"J'espère que vous avez le cœur bien accroché, parce que c'est une véritable boucherie à l'intérieur" : cette réplique de La Cité de la peur, avant que Gérard Darmon ne découvre une vraie boutique en ouvrant la porte, pourrait très bien servir d'avertissement pour les spectateurs désireux de découvrir Terrifier 2 dans les salles obscures.
Sorti en France le 11 janvier, le long métrage de Damien Leone a fait sensation dans les cinémas américains autour d'Halloween dernier, bâtissant sa légende sur le fait que quelques spectateurs avaient vomi devant les nouvelles exactions d'Art le Clown.
Un procédé marketing qui, s'il peut prêter à discussion tant il repose sur diverses données, lui a toutefois permis d'engranger 10 millions de dollars outre-Atlantique, pour un budget de 250 000 billets verts.
Il faut dire que le film ne lésine pas sur le gore pendant un peu moins de 2h20. Et dire que le réalisateur (également responsable des trucages sanglants) s'est fait plaisir relève de l'euphémisme.
Mais peut-être a-t-il été le premier surpris de pouvoir donner une suite à son slasher de 2016, inédit dans les salles américaines et françaises, et visible depuis peu sur Amazon Prime Video dans l'Hexagone.
D'aucuns parleront de complaisance, sur la durée ou une séquence de meurtre particulièrement longue et insoutenable, et le film ne devrait pas manquer de faire débat sur ce plan.
Mais il devient le nouveau chef de file de ces suites horrifiques plus gores que les épisodes précédents (alors que le premier Terrifier contenait un sacré morceau de violence), aux côtés de ces opus.
Evil Dead 2 (1987)
Groovy ? Ou gory ? Sam Raimi a choisi les deux pour la suite du film qui l’a révélé auprès du grand public. Comme Damien Leone avec Terrifier 2, le futur réalisateur de Spider-Man a bénéficié d’un budget conséquent, puisque celui d’Evil Dead 2 était dix fois plus important que celui du 1 (3,5 millions de dollars contre 350 000). Et il n’a pas manqué de se faire plaisir.
Pas tant côté scénario, car le long métrage ressemble à un remake moins fauché du premier opus. Mais sur le gore (et le cartoon). Déjà bien sanglant, l’original est vite surpassé grâce aux hectolitres de faux sang déversés à l’écran. En grande partie grâce à Ash (Bruce Campbell) et la tronçonneuse qui remplace cette main avec laquelle il a dû se battre dans l’une de scènes les plus mémorables du film.
Le gore qui restera le mot d’ordre des suites, sur petit et grand écran. À tel point que le défi imposé aux scénaristes, réalisateurs et accessoiristes de la série Ash vs Evil Dead, semble avoir été que les acteurs ne restent pas propres plus de deux minutes. Une envie de faire jaillir le sang avec générosité que l’on retrouve également dans le long métrage sorti en 2013, d’abord présenté comme un reboot avant qu’un caméo de Bruce Campbell, après le générique de fin, n’en fasse aussi une suite.
Beaucoup plus violent et moins drôle, le film de Fede Alvarez avait été décrit par Sam Raimi comme ce qu’Evil Dead aurait été, si le budget avait été assez conséquent pour qu’ils ne soient pas obligés de compenser le manque de moyens par l’humour. Sorti en 2013, il aurait aussi eu sa place dans cette sélection.
Saw III (2006)
Avec plus de pièges (et donc de victimes), Saw II avait déjà mis la barre plus haut que le film original en matière de potentiel cracra, et il suffit de (re)voir la scènes de lames de rasoir ou celle des seringues pour s’en convaincre. Mais ça n’était qu’un amuse-bouche de ce que Darren Lynn Bousman, qui a très vite succédé à James Wan derrière la caméra, nous réservait dans l’opus suivant.
Là où Saw II restait dans les traces du précédent, avec son twist qui faisait revoir le récit autrement, le III plonge la tête la première dans le registre du torture porn dont la saga était le représentant le plus emblématique. À tel point qu’il reste le seul épisode, à ce jour, à avoir été frappé d’une interdiction aux moins de 18 ans dans les salles françaises. Et le plus gros succès de la franchise horrifique dans l’Hexagone, avec 771 902 spectateurs qui se sont régalés en 2006.
La classification a-t-elle eu un impact sur ce succès, en titillant la curiosité d’un public à la recherche de sensations fortes ? Ou s’agit-il plutôt de l’aura des opus précédents, très plébiscités en vidéo, qui a joué avant que la qualité de la saga ne décline sévèrement ? Peut-être un peu des deux. Mais il est clair que Saw III marque un vrai tournant. Désormais, il n’est plus question de mystère et de leçons de vie, mais de voir mourir des gens à l’écran, le plus salement possible. Tout simplement.
Sur ce plan, la mission est accomplie, avec notamment un arrachage de cage thoracique ou un bain d’abats de cochon. Mais c’est aussi là que Saw glisse vers davantage de gratuité et des histoires artificielles, alors que ce troisième volet devait marquer la fin de l’histoire de Jigsaw (Tobin Bell). Ce qui se voit un peu dans les épisodes suivants, où il n’est présent que dans des flashbacks.
Hostel II (2007)
Dans la famille du torture porn, voici le petit cousin : Hostel. Pas forcément plus respectable ou moins gore que Saw, le bébé d’Eli Roth mélange le sang dans une grosse dose de satire sociale. Chacun des films raconte en effet l’histoire d’étudiants enlevés en Europe de l’Est pour y être torturés sous les yeux d’une élite qui paye cher pour assister à ce spectacle vivant (dans un premier temps du moins, car rares sont les victimes qui survivent).
Si les paris vont bon train entre les spectateurs privilégiés (ou pas) de cette boucherie, il y a moins de suspense pour le public dans la salle, qui sait malheureusement comment chaque séquence horrifique va se terminer. Sans forcément se douter du degré de violence. Qui est bien plus prononcé dans le second que dans le premier opus (où un tendon d’achille était pourtant sèchement sectionné). Si deux acteurs de Desperate Housewives (Richard Burgi et Roger Bart) sont au casting, l’ambiance est plus adaptée aux stars de l’horreur (le comédienne Edwige Fenech ou Ruggero Deodato, réalisateur de Cannibal Holocaust) qui font une apparition.
Entre une douche de sang en hommage à la Comtesse Bathory et des parties génitales coupées au sécateur, Hostel II cherche à repousser les limites du soutenable, non sans inverser les rôles dans le dernier acte, histoire de ne pas être accusé de complaisance. Le réalisateur du futur Green Inferno s’est quand même lâché, au point que l’un de ses amis serait ressorti de l’une des premières projections en courant, à la recherche d’un sac à vomi. Nous espérons alors qu’il n’a pas vu le troisième opus (sorti directement en vidéo en 2011), qui allait beaucoup plus loin encore. Dans la violence et la géographie, puisque l’action se déroulait cette fois-ci à Las Vegas. Mais sans Eli Roth.
Massacre à la tronçonneuse (2022)
L’original est quasi-unanimement reconnu comme l’un des plus grands films d’horreur de tous les temps. Et ce alors qu’on ne voit pas la moindre goutte de sang, chose étonnante de la part d’un long métrage qui s’appelle Massacre à la tronçonneuse. Une absence que le dernier opus en date, sorti sur Netflix en février 2022, s’est chargé de compenser dans les grandes largeurs. Jusqu’à la dernière minute, et alors que le téléspectateur pense le cauchemar terminé, l’arme de prédilection de Leatherface vrombit et découpe comme il faut devant la caméra de David Blue Garcia.
Présenté comme LA vraie suite de l’opus avec lequel tout a commencé, celle qui efface toutes les autres (comme le Halloween de David Gordon Green par rapport à celui de John Carpenter), ce Massacre à la tronçonneuse nouveau ne panse plus les plaies d’une Amérique encore traumatisée par le bourbier du Viêtnam, mais en crée sur le corps des influenceurs venus transformer la ville d’Harlow, au Texas, en un lieu branché où l’on peut bruncher en toute tranquillité.
Une charge contre la gentrification et l’écart grandissant entre les inégalités sociales, dans laquelle l’une des rares survivantes du carnage originel fait son retour, et qui culmine lors d’une fête dans un bus lorsque Leatherface se retrouve face à ses futures victimes. Dans un endroit exigu avec peu de possibilités de s’échapper donc. Inutile de vous faire un dessin, mais sachez que la couleur dominante de la séquence est le violet, mélange entre le bleu des lumières et le rouge du sang qui éclabousse, très vite, les murs.
Cette fois-ci, le contenu est très fidèle au titre. Même si certains ont reproché, au vu du traitement du personnage de Leatherface, parfois aussi agile qu'un ninja, que le véritable massacre soit envers le film originale de Tobe Hopper. Mais c’est un autre débat.