Alors qu’une grande partie du monde était cloîtrée entre quatre murs à cause de la pandémie, Daisy Edgar-Jones, elle, est devenue une star. En quelques mois, la série Normal People, dans laquelle elle joue l’un des deux rôles principaux, s’est transformée en phénomène. Son interprétation est saluée par le public et la critique, au point même de décrocher sa toute première nomination aux Golden Globes.
Depuis, le visage de cette Britannique de 24 ans est partout. En mars dernier, elle donnait la réplique à Sebastian Stan dans le thriller cannibal Fresh - disponible sur Disney+. Plus récemment, elle est à l’affiche d’une autre série, Sur ordre de Dieu, avec Andrew Garfield - également disponible sur Disney+. Au cinéma, elle est l’héroïne de Là où chantent les écrevisses, adaptation d’un best-seller qui connaît un très beau succès dans les salles américaines. En France, le film est attendu pour le 17 août prochain.
Pour sa 75e édition, le Festival du film de Locarno, qui se tient du 3 au 13 août 2022, honore cette jeune actrice avec un prix d’honneur, le Leopard Club Award. Une récompense qui salue une ascension remarquable dans un contexte pour le moins agité. Une poignée de journalistes, dont AlloCiné, ont pu lui rendre visite dans un hôtel pour lui poser quelques questions.
Qu'est-ce que ça fait d'être ici à Locarno pour présenter ce film, recevoir ce prix et être au cœur de l'attention ?
Daisy Edgar-Jones : Je n'avais jamais participé à un festival de film auparavant, alors c'est vraiment magique d'être ici. Puis regardez cette vue ! (elle se tourne vers le paysage, ndlr). C’est génial de venir ici et de savoir que le public va découvrir le film ce soir, et je me sens très honorée de recevoir ce prix. L'un des premiers films que j'ai pu faire à l'âge de 19 ans, intitulé Pond Life, est également présenté en avant-première ici, c'est donc assez amusant de réunir mon premier travail et le plus récent en même temps.
Comment est née cette envie de devenir actrice ?
J’ai toujours aimé le théâtre à l'école, même si j'étais plutôt timide, calme et réservée. Je me souviens d'avoir joué des pièces pour la première fois et d'avoir pu jouer des personnages qui étaient très différents de moi, qui étaient un peu plus insolents ou grossiers. Et j'ai vraiment apprécié de voir à quel point on pouvait s'en sortir quand on n'était pas soi-même.
Puis quand j'ai eu 15 ans, j'ai rejoint le National Youth Theatre, qui est une grande compagnie à Londres. J'ai joué une pièce avec eux chaque année depuis mon arrivée dans cette école. C'est grâce à eux que j'ai eu mon agent et que j'ai commencé à auditionner professionnellement depuis mes 16 ans.
Vos parents sont tous les deux dans l'industrie, n'est-ce pas ?
Ma mère, avant ma naissance, était monteuse de films. Mon père, en fait, il travaillait à la télé, mais dans un autre genre de média. Il dirigeait Big Brother, qui était une émission de télévision. J'étais trop jeune pour regarder ça (elle sourit, ndlr).
Vous ont-ils encouragé ?
Ils connaissaient le milieu, donc ils étaient plus en confiance. C’est effrayant de permettre à son enfant de faire un travail qui n'est peut-être pas toujours très fiable ou stable. Le fait de ne pas avoir eu peur de ça, d'avoir eu cette expérience, m'a été bénéfique.
Je serais curieux de connaître votre réaction suite au succès phénoménal de Normal People. Ce n'est pas seulement le fait que ce soit un carton, mais beaucoup de personnes se sont identifiées aux personnages. J'ai l'impression que c'était davantage basé sur Paul Mescal et vous-même, votre présence et toute l'ambiance portée à l'écran. Cela vous a-t-il mis une pression supplémentaire ?
Quand j'ai fait Normal People, Paul Mescal et moi n'avions jamais joué de rôle principal avant. Je pense même que Paul n'avait jamais fait de film ou de télévision tout court, ce qui est incroyable. C'était sa première fois devant la caméra. J'avais de l'expérience avant cela, mais aucun d'entre nous n’avait été exposé à ce point.
Sur le tournage, nous n’étions pas conscients de l’ampleur que cela pourrait prendre. On ne pensait même pas que la série allait être vue. Aujourd’hui, c’est différent. J'ai eu un peu plus conscience. Je sais que les gens vont plus prêter attention à mon travail. J’essaye de ne pas y penser et de l'oublier sur le plateau. Quand le film sort, il prend une forme différente et il ne vous appartient plus de toute manière.
J'aimerais jouer le rôle d'une méchante.
Quand on voit vos trois derniers projets, Là où chantent les écrevisses, la série Sur ordre de Dieu et Fresh, ils parlent tous des violences faites contre les femmes et à quel point c'est un problème systémique. Est-ce une coïncidence ou un choix délibéré de votre part ?
Je pense que c’est une coïncidence. J'ai toujours voulu jouer des femmes compliquées, qui ne rentrent pas dans des cases et qui ne correspondent pas à ce qu'une femme devrait être. Je pense que jouer des personnages complexes, à la fois doux et puissants, courageux et timides, et toutes ces facettes différentes, c'est ce qui m'intéresse. Mais je suppose que c'est une coïncidence qu'ils aient tous vécu cette expérience de différentes manières.
Quels sont les futurs objectifs que vous souhaitez atteindre dans votre carrière ?
J’aimerais pouvoir jouer des personnages qui sont vraiment très différents, essayer de me transformer et de ne pas choisir des personnages qui sont peut-être trop évidents. J'aimerais jouer le rôle d'une méchante par exemple. Et j’aimerais travailler pour de grands cinéastes. J'aime être dirigée et être immergée dans la vision d’un artiste.
Vous parlez de personnages “trop évidents”. Qu’entendez-vous par là ?
Eh bien, j'ai l'impression de jouer beaucoup de jeunes femmes douces, calmes, assez gentilles. Je pense, enfin j'espère, être une personne assez gentille dans la vie, mais j'aimerais jouer un personnage qui soit très différent de moi, c'est certain.
Avez-vous des projets prochainement ?
J'ai quelques projets pour l'année prochaine. Je ne peux pas vraiment en parler car ils n'ont pas été annoncés. Je vais jouer dans une nouvelle adaptation de livre. Je ne sais pas pourquoi je continue à m'infliger ça (elle se met à rire, ndlr). C’est un classique de la littérature cette fois, ce qui est un peu différent.
Propos recueillis par Thomas Desroches, à Locarno, le 5 août 2022.
Là où chantent les écrevisses, le 17 août au cinéma.
Le Festival du film de Locarno se déroule du 3 au 13 août 2022.