Un très beau film, digne adaptation du roman de Philip Roth. Le sujet qui paraît assez futile au premier abord est beaucoup plus profond. Il s’agit de l’attirance d’une jeune élève d’un cours de philo pour son professeur plus âgé, mais au charisme séducteur, « thème classique » .La belle jeune fille, immigrée cubaine, à la famille très conservatrice, a craqué pour son prof ,représentant de l’ intelligentsia américaine, écrivain et critique d’art. Mais là où le sujet est traité de manière originale, c’est sous l’angle du professeur , intellectuel progressiste, épicurien, mais lucide qui ne veut pas s’embarquer dans cette affaire avec une JF de 30 ans plus jeune, qui a tout son potentiel de vie devant elle . Il veut bien s’amuser, partager des bons moments, mais ne veut pas se « lier » avec elle. Il est de toute façon antisystème et anti conformiste, il avait déjà abandonné sa première femme et son fils, avec qui il essaye maintenant de renouer. C’est la confrontation de son anticonformisme à une demande d’amour classique et romantique de Consuela qui est passionnante. Survient en 2e partie la maladie de Consuela , son cancer qui va raccourcir sa vie de toute façon, et qui fait que leur amour aurait pu être possible, puisque son potentiel de vie est de fait, plus courte que celle du Prof . C’est un magnifique choix Cornélien, existentiel qui nous est proposé. Et ce roman de Roth, pourtant mineur dans son œuvre, prouve tout son talent, et le positionne bien comme l’un des deux grands écrivains US contemporains du XXe siècle, avec Thomas Pynchon. L’interprétation est excellente , Penelope Cruz , à la beauté angélique ,romantique à souhaite nous séduit par son corps parfait . Sa fameuse superbe poitrine, objet de convoitise initiale, est ensuite touchée par la maladie, deux seins virginaux, qui deviennent des personnages centraux du film ( filmés sous tous les angles et photographiés en Noir & Blanc à l’ ancienne). Ben Kingsley est émouvant et nous entraine dans son dilemme, on plonge avec lui dans ce tourbillon infernal. La représentation de l’amour entre les deux amants est superbe, toute en pudeur , ne cherchant pas à masquer la différence de « beauté » entre les deux corps , tout en montrant bien le côté charnel et cru de la chose . On comprend pourquoi Kingsley n’ira pas au dîner de présentation avec les beaux parents de Consuela, et l’on pleure intérieurement avec lui. A noter aussi le très beau personnage joué par Patricia Clarkson, superbe interprétation, d’une femme d’âge mûre, libre et sans attache, la « US woman lib » type des temps modernes , touchante, mais fragile aussi . La mise en scène de Isabel Coixet est très sobre et très juste, très fidèle au livre. La photographie est très soignée. Une adaptation très réussie. Un régal.