L'histoire de réalisateurs qui ont voulu rendre hommage à la salle de projection cinématographique, lieu culte de la religion cinéphilique. Ce à l'occasion des 60 ans du festival de Cannes.
Le plus drôle, c'est de deviner les noms des cinéastes aux 3 premières minutes, sans connaître la liste avant bien sûr. Je suis vraiment fier d'en avoir trouvé 5 dès les 15 premières secondes, voilà, c'est dit ! Il faut préciser que les noms des réalisateurs ne sont révélés qu'au petit générique de fin de chaque court métrage.
Il y a 33 films quand même, donc inutile de dire que j'en ai oublié.
Dans l'ensemble, le niveau est quand même élevé, même si deux ou trois réalisateurs se sont inspirés des mêmes approches, il faut bien dire que la personnalité des auteurs crève l'écran, et c'est tant mieux, surtout sur des courts métrages.
Je ne vais pas faire la critique noms par noms, ce serait un peu long, et j'en ai déjà confondus, plutôt survoler par catégorie :
- Le meilleur, pour moi, c'est clairement Von Triers qui nous livre une parabole sur la victoire de l'exigence du cinéphile éclairé et talentueux face à l'américain beauf, fier de lui et plein de fric. C'est idiot, très marrant, rapide et parfait. Occupations.
- Les plus marrants :
Le Kitano bien sûr, simple, rapide, efficace. (One fine day)
Le Nanni Moretti sur une parodie amusée de la cinéphilie militante. (Diario di uno spettatore).
Irtebak d'Elia Suleiman, fidèle à son seul film qui a marché en France, avec cet humour discret presque entre Woody Allen et Tati.
Cinéma érotique de Roman Polanski, on l'attendait au tournant et il ne déçoit pas avec un mini scénario tendancieux à suspense.
- Les plus porteurs de sens :
At the suicide of the last Jew in the world in the last cinema in the world de David Cronenberg, un OVNI indiscutable et excellent.
The Lady bug de Jane Campion, où les aveugles ont droit de cité.
Where is my Romeo ? d'Abbas Kiarostami pour voir des femmes en voiles qui regardent des films d'avant quand les iraniennes ne portaient pas le voile. Vive le cinéma !
- Les plus émouvants :
Lelouch gagne la palme, avec un hommage à Cannes, au cinéma, à sa famille pied noir sans arrière pensée, juste du cœur, et c'est très beau dans Cinéma de boulevard.
Nanni Moretti sur le même thème que Lelouch. (Diario di uno spettatore).
Dans l'obscurité de Jean-Pierre et Luc Dardenne, avec Duquenne dans une bien belle composition.
Tous les films chinois, hommage à l'enfance et son émerveillement face à la magie de l'écran blanc.
Ming-Liang (It's a dream), Yimou (En regardant le film), ou Kaige. (Zhanxiou village).
Moins impressionnant, mais même combat et conclusion populaire en diable, Happy ending de Ken Loach.
Cinéma d'été de Raymond Depardon, hommage au cinéma des pays du tiers monde, qui a plus besoin que les autres de rêver, et qui en a bien moins !
- Les plus esthétiques :
Kar-Wai évidemment (I travelled 9 000 km to give it to you).
First kiss de Gus Van Sant, d'une maîtrise du décor étonnante, et d'un sujet bien fade quand on connaît les goûts du réalisateur. Peut-être ironique ? Ou peut-être une parabole pour montrer tout ce que le cinéma peut nous faire vivre sans que l'on en ait l'occasion ?
- Les plus déjantés :
Le Cimino, totalement incompréhensible, surtout de la part d'un des meilleurs réalisateur américain ? (No translation needed).
World cinema de Joel & Ethan Coen, étonnant, avec un Nolte pseudo cowboy pseudo homosexuel, et un projectionniste pseudo arabe en plein Arizona. Sorte de parodie des films indés dernier cri.
La Fonderie d'Aki Kaürismaki, hommage aux Leningrad Cowboys, toujours aussi incompréhensible.
A 8944 de Cannes de Walter Salles, ironie cinglante aux bobos de tous bords qui pensent que le cinéma ne vaut que pour les pays qui peuvent le subventionner.
- Les plus agaçants :
Chahine, qui fait la même chose que Lelouch, mais uniquement avec son ego en oubliant tout le reste, l'humour n'étant pas suffisant. (47 ans après).
Amos Gitaï, avec son partisanisme latent, comme si les salles de cinéma israéliennes avaient le monopole des bombardements. Et comme si la salle de cinéma, seul rempart contre les emmerdements ambiants, étaient destinés à protéger des roquettes palestiniennes. Ce n'est pas parce que le septième art existe que les israéliens meurent sous les bombes, c'est parce que 3 fois plus de palestiniens meurent chaque année sous les armes israéliennes, bref, un problème politique et même racial, (quand on voit le Chahine, seuls films polémiques de cet hommage aux salles de cinéma) dont le cinéma n'a que faire, et qui n'a aucune place dans la culture des civilisations occidentales qui ont construit leur paix depuis bien longtemps sans doute dans un esprit bien différent. (Le Dibbouk de Haïfa).
Recrudescence d'Assayas, quand on veut donner un message sur la déliquescence des couples mixtes ou de la fraterie musulmane en France, on travaille un peu moins couvert, et on a le courage de ces opinions ou on se fait plus compréhensible.