Le bonnet rouge de Steve Zissou dans La Vie Aquatique laisse sa place à une cagoule noire dans Mister Fox. Mais celui qui la porte ici n'est pas si éloigné que ça de Bill Murray dans le premier film, c'est à peu près le même personnage ( en plus poilu bien sûr ), soit l'homme et le père qui n'en fait qu'à sa tête et qui va peu à peu s'ouvrir aux siens. On retrouve donc bon nombre de thématiques et de récurrences de son auteur dans Mister Fox. Normal après tout, c'est la marque des grands. Le changement principal intervient au niveau formel, c'est une manière pour le cinéaste américain de se renouveler sans toutefois trahir ses obsessions personnelles ( la famille, la place de l'individu au sein du groupe ). Et la particularité d'une telle évolution, soit le passage d'un cinéma en chair et en os à de l'animation, a une conséquence sur la mise en scène du réalisateur. Ce que tout habitué de son cinéma remarquera, c'est le passage d'un rythme posé, de cadres fixes, à un rythme beaucoup plus trépidant et punchy. Le scénario doit y être pour beaucoup aussi, puisque les péripéties ne s'arrêtent jamais. Très peu de place pour le repos dans le film, tout va à cent à l'heure, comme si le train du Darjeeling Limited s'était transformé en TGV finalement. La mise en scène , donc, favorise le mouvement, semble se calquer sur le rythme effréné de l'intrigue. Beaucoup d'accélérations, de travellings secs, un montage brusque qui ne laissent aucun répit au spectateur. C'est peut-être un défaut du film - le seul probablement -, il offre trop de choses pour qu'on puisse avoir le temps de tout digérer.
Malgré le caractère inégal de son oeuvre ( les Tenenbaum et la Vie Aquatique surpassent aisément ses deux derniers ), on ne peut rester insensible au parfum particulier qui se dégage de chaque film de Wes Anderson. Si la mélancolie des débuts ne peut être ici retranscrite à cause du rythme, il y a toujours chez le cinéaste américain décalage et poésie, beauté de l'émotion pure et nostalgie
( la mort du Rat est un moment poignant, tout comme la scène du loup ).
J'ajouterais aussi la scène où le fils a enfin une chance de briller, lui qui a toujours été délaissé parce qu'il n'était capable de rien. L'ironie, c'est qu'il apporte son aide grâce à ce qui a priori constitue un défaut ( " You know why ? 'cause I'm little ! " ). Mais sa taille n'est pas un défaut, il suffit simplement de faire avec ce qu'on a.
Wes Anderson touche toujours parce que même si l'histoire nous importe moins, son style est bel et bien présent, et surtout il est unique. La marque de fabrique de Mister Fox est un sifflement. Celle de Wes Anderson sont des films totalement décalés et au charme dont la discrétion fait tout dans le ravage qu'il provoque chez le spectateur.