ils disent " ours " ! 3. Ce que l'on a appelé d'abord " l'échange des âmes ", avant que cela ne devienne " l'échange des corps ", une partie inspirée de la mystique des montagnes, avec ces nombreuses histoires d'apparitions qui émaillent la légende des Pyrénées... Ces trois aspects se mélangeaient : on peut dire que les comédiens sont aussi par essence des apparitions..."
Héroïne du Voyage aux Pyrénées, Sabine Azéma jouait déjà l'un des rôles principaux de Peindre ou faire l'amour. On retrouve également, dans un petit rôle, celle qui était sa partenaire dans ce film : Amira Casar. Jocelyne Desverchere, qui tourne avec les Larrieu depuis leurs premiers courts métrages au début des années 90, figure elle aussi au générique.
Jean-Marie Larrieu revient sur la genèse de ce film : "Après Peindre ou faire l'amour, nous avons enchaîné sur un projet très ambitieux, un film urbain et international. Nous l'avons écrit, mais le tournage a été repoussé d'une année. Devant cette fenêtre de temps assez courte, nous avons décidé de nous remettre à écrire illico. On déjeunait de temps en temps avec Sabine Azéma, et nous lui avons fait la proposition suivante : nous tournons cet automne avec toi un film en montagne, tu seras en couple avec un autre comédien, ça s'appellera Le Voyage aux Pyrénées. Un titre, deux personnages, un lieu, elle a immédiatement dit oui." Son frère Arnaud précise : "Comme tous cinéastes, nous avons toujours eu dans un coin de notre tête LE grand projet, qui rassemblerait toutes les histoires que nous voulons raconter. Ce film total se passerait dans les Pyrénées, notre région d'origine. Au programme : alpinisme, voyage romantique façon XIXe siècle, légendes d'apparitions, histoires d'ours... Le Voyage aux Pyrénées est une version contractée, rapide, survoltée, de ce film total."
S'ils ont accédé à une large reconnaissance grâce à un film tourné dans les Alpes (Peindre ou faire l'amour), la région chère au coeur des réalisateurs, celle dont ils sont originaires, et qui est le décor de la plupart de leurs films, ce sont les Pyrénées. Arnaud Larrieu note, à propos de ce retour aux sources : "(...) revenir aux Pyrénées, c'est (...) revenir au pied d'un mystère à chaque fois plus grand. Cette montagne, on y va de moins en moins depuis qu'on habite à Paris, mais à chaque fois, y passer une journée est un voyage, une découverte. Quand on dépasse le cliché de surface, cette idée de prendre l'air, qu'il va faire bon, qu'on va se reposer, faire du tourisme ou du sport, la montagne devient tout autre chose." Son frère compare le cinéma à une marche en montagne : "Tout commence d'une certaine façon, et puis tout se transforme (...) Après une demi-heure, le spectateur peut se retourner vers le début du film, comme s'il était sur une crête, et se dire : "Quel chemin on a parcourt !"
Arnaud Larrieu situe Le Voyage des Pyrénées par rapport aux précédents films, concernant la question du couple : "Un homme, un vrai suivait le schéma rencontre-rupture-retrouvailles, comment un couple se structure. Après la fondation du couple, Peindre ou faire l'amour saisissait le couple beaucoup plus tard dans son évolution : comment il peut se survivre dans son désir... Dans Le Voyage aux Pyrénées, on est parti sur le raisonnement inverse : un couple qui ne fait plus l'amour, mais qui est toujours ensemble." "On comprend que l'homme et la femme ont tous les deux du désir, en particulier, de manière très forte, la femme. Par quoi vont-ils passer pour refaire l'amour ensemble ? Il y a un trajet, une métamorphose, c'est l'idée centrale du film", souligne Jean-Marie Larrieu.
Un des personnages-clés du film est un mystérieux ours... "On se demandait si l'ours devait être un faux, ou bien s'il fallait jouer le réalisme. Nous avons décidé que ce serait tout à la fois, c'est-à-dire un ours de théâtre et malgré tout, une bête assez impressionnante.", confie Jean-Marie Larrieu. Arnaud ajoute : "L'ironie c'est que nous avons rencontré juste avant le tournage un comédien d'un genre particulier, Cyril Casmèze, dont la spécialité est d'incarner les animaux, en particulier les fauves. Il le fait avec un réalisme confondant qui frise la possession. Il refuse en général le port des costumes parce qu'ils entravent ses mouvements, créant une sorte de créature mi-homme, mi-bête. On a réussi à le persuader d'endosser le costume d'ours, et on a ainsi obtenu toutes les dimensions possibles de la créature telle que la fantasmaient nos deux comédiens : du nounours de l'enfance au fauve affamé, de la bête de cirque au réfugié kosovar, du psychopathe déguisé à la bête de sexe, en passant par le... comédien farceur, lui-même en vacances." Une de leurs inspirations pour ce personnage fut le film La Bête de Walerian Borowczyk.
Le chanteur Philippe Katerine, qui avait composé la BO de Un homme, un vrai puis de Peindre ou faire l'amour (film dans lequel il faisait aussi une apparition), joue ici le rôle d'un moine. S'il n'a pas composé la musique du Voyage aux Pyrénées, on l'entend interpréter une chanson... La partition du film est en effet signée Daven Keller, pseudo derrière lequel se cache le chanteur pop Pierre Bondu -qui collabora avec Katerine sur l'album Robots après tout.
Pendant une de leurs promenades, les héros se retrouvent à côté d'un panneau indiquant "La Brèche de Roland". Ce sommet des Pyrénées avait donné son nom au moyen-métrage qui fit connaître les Larrieu en 2000.
Jean-Marie Larrieu parle du personnage qui accueille nos deux héros dans les Pyrénées, Tenzing, "nom du premer sherpa qui a conquis l'Everest avec Sir Edmund Hillary, en 1953" : "Plutôt que d'entendre le patois local, il nous semblait plus intéressant et plus drôle d'entendre une des langues de la montagne absolue, l'Himalaya. Et il est vrai que toute personne née en montagne est partout chez elle dans toutes les montagnes du monde. C'est le contraire du régionalisme. Du coup le bigourdan (occitan local) se retrouve en chanson, côtoyant le latin de la messe en sol majeur de Francis Poulenc", explique-t-il, qualifiant Le Voyage aux Pyrénées de "film-trip".
Les cinéastes avaient pensé donner au film un sous-titre : Fantaisie pour deux comédiens célèbres.