Sandra Hüller a décroché pour ce rôle l'Ours d'Argent de la Meilleure actrice au 56e Festival de Berlin. Le jury était présidé par Charlotte Rampling.
"Requiem est avant tout l'étude psychologique d'une jeune fille au coeur d'une situation extrême. Aujourd'hui, tout le monde est convaincu que l'exorcisme n'est pas la meilleure méthode pour soigner les malades mentaux. La situation limite de Michaela me fascinait : voilà une jeune fille entourée de sa famille, de ses amis et de tous ceux qui cherchent à lui venir en aide. Mais sa maladie l'a tellement coupée de ses proches qu'unrapprochement semble désormais impossible.”
Requiem est le cinquième long métrage de Hans-Christian Schmid, cinéaste né en Bavière en 1955. Après plusieurs documentaires (l'un portant sur les accros au jeu), il signe en 1995 son premier long métrage, Dans la forêt vierge après cinq heures, avec Franka Potente. Primé à Berlin en 2003, son précédent long métrage, Au loin, les lumières, avait déjà bénéficié d'une sortie française en 2004. Cette année, il fonde sa maison de production, 2315. C'est au sein de celle-ci qu'il produit Requiem.
Le cinéaste explique qu'il a eu envie de réaliser ce film après la vision d'un reportage consacré à un pèlerinage à Klingenberg, en Bavière. "C'est là qu'en 1976, Anneliese Michel, une étudiante catholique, est morte de malnutrition et d'épuisement, après avoir été soumise à plusieurs douzaines de séances d'exorcisme. J'ai été stupéfait de constater que même vingt ans après sa mort, elle était toujours vénérée comme une martyre à Klingenberg, par des pèlerins venus de toute l'Europe. J'ai commencé à m'intéresser à son histoire, tout en me documentant de manière approfondie sur d'autres cas d'exorcisme au XXème siècle, puis j'ai rédigé un synopsis, il y a bientôt dix ans de cela. Le récit ne m'a jamais quitté depuis. J'ai abordé l'histoire de manière différente, j'ai plutôt choisi le point de vue de son amoureux." C'est déjà le cas d'Anneliese Michel qui avait inspiré le film américain à succès L'Exorcisme d'Emily Rose.
Après avoir tourné la première scène de crise de Michaela, Sandra Hüller a visionné des documentaires sur des épileptiques : "Je n'avais jamais été témoin d'attaques épileptiques, sauf dans des mises en scène à la télévision et je préférais ne pas me fier à cette référence. En fait, Hans-Christian et moi n'en avons jamais parlé directement. Il m'a juste dit : "Joue-le comme tu le sens." À partir de là, les scènes se sont développées de manière instinctive. Plus tard, j'ai regardé la vidéo d'une crise, identique à celle que nous venions de tourner. La patiente semblait voir des choses, elle reculait en tremblant, chutait, retrouvait à nouveau ses esprits... C'était terrifiant de voir cette victime en proie à la peur et qui donnait vraiment l'impression de reculer devant quelque chose. C'est là que j'ai compris pourquoi la famille de Michaela la croit quand elle dit voir apparaître des visages monstrueux et entendre des voix d'outre-tombe (...) Cela m'a fait très peur. En même temps, j'ai été rassurée de constater qu'il y avait plusieurs types de crises d'épilepsie ; la représentation que nous en avons faite à l'écran n'était donc pas forcément très éloignée de la vérité."
A propos des similitudes entre le personnage de Michaela et le cas Anneliese Michel, le réalisateur précise : "Au fur et à mesure de l'écriture du scénario, nous avons progressivement pris nos distances avec l'affaire Michel. Nos personnages existent en tant que tels. Nous avons veillé à ce que leur comportement, leur manière de s'exprimer et leur mode de pensée se différencient de ceux de l'entourage d'Anneliese. Et plus on s'éloignait du cercle familial, plus on se sentait libre dans le traitement des personnages du film." Bernd Lange assure de son côté : "Il y a des similitudes avec Annelise Michel, mais son parcours n'est pas le même. Requiem ne se veut ni un documentaire, ni une biographie. Nous avons surtout cherché à parler d'un phénomène bien spécifique", même si "quand on écrit un scénario tiré d'événements réels, on ne peut pas se désintéresser des sentiments des gens dont on s'inspire et des raisons de leurs actes." L'équipe du film n'est d'ailleurs entrée en contact avec la famille d'Anneliese Michel qu'après la fin du tournage.
Le film ne livre aucune explication sur le comportement de la jeune femme, laissant le spectateur libre de son interprétation : "Je tenais avant tout à susciter de l'empathie pourMichaela, pour son comportement et son état", justifie Hans-Christian Schmid. "Ma position là-dessus estparfaitement claire et rationnelle : je ne crois pas au phénomène de possessiondémoniaque. Ce qui ne m'empêche pas de prendre la protagoniste et son point devue très au sérieux. J'ai essayé de me mettre à la place d'une jeune femmepsychotique, souffrant d'angoisses, et en proie au délire et aux hallucinations." Bernd Lange note quant à lui : "Je trouvais intéressant qu'un personnage se soumette volontairement à un exorcisme, et que tout cela se déroule au sein de son cercle familial, sans que personne ne trouve rien à redire, par impuissance et par incapacité de prendre une décision."