Cette fois, c’est le scalp de trop. Le film s’ouvre sur une femme indienne mise à mort puise scalpée par l’homme blanc métis collectionneur de chevelures et surtout très, très méchant. Il déteste les peaux rouges parce que lui, mulâtre, ne peut même pas se dire de sang pur. Or cette femme du début incarne la mère-patrie de la tribu du héros, Navajo Joe. Forcément. Pas content, le jeune Indien part proposer ses services : la vengeance contre des sous. S’ensuivent des aventures très originales, une vengeance et des sous. Navajo Joe déboise, déracine, déneige les sols arides de l’Ouest américain : aussi fin que du gros sol, il est la solution à tous vos problèmes. « Il faut faire quelque chose, ils peuvent nous attaquer » ; « mais nous ne pouvons rien faire », qui appeler ? Navajo Joe ! Une vengeance à organiser ? Une fuite d’eau à réparer ? Appeler Navajo Joe. C’est une heure trente de déplacement, et on les sent passer. Ennio Morricone braille dans nos oreilles ses cris insensés en italien – si vous survivez au générique introductif, véritable pensum musical, soyez bénis – et, en cela, traduit par les sons l’héroïsme que le réalisateur ne parvient pas à faire naître autrement. Car dès qu’apparaît le héros, voici venir le thème qui hurle son nom (pour le spectateur distrait). On le frappe on le fouette on le pend par les pieds mais bon, il tient le choc. Reynolds est le nouveau Jésus aux coquelicots. La mise en scène laisse éclater quelques très bonnes idées mais racolées les unes aux autres comme les perles d’un collier de contrefaçon. Et l’écriture est d’une bêtise ! Un train doit s’arrêter en pleine course pour éviter des troncs d’arbres obstruant la voie, mais personne ne se doute que cet acte sonne un tant soit peu suspect… Dommage que l’ensemble soit aussi premier degré et aussi balourd, car une réflexion plutôt intéressante sous-tend le récit : la notion de pacte entre l’homme blanc et l’Indien, l’identité américaine que l’on s’octroie ou non à la seule vue de la couleur de peau. Navajo Joe confond baroque et balourdise, se vautre dans la débauche d’effets tape-à-l’œil et dans l’outrancier, là où un tel sujet aurait mérité un traitement plus mental. Finissons en beauté : dans le denier plan du film, une femme parle à un cheval, et ce dernier lui obéit. Voilà le programme.