Un train qui se dirige vers Avignon. Un israélien passe devant les compartiments, et demande du tabac à une femme, israélienne elle aussi. Cinq minutes après, ils s'embrassent. Les vitres du couloir sont ouvertes, et l'élan du train laisse passer bruyamment un vent frais. Cette rencontre, magnifique dialogue de l'amour quasiment improvisé, est le point de départ du nouveau film de Amos Gitaï (chouchou du festival de Cannes), et illustre rapidement la suite du film, tout du moins son but. A travers les frontières (à signaler, le train traverse la frontière puisqu'il n'est pas encore à destination, d'où le choix de proposer cette scène comme un point incertain des relations), relier des personnages, des petits drames aux grand drames, rapprocher des gens qui ignorent tout de l'autre. Mais "Désengagement" n'est en aucun cas un film choral. Divisé en deux parties (la première, en France, où l'homme du train fait le deuil de son père avec sa demie-soeur excentrique), Gitaï tente d'organiser un discours de paix, et en dehors de la tension avec la Palestine (magnifiquement esquissée lors d'un vague instant derrière des barbelés), un discours de paix entre tous les pays. S'il rassemble pour l'occasion un casting universel (Juliette Binoche, Hiam Abbass, Jeanne Moreau, Barbara Hendricks) et particulier car il réussit à s'incruster à n'importe quel moment, à n'importe quel endroit avec un naturel saisissant, son mécanisme lui-même touche à l'épure et à la puissance fondée, universel aussi dans sa manière d'aborder le problème de la tension naissante au bord d'un drame personnel. Pour autant, sans lui reprocher sa construction tripartite (la scène d'ouverture dans le train + celle, plus tard, sur la zone de chargement, forment les transitions respectives entre la partie en France et celle en Israël), on pourra vite juger Gitaï sur d'autres choses ; une en particulier : cette France enlaidie qu'il filme comme des toilettes, esquivée dans sa grisaille morne. On pourra vite me ra