L’Enfer est un des premiers longs métrages de l’histoire du cinéma, et il s’agit donc d’une adaptation de Dante, lequel se prêtait bien, en effet, au style « tableau » typique des films pionniers du cinéma. Le résultat reste mitigé.
En effet, il n’y a pas réellement d’histoire en fait. On assiste à ce que L’Enfer semblait devoir être sur le papier : c’est-à-dire une succession de visions de l’enfer, où l’on voit les pécheurs torturés et maltraités. Sur le fond, le propos reste donc très restreint, et on assiste davantage à ce qui pourrait ressembler à l’assemblage de courts métrages sur un même thème. Même si le métrage est court, et même si finalement adapter L’Enfer de Dante semblait devoir inéluctablement conduire à un tel film, c’est assez frustrant de ne pas avoir beaucoup d’épaisseur. Dans ce contexte, le casting ne joue pas de rôle spécifique, les interprètes étant vu à distance, et ne faisant pas grand-chose, si ce n’est errer dans l’image.
Ce qui retient l’attention surtout dans L’Enfer, c’est le travail visuel. Pour tout dire, on sent qu’on est davantage sur un film expérimental, un film qui tente des choses sur la forme, et qui utilise pour cela un fond littéraire mais de façon prétexte. Visuellement, c’est vrai que L’Enfer est un film marquant. Les décors sont réussis, il y a quelques effets visuels d’un bel effet, mais surtout, ce qui est frappant, c’est la représentation des tortures. Parfois violentes (la tête coupée qui parle), elles ont surtout un côté graphique très réussi de par la nudité des protagonistes, la gestuelle accentuée qui n’est pas sans rappeler certaines toiles de la Renaissance, et il faut avouer que ça retient l’attention. Même si la réalisation est placide, avec la construction typique du temps en tableaux qui se succèdent devant une caméra fixe, L’Enfer est un film qui parvient, en bon pionnier, à imposer le cinéma comme un art de l’image.
Honnêtement, malgré les belles qualités formelles, L’Enfer reste avant tout une curiosité. L’absence de vraie histoire, le jeu quasi-inexploité des interprètes, la mise en scène tout à fait basique, cela ne permet pas à ce film, en dépit de ses décors réussis, de ses scènes iconiques et de son caractère pionnier de s’imposer véritablement. Mais c’est à découvrir dès lors qu’on s’intéresse à la genèse du cinéma. Il y a des moments qui resteront longtemps ancrés dans la tête. 2.5