« La Forteresse cachée » est un pur divertissement, mais un divertissement de grande qualité, denrée plus que rare dans le paysage cinématographique actuel. Akira Kurosawa use pour la première fois du format cinémascope, mais le maîtrise déjà : sa science du cadrage fait de chaque plan une image mémorable.
Et le scénario s'avère haletant : un territoire japonais, le fief Akizuki, est décimé et occupé par un fief rival, celui des Yamana. La princesse du clan Akizuki cherche alors à quitter ses terres, avec l'or de sa famille, pour faire renaître sa dynastie. Elle est accompagnée de fidèles compagnons, et l'on suit donc la fuite des héros, cherchant à tromper la vigilance des Yamana.
Sans compter que l'on est guidé dans ce périple par deux anti-héros : les paysans cupides Tahei et Matashichi, très drôles. « La Forteresse cachée » est parcouru d'un certain pessimisme, assez sombre, et en même temps d'un souffle réjoui, plein d'espoir dans le renouveau, et empreint d'une joie parfois picaresque.
Ainsi, « La Forteresse cachée » est un grand film d'aventure, une fresque épique qui n'a certes pas la profondeur des « Sept Samouraïs », ni l'éclat formel du « Garde du corps » (encore que) ou de « Sanjuro ». Mais c'est un long métrage en tous points réussi, émaillé de scènes d'anthologie : le combat à cheval de Rokurota, la danse du feu, les différents rebondissements...
N'oublions pas les acteurs, tous excellents, des deux paysans en passant par la princesse ou Mifune, égal à lui-même. Mentionnons pour finir la présence, en filigrane, de préoccupations sociales, typiques du cinéma de Kurosawa. « La Forteresse cachée » devient alors un film initiatique, notamment pour la princesse, qui reconsidère son peuple et apprend de son périple.
Sans être le plus grand des Kurosawa, ce film remonte sans cesse dans mon estime à chaque fois que je le revois, et je finis par penser qu'il figure dans ce qu'il a fait de mieux. Un long métrage de bien belle facture qui réserve un agréable moment de cinéma.