Peut-être est-ce le jeu de la comparaison. Je n'attribue qu'un 7 à ce Porco Rosso, alors qu'il est pour sûr un très bon film d'animation, que j'ai sans doute donné de meilleures notes à des Pixar ou des Disney plus niais, qu'ils ne méritent pas face à la poésie de ce dessin animé. Mais en fouillant dans mes archives, j'ai remarqué que j'avais attribué un 8/10 à Nausicäa de la vallée du vent, note que ce film mérite, et que je ne pouvais pas par conséquent attribuer la même note à ce Porco Rosso, qui reste inférieur.
J'en ai vu maintenant pas mal des Miyazaki, mais dans la tranche des dessins animés plus "sérieux" du réalisateur, dans laquelle je classerai Nausicäa, Mononoke, Le Chateau dans le Ciel ou Ambulant par exemple, Porco Rosso me semble être le plus léger. En fait j'ai trouvé que son sujet est clairement moins fort que ceux habituellement traités. Je ne suis pas là à dire que seuls les sujets écologiques ou sur les classes sociales comptent; mais ce Porc Rouge manque de tripes.
En fait, tout est abordé dans ce film assez sympathiquement. Rien n'est réellement grave, il n'y a pas vraiment d'enjeux hormis des enjeux assez triviaux (comme la question de l'honneur du pilote, ou des histoires d'amours etc.). La moralité de l'histoire est de prôner assez sobrement la liberté d'agir, facile avec les avions, mais aussi la place des femmes (une fois encore), mais fait ici de manière simpliste, tout en restant efficace. Mais la où, je pense, le réalisateur à foiré son coup, c'est sur tout le pan politique. On est jamais réellement intéressé par cette Italie de l'entre deux guerres, l'arrivée au pouvoir du fascisme, la part sombre de cette époque. On ne comprend pas vraiment à quoi ce contexte, pourtant si particulier, peut-il servir au récit. On s'en détache assez facilement et, pour le coup, Hayao Miyazaki aurait pu jouer la carte de la création d'un monde imaginaire que cela ne nous aurait pas dérangé.
Aussi, tout le pan moral est beaucoup moins travaillé. Là où d'autres de ses films appuient sur la complexité des rapports bien et mal, de l'absence de repères idéologiques ou alors des repères idéologiques multiples, ici il n'en est quasiment rien. La guerre est critiquée, sans conviction profonde, et Porco Rosso, malgré ses défauts, reste une figure classique du "gentil". Ses accompagnateurs sont eux blancs comme neige, à l'image de Fio ou de Gina, qui n'ont aucune part sombre.
Mais il faut remettre sur table les ambitions premières du studio Ghibli et du réalisateur pour comprendre l'intérêt du film. Porco Rosso devait être, à l'origine, un dessin animée de transition, léger, prévu pour être un court métrage sympathique sans enjeux. Sa production entrainée, il a aboutit comme un long métrage. Mais clairement, on voit que c'est un film "détendu", beau graphiquement mais jamais épique ou très soigné. Il a d'indéniable qualité qui font que, pour lui même, j'ai très apprécié ce film. Tout d'abord, son humour évidement, mais aussi sa légèreté qui est une force pour nos sentiments. Son rythme est très bon, on ne s'ennuie pas. L'histoire des pilotes est naïve et touchante. Surtout, je retiens une force majeure du film : sa pudeur, ses non dits, qui laissent rêveur, qui donne aussi a Porco Rosso une image d'Humphrey Bogart mystérieux. La fin en gênera sans doute beaucoup, mais je l'ai au contraire aimé dans sa simplicité, d'autant que c'est aussi a mon sens un petit kick envoyé au cinéma hollywoodien, Miyazaki faisant constamment ici l'éloge de la vieille europe, et se rappel nostalgique des premiers temps de la pensée socialiste.
Cela serait donc une erreur de dire que ce Miyazaki est raté. Ce n'est absolument pas cela. Il est réussit, mais nous pouvons simplement constater que c'est un film mineur dans sa filmographie, sans grandes ambitions, à prendre plus comme une douce fable qu'à un puissant réquisitoire.