Pendant les longs moments d'ennui que j'ai traversés dans la première moitié du film, je me demandais ce qui faisait qu'on entre ou non dans un film, et combien les premières minutes sont déterminantes pour se faire une opinion. Est-ce le scénario, les dialogues, le jeu d'acteur ? Concernant "Un Château en Espagne", je n'avais que le choix de l'embarras, puisqu'il s'agissait d'un peu de tout ça.
Première scène : pique-nique champêtre d'une tribu espagnole en France avec, forcément, corrida pour les garçons, foot pour les hommes, et guitare flamenco pour tout le monde. Puis quelques scènes d'exposition pour comprendre la situation : Maxime souffre du deuil impossible du père et d'une mère absente, et a trouvé une famille de substitution chez ses ibériques voisins. Ajoutons à cela des dialogues qui sonne ultra-faux, et un jeu tout en cabotinage des deux garçons qui occupent l'écran les 75% du temps. La mise en scène ne relève pas l'ensemble, se limitant à un abus de la faible profondeur de champ et à des travelings latéraux en va-et-vient fatigants.
Déception donc par rapport à l'attente que je pouvais avoir suite au premier film plutôt réussi d'Isabelle Doval, "Rire et Châtiment", même si je commençais à me faire la remarque que les reproches que je peux faire à "Un Château en Espagne" (personnages outranciers, situations caricaturales, enfilage de clichés) étaient en germe dans le film précédent, simplement dissimulés sous l'abattage de José Garcia (Son imitation de Joe Dassin ou son histoire de l'ours bleu du Canada, ce n'était pas du Lubitsch, mais qu'est-ce qu'on se marrait !).
Et puis, imperceptiblement, les défauts s'estompent, à moins qu'on s'y habitue, et certaines scènes retrouvent l'efficacité de "Rire et Châtiment", comme la leçon de morale d'Emma qui s'emberlificote dans la dénomination des habitants du Burkina, ou la discussion de la même Emma avec les parents d'Esteban qui se termine en plaidoirie avec effets de manches et trémolos sous leurs yeux hallucinés. Le petit complot de Maxime donne enfin du rythme au récit, et la fin rompt avec les clichés, tant sur la forme que sur le fond. Oeuvre mineure digne d'un téléfilm de TF1, "Un Château en Espagne" se rachète tardivement en laissant entrevoir la comédie légèrement décalée qu'elle aurait pu être.
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