Pour son cinquième long-métrage, le réalisateur sud-coréen Bong Joon-ho s’aventure dans la science-fiction post-apocalyptique en adaptant la bande-dessinée française Le Transperceneige (1982).
En 2004, le cinéaste découvre l’existence, à Séoul, de la bande-dessinée de Jacques Lob et Jean-Marc Rochette. Captivé par les trois albums, il soumet la proposition d’une adaptation cinématographique à ses producteurs, qui sont convaincus. En 2006, grâce au succès du troisième film de Joon-ho, The Host, les droits d’adaptation de l’œuvre sont acquis. Mais le projet prend du retard en raison du tournage de Mother (2009), mais en janvier 2010, l’écriture du scénario peut commencer. Joon-ho fait le choix de s’inspirer de la bande-dessinée mais sans en retranscrire fidèlement l’intrigue, en réécrivant un scénario qu’il juge plus adapté pour le cinéma. Ce travail s’achève en décembre et le tournage commence l’année suivante, en 2011. Après une hésitation entre la République Tchèque et la Hongrie, c’est bien le premier pays qui est choisi, principalement en raison des Studios Barrandov de Prague, qui sont les plus longs d’Europe et qui facilitent donc le tournage des scènes dans les décors d’un train aussi étendu. Des prises ont également été faites en Autriche, dans le Tyrol, pour filmer quelques sommets enneigés.
Bien que convaincu dans son projet, le cinéaste sud-coréen a été contraint de défier une stricte limite de temps, avec une courte durée de tournage de 72 jours. Un autre défi a résidé dans la diversité culturelle de l’équipe de production, mêlant les nationalités tchèque et sud-coréenne, chacune ayant ses habitudes de travail. Ce pluralisme et la dimension internationale du film ont d’ailleurs entrainé le réalisateur à tourner Snowpiercer quasiment intégralement en anglais (85 %), alors que sa langue maternelle et habituelle dans ses précédentes œuvres est le coréen. Mais en 2013, le film est enfin finalisé, avec un budget de près de 40 millions de dollars, une somme modeste aux Etats-Unis mais très importante en Corée du Sud, faisant de Snowpiercer l’une de ses productions les plus coûteuses. Toutefois, cet effort financier n’empêche pas un résultat décevant.
Malgré des effets spéciaux réussis et de somptueux décors enneigés, dont le cadre urbain rappelle l’apocalypse glaciaire du Jour d’après (2004), Snowpiercer marque surtout par son absurdité. Cette Arche de Noé ferroviaire semble être surtout le fruit du fantasme d’un vieux milliardaire à tendance pédophile et de sa bande de fanatiques écervelés composée d’une Première Ministre instable, d’une maîtresse d’école fantasque et d’une assistante au manteau jaune dont la seule compétence se résume à manier un mètre ruban. Et je ne parle pas de l’intérêt d’avoir des gardes non-armés, de la suprématie d’un groupe inexpérimenté armé de torches sur des soldats très bien équipés, d’une trahison venant d’un personnage si peu développé que son acte n’a aucune portée émotionnelle, ou encore, d’une profondeur psychologique inexistante lors d’une pseudo-confidence de la part du personnage principal, quelques instants avant de rencontrer son pire ennemi. Malgré une scène divertissante et bien rythmée dans une classe d’école, le reste n’est qu’une succession d’affrontements hyperviolents, de personnages ridicules, de clichés de lutte des classes et de scènes à l’émotion ratée, faisant de Snowpiercer un film digne des nanars de série B.
Néanmoins, le film a su convaincre au box-office. En France, il cumule près de 700 000 entrées et devient le plus gros succès sud-coréen du pays. En Corée du Sud, les recettes globales s’élèvent à hauteur d’environ 55 millions de dollars et dépassent le budget de production, consacrant une réception très favorable auprès du public.