Le réalisateur algérien Nadir Moknèche résume Délice Paloma : "Mon film brosse le portrait d'un "petit peuple" qui, pour s'en sortir, imite des comportements qui ne sont pas les siens. C'est l'histoire d'une femme en quête d'ascension sociale dans un pays en pleine mutation. Zineb Agha, alias Madame Aldjéria, part avec quelques handicaps : c'est une femme seule, dans la cinquantaine, d'origine modeste, un fils issu d'un père inconnu... Pour survivre, elle a forcément fait un peu de tout, jusqu'à vendre "un peu d'amour pour alléger la solitude de certains hommes." Comment vivre, s'en sortir, dans un univers de combines, de bouts de ficelles, un pays de passe-droits et de pots-de-vins ?"
Biyouna, l'actrice principale de Délice Paloma, est une véritable icône populaire en Algérie. Née dans le quartier populaire de Belcourt au sein d'une famille citadine d'Alger, elle est danseuse dans les années 60, dans des orchestres féminins et dans de prestigieux cabarets de l'époque. En 1972, à l'âge de 19 ans, elle décroche par hasard un petit rôle dans le cultissime feuilleton télévisé El-Harrik. Le succès du programme est immense, en grande partie grâce à la gouaille de Fatma, le personnage que la jeune Biyouna interprète avec un naturel alors encore inédit sur les écrans algériens. Biyouna devient alors une icône populaire, plus célèbre que sa soeur, la chanteuse Faïza. Elle devra attendre 1999, avec le film Le Harem de Mme Osmane de Nadir Moknèche, pour obtenir un rôle dans un registre autre que comique, son personnage de Fatma lui collant à la peau de nombreuses années et la cantonnant dans le registre du rire.
Délice Paloma permet au réalisateur Nadir Moknèche de poursuivre sa fidèle collaboration avec Biyouna, véritable icône populaire en Algérie. Le cinéaste l'avait déjà dirigé dans ses deux premiers films, Le Harem de Mme Osmane (2000) et Viva Laldjérie (2004).
C'est la perspective de retrouver Biyouna qui a donné à Nadir Moknèche l'envie de réaliser Délice Paloma. Le cinéaste explique : "J'avais le désir de propulser une fois de plus Biyouna dans l'univers urbain d'Alger. On se fréquente depuis 1999, on a fait deux films ensemble, c'est dire qu'on se connaît bien. Dans la vie, Biyouna est une véritable icône populaire, qui garde le courage et l'irrévérence de ses débuts. Elle m'a fait découvrir et même plonger dans le milieu interlope d'Alger. (...) Durant les répétitions, Biyouna a imprimé de sa personnalité, de sa nature, de son tempérament, le rôle d'Aldjéria, et lui a donné l'humour cruel et réaliste du petit peuple d'Alger."
Délice Paloma est un film dont l'action se déroule en Algérie, dont l'histoire évoque le peuple algérien, mais qui est financé en France. Le réalisateur Nadir Moknèche s'exprime sur cette "double" nationalité : "L'ironie du sort, c'est qu'après les indépendances des pays du Maghreb, Paris est devenu leur capitale culturelle. Pas seulement dans la production cinématographique, mais aussi dans l'édition, la recherche... Mes films me ressemblent, et ressemblent à beaucoup d'entre nous qui sont le fruit de cette histoire ranco-algérienne, histoire douloureuse certes, mais c'est notre histoire. Quand tu es à Alger et que tu vas dans une boulangerie pour acheter une baguette ou un mille-feuille, tu ne te poses pas la question de savoir si c'est français ou algérien. Il ne faudrait pas qu'un jour, on veuille arracher les figuiers parce qu'ils auraient été introduits par les phéniciens."