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Plume231
3 884 abonnés
4 639 critiques
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2,0
Publiée le 22 décembre 2014
Le film préfigure "Breakfast at Tiffany's". Une femme qui se veut vénale et est donc entretenue par un vieux riche mais qui bien malgré elle va se laisser piéger par un amour sincère et sans les dollars, difficile de ne pas penser à Holly Golightly incarnée par la divine Audrey Hepburn ; même si ici la protagoniste est beaucoup moins naïve. Dans ce rôle, Sophia Loren est d'une grande justesse et porte énormément du film sur ses épaules. Et si on peut regretter un partenaire masculin principal fadasse, à savoir Tab Hunter, les autres acteurs rattrapent heureusement le coup niveau charisme avec les présences de Jack Warden, de Keenan Wynn et bien évidemment du grand George Sanders. Ce que l'on peut regretter par contre c'est un scénario prévisible de bout en bout, et puis un Sidney Lumet qui n'arrive pas à injecter une once de personnalité pour un sujet pas franchement, pour ne pas dire pas du tout, habituel pour lui. "Une Espèce de garce" est un film à voir surtout pour les fans de Sophia Loren.
Après le succès énorme de « Douze hommes en colère », Sidney Lumet est un réalisateur recherché. A la même époque, Sophia Loren est installée à Hollywood pour honorer un contrat de cinq films avec Paramount. Alors qu’elle vient de faire sensation au côté de Cary Grant dans « La Péniche du bonheur » (Melville Shavelson en 1958), elle exprime son souhait de travailler sous la direction de Sidney Lumet qui de son côté apprécie la spontanéité qui se dégage du jeu de l’actrice italienne. Ce sera donc « Une espèce de garce » écrit par Walter Bernstein scénariste blacklisté imposé par Lumet. Le film sera entièrement tourné à New York, ville chère au réalisateur. L’intrigue s’articule autour d’une romance entre une aventurière (Sophia Loren) accompagnée de son amie (Barbara Nichols) et un jeune militaire qui avec son copain voyagent en train vers New York pour une permission de dix jours avant d’embarquer pour l’Europe, les États-Unis venant de s’engager dans le conflit mondial. La jeune femme très sophistiquée est de son côté en route pour retrouver son riche amant (George Sanders). Tab Hunter qui interprète le jeune militaire un peu naïf ayant décidé en un quart de seconde avoir trouvé la femme de sa vie, est connu de Lumet qui l’a auparavant dirigé dans un téléfilm. Jack Warden très solide second rôle du cinéma américain des années 1950 à 1990 qui interprète le camarade un peu plus expérimenté sera dirigé à cinq reprises par Lumet. Véhicule pour Sophia Loren dont le mari Carlo Ponti est inclus dans l’équipe de production, le film tient un peu du conte de fée tant la jeune aventurière est présentée comme viscéralement attachée aux avantages que lui procure une beauté dont elle sait user à merveille. À ce propos on peut souligner, le travail réalisé par Lumet qui parvient avec brio à départir la pulpeuse Sophia Loren de sa nature volcanique pour lui conférer un charme hollywoodien la plaçant d’emblée sur le terrain de jeu d’une Marylin Monroe alors star absolue mais dont les problèmes personnels entravent déjà grandement sa carrière. Lumet sans doute conscient de la tonalité trop doucereuse vers laquelle pourrait l’emmener le scénario, entre en conflit avec Carlo Ponti et les autres producteurs, voulant donner un semblant de véracité au propos par la mise en avant du caractère vénal des deux femmes et consécutivement la difficulté morale qui se présente à elles quant à l’orientation qu’elles souhaitent donner à leur vie. Le réalisateur a donc demandé à Sophia Loren une interprétation plus introspective et nuancée pour rendre crédible les hésitations douloureuses qui assaillent la jeune femme. Ce choix dont La Paramount craignait sans doute qu’il nuise à l’image glamour de leur nouvelle recrue a contribué à montrer que Miss Loren avait d’autres atouts à faire valoir que sa plastique. Le film qui par le choix de Lumet a sans doute trop affiché ses paradoxes n’a pas été un franc succès public. Il a néanmoins été sélectionné pour le Festival de Berlin 1959. On notera la courte prestation d’un George Sanders qui s’il n’affiche plus la superbe de ses plus belles années quand il jouait pour Joseph L. Mankiewicz (« L’aventure de Madame Muir », « Eve ») ou Albert Lewin (« The Moon and Sixpence », « Le Portrait de Dorian Gray ») donne encore très bien le change en vieux séducteur revenu de tout. Un film qui ne figure certes pas dans les pièces majeures de la filmographie de Lumet mais qui montre bien la détermination de l’encore jeune réalisateur de ne pas s’en laisser conter.
La mise en en scène remarquable de Sydney Lumet et la belle photographie en noir et blanc de Boris Kaufman donnent une touche particulière à ce film, qui n'est pas toute à fait une histoire d'amour et qui n'est pas aussi banal qu'on veuille bien le dire. Le cast est excellent, in primis une très très belle Sophia Loren au début de sa carrière à Hollywood. Manifestement Loren s'identifie sans peine à ce personnage de femme à forte personnalité qui, dans le bien et dans le mal, cherche à s'imposer à tout prix dans un contexte qui n'épargne pas les plus faibles. Mais le bien vaincra, ce qui ne pourra que réjouir les fans de la belle actrice italienne.