Un grand moment d'émotion et de pudeur pour ce film de Florian Henckel von Donnersmarck.
Sur un sujet dérangeant, la dictature de l'Allemagne de l'Est transposée en 1984, le metteur en scène nous livre un film d'espionnage, teinté de thriller, d'une romance puissante, jouant sur les oppositions des personnages, des décors, des couleurs, de l'opulence des uns à la misère des autres, de l'hypocrisie au suicide .... Lent, sombre et sans échappatoire pour retranscrire une page de l'histoire dramatique de ce pays.
Un genre huis-clos, où tout se passe le plus souvent dans des espaces fermés et peu peuplé qui confirme la paranoïa règnante alors : ou n'importe quel dialogue se passe à voix basse , ou l'on cache une machine à écrire et ou la moindre blague peut être fatale.
Et ces deux opposés : la Stasi par le biais de l'agent Wiesler aka (Ulrich Mühe) et deux artistes : Georg Dryman (Sebastian Koch) et Christa Mari (Martina Gedeck), emblêmes de la pensée libre...
Ils sont mis sous surveillance pour des raisons obscures.
Wiesler, méthodique et invisible ; dès les premiers plans on saisit le caractère implacable de cet agent et le mode de fonctionnement de la dictature, par une description détaillée et une ambiance lourde. Le cours qu'il délivre sur les bienfaits de la torture mettent dans l'ambiance directement. La manipulation psychologique, plus qu'efficace pour mater les esprits rebelles - voire ceux qui n'ont rien à se reprocher -.
Ecoutes, bandes sons, rapports, les vies privées sont disséquées. Mais, si le poète Georg est surveillé, cela n'impliquera que son travail, même si par la suite lui aussi devra choisir. Il en va tout autrement pour Christa, celle-ci n'ayant d'autre alternative à sa survie que celle de se plier aux demandes perverses d'un ministre, pour finalement faire son choix par un ultime message de liberté.
L'écoute, associée au voyeurisme, contrôle insidieux du pouvoir, trouvera son pendant avec le caractère même de l'agent qui croit sincèrement dans l’idéal socialiste, toute sa vie en est un miroir, le fonctionnaire remplit le vide de sa vie personnelle et affective par son travail.
Les décors ternes et froids, les bureaux vides, le masque impassible de Wiesler sont en opposition à Christa, à la beauté tragique, expansive, sensible et aimante... Un appartement rempli de livres et de connaissance, de couleurs chaudes et de son amour pour Georg, comme un pied de nez.
Et, au fil du temps et de son intrusion dans la vie de Georg et Christa, Wiesler se révèlera et découvrira l'émotion procurée par la lecture, la beauté de la musique et le sentiment d'amour pour son propre sauvetage...
Ce magnifique final où Wiesler déambule dans la rue, dehors, est un message plein d'optimisme à trouver sa propre pensée, d'être en accord avec sa conscience pour le pire ou le meilleur, mais pour la liberté. Obtenir son individualité et par là même son humanité.
Un film à voir ou à revoir.