Mika Ex Machina a fait l’ouverture du dernier festival "Chérie, Chérie", dédié au cinéma LGBTQIA+ de Paris, en novembre 2024.
L’histoire de Mika Ex Machina arrive réellement à la réalisatrice Mika Tard au moment où elle réalise son film. En effet, quelques mois plus tôt, alors qu’elle retrouvait chaque jour des objets étranges sur sa moto (rubans rouges, pièces de monnaie, antivols…), elle a failli être victime d’un grave accident quand un mini-cadenas, cette fois, a été mis volontairement dans la chaîne de son moteur. Elle a alors décidé d’en parler à ses amies, notamment Déborah Saïag, la co-réalisatrice, et de mener une enquête filmée, comme cette dernière le raconte :
"L’accident a été un électrochoc. On a compris qu’il fallait arrêter d’esquiver le problème. Filmer était une façon de mettre une distance entre nous et ce qui se passait, une sorte de protection. On avait aucune idée de ce qu’on allait trouver et c’est la résolution de l’enquête qui a rendu le film possible".
Ce n’est pas la première fois que Déborah Saïag et Mika Tard tournent sur le vif. Elles ont commencé avec des courts-métrages en DV à partir de situations, à l’instinct, et dans des décors naturels. Puis elles ont utilisé le même procédé dans la série Kings sur Canal +, et même dans leur roman, Ta main sur ma bouche, inspiré par #MeToo dans un groupe d’amis, avec une histoire qui était réellement arrivée autour d'elles.
C’est l’écrivaine féministe Iris Brey qui a incité Mika Tard à "s’entourer d’une communauté" face au harcèlement subi, et de se lancer dans une enquête, puisque la police ne pouvait rien faire. L’avocate et romancière Constance Debré, quant à elle, les a "plongées dans ce Cluedo Vivant".
Le film est aux confins de plusieurs genres : l’enquête évidemment, mais aussi le thriller, la comédie, la romcom et même le buddy movie !
Mika Ex Machina a été tourné à l’Iphone, ce que les réalisatrices avaient déjà fait pour la série Kings sur Canal + avec Katia Lewkowitcz. Mika Tard s’en explique : "Quand on a voulu filmer ce qui se passait avec ma moto, on n’a pas hésité une seconde, l’iPhone s’est imposé. Il avait naturellement plusieurs fonctions: nous filmer, nous et nos ami.e.s, servir de caméra de surveillance, enregistrer tout ce qui se passait, cumuler des preuves."
Les rushes de Mika Ex Machina étaient colossales, totalisant quarante heures. Le premier montage a réduit le tout à douze heures, pour finalement faire un long-métrage d’une heure et demie.
Mika Tard et Déborah Saïag travaillent ensemble depuis leur rencontre en 1999, alors qu’elle suivaient ensemble le même cours de théâtre. Elles fondent ensuite le collectif "Les Quiches" en 2000 et n’ont cessé ensuite de collaborer sur des séries, des longs-métrages et même un roman !
Une grande partie du film se déroule dans le véritable appartement de Mika Tard et Déborah Saïag, devant un personnage à part entière du film. Nichée sur leur terrasse, elles ont ainsi observé pendant des heures la moto garée en bas de l’immeuble, afin de trouver le coupable.
Le titre Mika Ex Machina a plusieurs grilles de lecture. Il évoque d’une part un jeu de mots avec Deus ex Machina, le principe théâtral censé résoudre une énigme, alors que la résolution dans le film est bien plus complexe que cela. D’autre part, les réalisatrices ont voulu s’amuser avec les doubles sens, comme l’explique Mika Tard : "Mon ‘ex’ fait partie des suspects ; la ‘machina’ évoque la machination, la moto, et même la caméra, en italien. C’est donc un titre puzzle, avec une dimension d’énigme que nous trouvons à l’image de notre film."
Pour la seconde fois avec leur série Kings, Mika Tard et Déborah Saïag ont fait appel à la compositrice Irma, qui a réalisé un thème musical autour de l’Habanera de Carmen. Un air qui reste joyeux malgré les paroles plus profondes, comme veut l’être le film.