Réalisé par W.R. Fassbinder pour la télévision, « Le Monde sur le Fil » semble autant un film méconnu qu’il pourrait bien avoir référencé des films comme « Matrix » ou « Inception ». Avec un sujet totalement métaphysique qu’est celui d’une vie artificielle dans un futur indéterminé, saigné par l’industrie, le film suis le professeur Stiller, détenant les clés d’un projet pharaonique, qui est en proie à des phénomènes étranges, des hallucinations en passant par la paranoïa.
Admettant -comme il semble tant aimer le faire, à son image une structure quasiment géométrique, Fassbinder arrive particulièrement vite à créer une ambiance des plus alléchantes, soumettant les acteurs à des formes. Comme cette image incroyable en plan serré, quand le visage du protagoniste est à moitié caché par des bandes qui semblent découper l’image, des bandes qui ne sont que des simples stores. Cette composition règne sur tout le film, avec une ambiance folle comme celle d’une course poursuite. Plus on observe Fassbinder, plus on se rend compte que la composition de chacun de ses plans est architecturale, entre les ombres et les reflets très nombreux, le réalisateur semblant particulièrement aimer cet effet si particulier.
Amenant ainsi un coté plutôt ludique, l’atmosphère inquiétante et cloisonnée dans laquelle vit le film demeure aussi harmonieuse que habile. Fassbinder semble quasiment comme son personnage, comme si lui même doutait de la réalité, et plus « Un Monde sur le Fil » avance, plus il est opaque, de moins en moi maitrisé, quasiment sur-joué, sur-écrit. Il en devient lourd à force de faire le plein d’essence. Mais il s’agit bel et bien d’un tracé psychologique, car en prenant cette voie, Fassbinder, relève d’avantage la paranoïa du héros.
Mais outre cette facette quasiment onirique, le film, en terme de mise en scène, est incroyablement réaliste, décalant ainsi les émotions et faisant prendre au contexte de cette histoire une dimension bizarroïde et paradoxale. Et il y a un instant où, la perception de la réalité est tellement vague, que l’on se demande si les Wachowski ne citent pas le film dans « Matrix ».
Un téléfilm des plus surprenants, à découvrir et redécouvrir, plus de trois heures esthétiques et hors du commun, partagées entre l’ennui et l’émerveillement. Une œuvre de science fiction quasi hallucinante, même si on pourrait reprocher à Fassbinder le faite que son emprise sur le sujet ne soit assez forte…