Malgré les critiques virulentes et acerbes dont ce film a honteusement fait l'objet par des soi-disant « critiques » dont le manque de professionnalisme n’a d‘égale que leur bêtise et étroitesse d’esprit (pour rester poli), je ne peux que constater, après un double visionnage, que celles-ci sont, une fois de plus, totalement injustifiées, car à l'exception de quelques effets visuels ratés (notamment les passages en voiture où l'on perçoit trop l'incrustation des comédiens avec le faux décor), d’une mise en scène quelque peu impersonnelle et d'un final qui aurait mérité de prendre un peu plus son temps, ce film a largement sa place au sein de la saga Rambo et ne démérite absolument pas.
En effet, et contrairement aux autres opus, cet épisode se veut plus "humain", plus personnel, avec un John Rambo plus ouvert sur les autres, plus sociable, et qui semble avoir enfin retrouvé un semblant de vie normale. "Semblant" car il est - et sera - toujours hanté par ses vieux démons et continue de souffrir d’un syndrome post-traumatique duquel il lui est impossible de se libérer. Son mode de vie souterrain (peut-être la plus belle idée du film) en est la preuve évidente. Oui, Rambo est une victime, une victime du système, une victime de l'Amérique qui l'aura à la fois glorifié et rejeté. Un outil de propagande, l’enclume et le marteau d’une mère patrie qui l’aura peu à peu renié.
C'est donc avec un certain étonnement qu'on le voit pour la première fois à l'écran quelque peu "apaisé" par ses tourments, tourments apaisés grâce à la présence et au soutien de sa famille d'adoption. Et le voir jouer un père de substitution a quelque de chose de profondément touchant, notamment grâce à la formidable interprétation de Stallone littéralement habité par son personnage et qui lui confère une aura quasi mystique.
La 1ère partie du long métrage se veut par conséquent relativement légère (malgré une intro somme toute assez intense faisant écho au 1er épisode) et intimiste - ce qui est d’ailleurs assez déstabilisant au début - et rien ne nous prépare au brutal revirement de situation intervenant à mi-parcours. A cet instant, une ambiance délétère et glauque s’installe, parfois malsaine et difficilement supportable car traitant d’un sujet sensible malheureusement trop souvent passé sous silence (la traite des blanches). Et pourtant, c’est ce réalisme brut et cru qui fait toute la force du film (comme c’était déjà le cas pour son prédécesseur en 2008 qui nous montrait une terrible guerre civile étrangement peu - ou pas - médiatisée) à une époque où la plupart des studios opte pour une approche aseptisée et guimauve de leurs longs-métrages afin de faire le maximum d’entrées et donc d’argent. Triste époque…
Suite à cette tragédie, on découvre pour la 1ère fois un John Rambo aveuglé par la colère (et ses sentiments – une première !) qui perd ses moyens, qui n’est pas préparé à ce qui l’attend et la sanction sera terrible. Et sans appel.
A partir de là, tout bascule, le film verse dans un thriller sanglant et désespéré dont personne ne ressortira indemne. Y compris le spectateur emporté dans le tourbillon de rage rancunière qui animera un héros détruit de l’intérieur. Il le dira d’ailleurs lui-même au « chef » esclavagiste : « Je t’arracherai le cœur comme tu as arraché le mien » ! Une phrase lourde de sens car cela ne faisait guère longtemps que son cœur s’était mis à battre à nouveau au contact de sa nouvelle famille… Sa résurrection n’aura que peu duré et le dernier tiers du film, bien qu’un peu trop vite expédié à mon sens (plus de suspense dans la traque de ses ennemis aurait été bienvenu), sera le théâtre d’une vengeance létale finement orchestrée par un John Rambo redevenu pleinement maitre de lui-même et du terrain. Et ses adversaires le paieront cher, très très cher. La violence de ce dernier acte n’est jamais gratuite mais pleinement justifiée par la haine et le dégoût que nous inspirent les malfaiteurs de part les effroyables exactions commises envers les femmes. Pour faire simple : ils n’ont que ce qu’ils méritent. Rambo leur inflige des souffrances à la hauteur de leur cruauté. Et c’est sacrément jubilatoire tant on éprouve de l’empathie pour ce personnage tellement humain et si proche de nous finalement !
Ce qui est également réjouissant dans ce final, c’est le retour aux sources opéré par le personnage. Fini les massacres interminables (mais hautement jouissifs) à la mitrailleuse lourde, place à la mise en scène de pièges ingénieux et fatals où Rambo fait toute la démonstration de son incroyable savoir-faire dans ce domaine. Une séquence d’une incroyable intensité et qui prend aux tripes.
Un petit mot également sur la B.O de Brian Tyler dont les références aux compositions de Jerry Goldsmith titilleront la fibre nostalgique du fan. Un arrière-goût vintage qui n’est pas pour déplaire…
Bref, même s’il n’est pas parfait et que le manque de budget se fait parfois ressentir, cet ultime (?) opus mérite amplement sa place dans la saga en nous décrivant la résurrection d’un homme frappé d’une malédiction qui toute sa vie le privera d’un bonheur auquel il ne pourra jamais aspirer.
Une très belle et émouvante conclusion pour cet éternel lonesome cowboy.