Ne te retourne pas a été présenté en Sélection officielle au 62e Festival de Cannes, en séance de minuit.
Au départ, Marina De Van n'avait aucune actrice à l'esprit, le visage de Jeanne lui évoquait "plutôt des images assez abstraites et plastiques, des tableaux de Bacon, des effets de vitesse... Je pensais beaucoup à ces profils d'immeubles que l'on a détruits pour les reconstruire, où l'on voit encore le papier peint, l'emplacement des meubles, et aussi les échafaudages... Les vestiges du vieux et le début du neuf..." Concernant le casting, elle note : "Outre d'excellentes comédiennes, il me fallait ici un équilibre parfait dans la beauté, pour éviter tout malentendu sur l'angoisse de Jeanne – cela ne devait pas être l'histoire d'une femme belle qui devient laide". Au moment de leur proposer le rôle, le producteur du film a envoyé à Sophie Marceau et Monica Bellucci non seulement le scénario, mais aussi un DVD de Dans ma peau. "C'était important pour moi qu'elles voient mon premier film, qui n'était pas glamour, pour qu'il n'y ait pas de malentendu", explique la cinéaste.
Ne te retourne pas est le deuxième long métrage de Marina De Van, sept ans après le très remarqué Dans ma peau. Entre ces deux films, elle a poursuivi son activité de comédienne (Je pense à vous de Pascal Bonitzer, dont elle fut aussi coscénariste, La Clef) et réalisé un court métrage (La Promenade, 2007).
La réalisatrice fait le lien entre Ne te retourne pas et son premier long métrage, Dans ma peau : "Les deux films mettent en scène un personnage angoissé dans son rapport à lui-même, comme à un objet non identifié. Qu'est-ce qui est moi ? Qu'est-ce qui est autre, étranger à moi ? Qu'est-ce qui fait la limite entre moi et les autres ? Et à travers cela, qu'est-ce qui est réel, qu'est-ce qui est vrai ? Dans Dans ma peau, le personnage faisait l'expérience de ces questions par le biais de l'automutilation, de la confrontation à son corps. Dans Ne te retourne pas, j'avais envie d'aborder cette angoisse de manière plus large et plus accessible – plus violente aussi. On peut toujours regarder son corps un peu en retrait. Avec l'altération du visage, on n'a aucun point d'extériorité possible, juste ce cauchemar de voir son visage - ou celui de ceux qu'on aime - s'altérer."
Marina De Van a beaucoup joué sur les différences de rythme entre Sophie Marceau et Monica Bellucci : "Sophie est très mobile, elle joue beaucoup avec son corps, ses mouvements sont rapides, nerveux. C'est très difficile d'attraper son regard, son visage. Elle est toujours en course, fuyante, comme une nature inquiète, un peu farouche ou très pudique, dont je me sens très proche. Monica, elle, est très différente, plus hiératique, très offerte. Elle joue de façon très minimale, moins réaliste, et elle s'appuie d'abord sur ses yeux (...) Son visage immobile évoque une Joconde, une énigme qui m'était un atout précieux pour le mystère du personnage dans la partie italienne du film (...) Pour des raisons de planning, on a commencé par tourner les scènes avec Monica. C'était un peu une galère de faire jouer Monica sans savoir ce qu'allait faire Sophie ! D'autant plus que Monica jouait le personnage de Sophie plus tard. Du coup, je me suis retrouvée à diriger Monica en essayant d'imaginer le jeu de Sophie ! (...) Globalement, j'ai demandé à Sophie de ralentir beaucoup dans les vingt dernières minutes où elle est là (...) Il fallait travailler à adoucir la transition entre la pile électrique et la Madone !"
La transformation est progressive, ce qui donne à l'écran des scènes étonnantes, où les visages des deux actrices se confondent. La réalisatrice parle de l'importance de ces séquences : "La métamorphose s'incarne dans des étapes à la fois belles et un peu monstrueuses où le visage comporte un peu de chacun – un peu de Monica, et un peu de Sophie pour le personnage féminin. Le visage est au début presque animal dans sa dissymétrie, sa bizarrerie, alors qu'il est la réunion de deux visages harmonieux et superbes. Cette " disgrâce " passagère était très importante pour moi, car elle évoque la souffrance d'être enfermé en soi, dans un visage qui nous échappe." Le travail sur les effets spéciaux a nécessité plus de dix mois de travail.
Dans un premier temps, la réalisatrice avait envisagé de confier les rôles principaux à Emmanuelle Devos et Béatrice Dalle. Et à l'origine, le film avait pour titre Autrement...
Dans son court métrage Alias, Marina De Van évoquait déjà une substitution d'identité, cette fois entre une femme de ménage et une adolescente.
Dans sa vie de comédienne, Sophie Marceau est déjà devenue Monica Bellucci... ou presque. C'est en effet la première qui devait initialement jouer le rôle principal du Concile de pierre... mais elle a finalement été remplacée par la deuxième. Ajoutons pour l'anecdote que le réalisateur du film, Guillaume Nicloux, a donné un petit rôle à... Marina De Van dans son film suivant, La Clef !
Le rôle du psy est interprété par le frère de la réalisatrice, Adrien de Van, comédien qui jouait un interne dans Dans ma peau, et qui fut l'un des partenaires de l'actrice-réalisatrice dans Sitcom de François Ozon, avec lequel Marina De Van a longtemps collaboré.
Pascal Bonitzer fait une apparition, dans le rôle d'un des membres du cercle de jeu.
Nicolas Roeg a réalisé en 1974 un film fantastique, dont l'action se situait en partie en Italie, intitulé Ne vous retournez pas.