La Maison : les secrets du tournage

Sergi Lopez a participé à tous les films de Manuel Poirier depuis leur tout premier La Petite Amie d'Antonio, à l'exception logique d'un documentaire intitulé De la lumière quand même qui donnait la parole à des enfants placés en foyer ou en famille d'accueil, et d'un téléfilm intitulé Le sang des fraises. La Maison est donc le neuvième film sur lequel Sergi Lopez et Manuel Poirier collaborent. Le réalisateur s'explique : "La question n'est pas de changer ou non d'acteur d'un film à l'autre, mais : Où est-ce que je peux aller plus loin, de quelle manière, avec qui ? J'aime les prises de risques sur un jeu qui ne soit pas calé, sur le rapport à l'instant, et il [Sergi Lopez] les accepte sans avoir peur de ses propres émotions."

La Maison marque la deuxième collaboration entre Cécile Rebboah et Manuel Poirier. La jeune actrice avait en effet le premier rôle d'un téléfilm que le réalisateur avait fait pour France 3 intitulé Le sang des fraises : "Cécile Rebboah, pleine de spontanéité et de générosité (...) c'était un plaisir de l'imaginer dans le rôle de Nathalie, la copine de Rémi." commente Manuel Poirier.

Tous les autres comédiens de La Maison, Bruno Salomone, Barbara Schulz, et Bérénice Bejo sont nouveaux dans l'univers de Manuel Poirier. Plus habitués au comédies grand public qu'au cinéma d'auteur, ces acteurs ont retenu l'attention du réalisateur, il commente : "Je construis mes castings de façon très instinctive (...) Bruno Salomone , on s'est rencontrés, on a pris l'apéro, et finalement on a discuté toute la soirée... Il était tellement chaleureux, simple, et amical que je l'ai imaginé dans le rôle de Rémi. Et avec Sergi, c'est une vraie rencontre, autant dans la vie que dans le rapport au travail. Pour le rôle de Cloé, je trouvais que Bérénice Bejo entretenait un rapport fort à l'enfance, peut-être parce qu'elle ne fait pas son âge. Avec Barbara Schulz, la rencontre a été émouvante, je la voyais bien exprimer le dilemme de Laura. J'aimais le mélange de force et de fragilité qui se dégageait d'elle...

La maison du film se situe dans Le Perche, un petit coin de France entre la Normandie et la Beauce à 150 km de Paris. "Je ne cherchais pas un lieu incroyable, perdu au fin fond de la France, mais une maison comme on peut en découvrir par hasard, au retour d'un week-end. Le Perche dépourvu d'accès routiers directs m'a tout de suite attiré. Les maisons y sont un peu intemporelles, on est en France mais on ne sait pas trop où, ni quand. Ce qui convenait bien à l'esprit du film." explique Manuel Poirier. Cet aspect intemporel permet également de faire de la maison le "personnage" principal, au centre d'une histoire universelle.

La maison fonctionne réellement comme si elle était le "personnage" principal du film en ce sens que toutes les rencontres tournent autour d'elle et qu'elle représente les différentes aspirations des personnages. "une maison peut symboliser autant les souvenirs, l'enfance, la famille, que le devenir. C'est un point d'ancrage qui nous renvoie à ce que nous sommes, à notre vie. Et que l'on soit enfant ou adulte, c'est un repère émotionnel, affectif et sentimental... (...) J'ai voulu imaginer la rencontre entre Malo, et une maison à vendre. Entrer dans une maison, c'est entrer dans l'histoire de quelqu'un." explique Manuel Poirier. Pour Malo elle symbolise un point d'ancrage qu'il n'a jamais eu, pour Rémi l'envie de construire un famille, et pour les deux soeurs, Cloé et Laura, elle symbolise une enfance heureuse.

Lhasa De Sela, chanteuse américano-mexicaine vivant au Québec, signe la bande-originale de La Maison. Son premier album La llorona, entièrement en espagnol, s'est vendu à plus de 400 000 exemplaires en France et au Canada. Dans le film, la musique que Malo écoute dans son appartement est tirée de son deuxième album, The Living Road qu'elle a composé à Marseille. "Sa voix est très belle et sa musique est authentique. Je pense qu'on a des sensations très proches liées à l'errance, aux lieux et à l'enfance. J'ai pensé à elle comme une évidence et j'ai été très heureux qu'elle accepte de composer pour le film avec son arrangeur Jean Massicote. Je lui ai demandé de composer des thèmes en suivant son instinct et sans se soucier de leurs durées et de leurs emplacements, parce que pour moi la musique aussi se met en scène." commente le réalisateur.

L'équipe du film La Maison semble être liée, consciemment ou non aux origines du réalisateur. En effet, Manuel Poirier, né au Pérou, suit ses parents en France à l'adolescence. Le choix de Bérénice Bejo, Sergi Lopez et Lhasa De Sela ne peut pas y être complètement étranger. Il explique lui même la deuxième raison pour laquelle il a choisi Bérénice Bejo : "(...) liée à mes failles personnelles : Elle est née en Amérique du Sud, comme moi. J'y ai vu un signe...". En 1992 Il avait déjà choisi Sergi Lopez pour son accent espagnol dans la La Petite Amie d'Antonio , une amitié qui dure depuis quinze ans. Quant au choix de Lhasa De Sela, ses origines mexicaines, ses mélodies en espagnol, la reliaient directement au personnage de Sergi Lopez : "Pendant l'écriture du scénario, j'ai beaucoup écouté les chansons de Lhasa que j'ai associées naturellement au personnage de Malo."