Bien évidemment, il n'est pas question de dire que le film est meilleur que les quatre grands chefs d'oeuvre consacrés au sujet. Cela tient surtout à la personnalité de son réalisateur, l'artisan Ted Post («Magnum Force», «Le secret de la Planète des Singes»), moins doué que les génies Cimino, Coppola, Kubrick ou Stone, et sans doute moins à l'aise que des Aldrich ou des Fuller. Toutefois, le film reste une franche réussite, une série B fauchée mais intéressante. Il y a déjà son titre original, «Go tell the Spartans», phrase issue de l'Histoire et de la bataille des Termopyles, au contexte magnifiquement évoqué dans le film. Le scénario, ensuite, est assez bien écrit. Il ne se place pas d'un point de vue idéologique en faveur du conflit mais il parle des hommes qui le font. Les GI donc mais aussi un peu du peuple vietnamien. Il ne va pas au plus profond du sujet mais il reste passionnant, avec un point de vue qui n'est pas moralisateur mais plutôt testimonial. Cela est sans doute dû au roman qu'il adapte, écrit par un ancien des forces spéciales ayant pris part au conflit. Un conflit qu'il contextualise avec brio, évoquant l'échec français comme spectre planant au-dessus des têtes américaines. Des forces armées américaines qui ont entrepris une mutation d'ailleurs, entièrement tournée vers le renseignement, avec des technocrates qui expliquent aux hommes de terrain ce qu'ils doivent faire. Des hommes de terrain qui sont représentés dans le film par des archétypes : le commandant vétéran, l'ambitieux aide de camp, l'officier patriote, le sergent revenu de tout, le soldat idéaliste. Le film évoque aussi la torture (elle demeure effectuée par des soldats sud-vietnamiens, alliés des Américains), la dépravation des troupes (drogues et sexe) et l'incompréhension totale de ces derniers, dans un conflit qui les dépasse, dans un milieu inhospitalier face à un ennemi valeureux qui se bat pour sa Terre. Le casting est pour le moins hétéroclite, avec un Burt Lancaster plus très en forme physiquement, à peine revenu du bloc opératoire pour soigner son genou récalcitrant qui lui avait déjà causé des soucis sur l'excellent «Le train» de John Frankenheimer en 1964. S'il boite bas et que son visage a pris un sacré coup de vieux, le bougre demeure fascinant en vieux lion fatigué, au regard un peu triste mais à la stature toujours aussi charismatique. En face, on retrouve le débutant Marc Singer, futur leader de la rébellion humaine face à l'envahisseur dans la série «V» ou encore Craig Wasson, futur voyeur dans le dérangeant «Body double» de Brian DePalma. Autre petite référence 80's sympathique, c'est la présence de l'hélicoptère de modèle Sikorski S58, héros de la série «Riptide» (là, c'est pour les fans hardcore des 80's) et qui nous change des fameux modèles Huey vu dans presque tous les films traitant le conflit. Au niveau mise en scène, Ted Post s'en tire avec les honneurs, signant quelques bonnes séquences, offrant un montage bien rythmé, troussant quelques plans bien trouvés et significatifs, livrant au final un film qui porte un vrai point de vue sur le conflit, moins opératique que les chefs d'oeuvre pré-cités mais pas moins engagé. Il se conclut en outre sur une phrase hautement allégorique, à la portée tragique qui annonce d'autres films sur un thème difficile : le retour des battus («Rambo» bien sûr, «Né un 4 juillet», l'oscarisé «Le retour» avec Jon Voight ou encore «Légitime violence», sortit l'année précédente). Une petite série B sympathique, une découverte à ranger dans la même catégorie que le méconnu mais intense «Hamburger Hill». D'autres critiques sur thisismymovies.over-blog.com