En 1991, le public découvre l'univers de William S. Burroughs adapté par David Cronenberg. Avec Le Festin Nu, le réalisateur de Crash filme sans concessions les affres de la création littéraire mêlée à une lente dérive dans les hallucinogènes. Dérangeant voire malsain, Le Festin Nu séduit autant les lecteurs de Burroughs que les habitués de Cronenberg et accède sans surprise au statut de film-culte.
Huit ans après, Steve Buscemi souhaite à son tour s'emparer de l'oeuvre de Burroughs pour la porter à l'écran. S'appuyant sur deux romans autobiographiques de l'auteur (Queer et Junky), cette adaptation, dont Buscemi sera le producteur, le réalisateur et l'acteur principal, traitera de la jeunesse marginale de Burroughs, déchirée entre sa dépendance à l'héroïne, ses rencontres homosexuelles et son éternelle quête de soi.
Steve Buscemi est surtout connu et apprécié pour ses interprétations dans de nombreux films issus du circuit indépendant. Cette brillante carrière d'acteur n'était pourtant pas programmée par l'intéressé. Après une multitude d'emplois temporaires - pompiste, vendeur de journaux, conducteur d'un camion de glace - qu'il qualifie lui-même de "jobs pour picoler", Steve Buscemi se lance dans le théâtre.
Pendant plusieurs années, il partage sa vie entre des auditions à Broadway et son métier de pompier. De cette activité, il en garde un excellent souvenir, n'hésitant pas à la comparer avec le cinéma : "Lorsque j'étais pompier, je me suis retrouvé dans de nombreux immeubles en feu. C'était un job sympa, le seul métier que je peux comparer avec le frisson de jouer. Avant de pénétrer dans un feu, il y a la même poussée d'adrénaline que l'on peut ressentir lorsque la caméra se met à tourner".
En 1992, Steve Buscemi explose grâce à Reservoir Dogs. Brillant Mr Pink, il s'impose sans problème au milieu d'une meute de talents confirmés comme Harvey Keitel (Bad Lieutenant) ou Tim Roth (Le Suspect Idéal). La suite de sa carrière fait le bonheur des critiques et du public. Considéré comme "l'acteur le plus important du cinéma indépendant américain", Steve Buscemi est présent dans tous les films des frères Coen (Miller's Crossing, Barton Fink, Le Grand Saut, Fargo et The Big Lebowski), fait de savoureuses apparitions des grosses productions hollywoodiennes (Les Ailes de l'Enfer, Armageddon) et réalise un premier film remarqué (Happy Hour). A l'heure actuelle, Steve Buscemi ne peut regretter qu'une seule chose : ne plus avoir l'occasion de montrer son travail à William S. Burroughs, décédé le 2 août 1997. C.V