Introduction :
En gestation depuis bon nombre d’années, attendu depuis près de deux ans après avoir été bouclé, car retardé pour cause de problème au niveau de son montage, Tree of life arrive enfin dans les salles obscures. Le film porte néanmoins une lourde tâche sur ses épaules, celle de raconter et mettre en scène l’origine de la vie rien que ça !
Projet d’une vie donc, The Tree of life a quand même été en gestation depuis la fin des années 70, les spectateurs sont maintenant installés et prêts à vivre une fois de plus une « Expérience à la Malik ». 5 ans après Le nouveau Monde, car c’est aussi de cela qu’il s’agit lorsque l’on va voir un film du réalisateur Texan, s’immerger complètement pour prendre part à une expérience cinématographique unique dont lui seul a la maitrise et le secret.
Rencontre avec le divin :
La naissance de la vie sous le prisme de Terrence Malick est en fin de compte quelque chose d’assez logique dans la carrière du cinéaste. Logique, car habitué à nous servir de longues, mais intenses épopées philosophiques et mystiques toujours aussi fascinantes, car souvent traités de façon unique avec une grande place sur le questionnement de l’homme. Quelle place il occupe en ce monde et quelle relation entretient-il avec le divin ? Tree of life tentera (en vain) de répondre à ces questions vu que c’est l’angle d’approche choisit par le réalisateur à travers la naissance, la destruction puis la résurrection d’une petite famille américaine.
Si le mysticisme et la religion n’ont jamais été un problème majeur dans les films de Malick, le traitement qu’il a choisi ici est beaucoup plus frontal limite, indigeste ! Même si ces thématiques font grandement partie de la culture américaine (surtout au Texas) on ne cesse de penser que le réalisateur nous impose une vision beaucoup trop « fermée » voir limite arrogante sur le sujet dont il ne maitrise pas forcément. La faute à une narration (qui n’en est pas vraiment une au sens propre) ainsi que certaines séquences beaucoup trop longues ou foutrement mal amenées à l’image de la création puis de la naissance de la vie sur terre.
En effet, cette séquence est tellement mal agencée dans le récit, sil mal que l’on a l’impression d’assister à un documentaire de la National Geographic en plein milieu d’un deuil qu’est en train de vivre une famille. Un vrai « What the fuck » nous brule littéralement les lèvres et à ce moment précis se pose une question cruciale : « Pourquoi Malick n’a pas dilué cette partie DANS le récit plutôt que de nous la servir sur une séquence à part entière qui dure tout de même pas loin de 15min ?
A côté de cela, la direction artistique est toujours au top à commencer par les acteurs. Si Sean Penn (Jack) se fait rare à l’écran c’est simplement parce que ses courtes apparitions sont justifiées par le scénario. Etant le « vecteur » du récit et la source d’où émanent les doutes, les questions, les souvenirs...ce dont se souvient Jack et ce qu’il ressent, le spectateur le ressent en même temps que lui à travers ses fragments de mémoire. C’est peut-être l’une des plus grandes réussites de Tree of life en plus de sa réalisation. Celle de faire complètement partie de cette famille, d’être dans leurs intimités, partager leurs joies, leurs tristesses et leurs colères malheureusement cette seconde partie du film se retrouvent plombé par l’onirisme exagéré voir exacerbé de Malick. Les gosses sont eux tous excellent, Brad Pitt en père obsédé par la réussite et dur comme de la roche s'avère être impressionnant voir tétanisant par moment. Pour finir, Jessica Chastain en mère de famille aimante s'avère elle aussi majestueuse par sa silhouette, sa beauté naturelle, vraie et remplie de tendresse.
Réalisation :
La qualité première de Tree of life est bien entendu sa réalisation, car oui le film est beau, magnifique et il est quasi certain qu’elle en deviendra une source d’inspiration pour bon nombres de réalisateurs. On arriverait presque à sentir les odeurs, l’air sur notre peau, l’humidité bref le sens du détail et Malick, ça le connaît depuis toujours. Tree of life semble être la consécration ultime de toutes les techniques et caractéristique si propre du réalisateur cela dit, il n’en est pas de même pour son montage ou même sa durée ou son accessibilité. C’est long, foutrement long, mais vous me direz, « tous les films de Terrence Malick sont longs » oui certes, hors le souci c’est que Tree of life souffre grandement au niveau de la narration et de son montage cité plus haut. Si l’autre grande qualité des films de Malick est de nous transporter, nous faire voyager ils restaient toujours « terre-à-terre » jusque-là, car traitant de sujet ou de thèmes qui nous sont familier ne laissant pratiquement jamais le spectateur passif devant les évènements qu’ils « vivaient ».
Même les grands réalisateurs atypiques peuvent faire des erreurs et avec un projet d’une telle ampleur il aura été difficile pour Malick de ne pas sombrer et tomber dans ses propres pièges. Piégé, car enseveli par ses propres images (si belles soit-elles), par ses propres convictions ultras personnelles qui rend la narration de Tree of life difficile et limite incontrôlable pour le spectateur. Pourtant, toute la partie de la naissance des enfants jusqu’à leur adolescence reste probablement l’un des meilleurs moments de cinéma vu et vécu par un spectateur. Normale, car comparé au reste, cette séquence est surtout maitrisée à la perfection au niveau de son rythme, de ses images (jamais une de moins, jamais une de trop) et de son montage. Malheureusement, au finale ses scènes se retrouvent beaucoup trop rares, car noyées par la portée mystique de Malick cette fois beaucoup trop pesante. Sans oublier le faite que le réalisateur ne nous invite rarement à prendre cordialement part à SON expérience puisque c’est de cela qu’il s’agit, SON expérience, SA vision.
Conclusion :
Qu’il est difficile de rendre un avis tranché sur la dernière œuvre de Malick. On ne peut pas dire qu’on ait aimé et on ne peut pas non plus dire qu’on est détesté tant certains passages cités plus haut s’avèrent être éblouissants. Ce que l’on peut dire en revanche c’est que l’on ne peut qu’être facilement empli de frustration, car si les films de Terrence Malick ne sont pas reconnus pour être des œuvres accessibles, Tree of life semble pour la majeure partie du public une œuvre presque complètement hermétique. Le montage (principale cause du retard du film sur sa sortie) reste sans aucun doute l’un des problèmes majeurs de Tree of life et il aurait peut-être mieux fallu que le réalisateur de La ligne Rouge essai d’alléger certaines séquences. Les plans du ciel et des arbres « en veux-tu en voilà » propres à la touche personnelle du réalisateur ressemblent parfois à un vulgaire « mode repeat ». Tout comme les acteurs qui chuchotent de façon pratiquement permanente en voix off penchant parfois maladroitement l’œuvre vers une espèce d’autocitation mal venu, les tics du réalisateur semblent de trop cette fois et il n’est pas non plus aidé par la portée mystique, spirituelle et religieuse de son scénario. A trop « suinter » de tous les pores le mysticisme au lieu de « l’insinuer » il arrive souvent au spectateur de rester carrément passif voir impuissant. Et pour peu que certaines personnes aient des soucis avec le puritanisme américain ou des comptes à rendre à dieu le père et/ou à la religion alors là c’est la chute libre assurée et sans filet !
Parfois on décroche, parfois on plonge littéralement, parfois on respire et contemple la mise en scène de LA beauté simple et pure, parfois on suffoque et on étouffe littéralement. Tree of life reste au finale une œuvre bancale magnifique et en même temps extrêmement exaspérante.
Par Vincent N.Van du groupe Madealone.