L'ivresse de la vitesse, Tom Cruise l'a bien ressentie sur le tournage de Top Gun Maverick. Trente-six ans après la sortie du premier opus, qui a fait de lui la star qu'il est encore aujourd'hui, l'acteur et producteur n'a pas fait les choses à moitié. Alors qu'il réalise lui-même les cascades les plus folles dans chaque Mission Impossible, il a appliqué ce même souci de réalisme à l'autre saga phare de sa carrière.
Il a donc filmé ses scènes de vol à bord du cockpit d'un véritable avion de chasse, et ses jeunes partenaires aussi. Ce qui a nécessité une longue préparation. Pour Tom Cruise, tout (re)commence vraiment le 7 septembre 2018, lorsqu'il se rend sur la base militaire de Miramar, où une grande partie de Top Gun avait été tournée au printemps 1985. Pas tant pour un pélerinage que pour prendre des cours.
L'acteur suit en effet un ASTC (Aviation Survival Training Curriculum), programme nécessaire dans l'optique de se qualifier pour les longues séquences de vol à bord de F/A-18 de la Navy américaine, condition sur laquelle il ne compte pas transiger avec cette suite. "Dès le début, j'ai dit au studio que si je devais m'investir dans ce film, nous devrions tout tourner dans la pratique. Je serai dans ce F/A-18, point final", explique le principal intéressé.
"Il faudra donc développer des rampes de caméra, il y aura des souffleries et de l'ingénierie. Cela va prendre beaucoup de temps pour que je comprenne tout ça (…) Pendant des années, on nous a dit : 'Vous ne pouvez pas tourner en images de synthèse ?' J'ai toujours répondu que non, que ce n'était pas cela l'expérience à vivre. J'ai averti mon entourage : 'Je dois trouver l'histoire adéquate. Et nous allons avoir besoin de l'équipe appropriée. Ce film, c'est une histoire de précision et de virtuosité. Ce n'est pas un jeu, pour moi."
L'IVRESSE DE LA JUSTESSE
Une manière pour lui de repousser ses limites, une fois de plus. Et de prendre une revanche sur le passé ? Car il avait déjà été envisagé de tourner des scènes du premier Top Gun dans des avions, mais les tests se sont révélés peu concluants. Et tandis que le dossier de presse de Maverick affirme que seules les images de Tom Cruise étaient exploitables, quand tous ses petits camarades ont vomi et/ou eu les yeux révulsés, d'autres sources affirment que la star a connu les mêmes difficultés.
Au-delà d'une volonté de faire du film de Joseph Kosinski un véritable événement cinématographique, de ceux qui méritent que l'on se déplace en salles pour en prendre plein les yeux, il y aurait donc un côté personnel dans ce nouveau défi ahurissant que Tom Cruise s'est fixé. Et cela colle parfaitement à ce que l'on peut décrypter du long métrage, qui pointe du doigt la propension d'Hollywood à trop se reposer sur les effets numériques au détriment du réel quand il faut faire le spectacle, et le refus de la star de prendre sa retraite. Même lorsqu'une jeune génération veut prendre la place qui fût la sienne, ou quand un exploit semble impossible à réaliser, lui dont on vante ouvertement la légende dans la scène où Maverick est présenté à ses élèves.
Des élèves qu'il a tenu à faire décoller avec lui. Car pas question d'être le seul à tourner dans des avions en vol, quand les autres n'auraient droit qu'à des simulateurs : "Cette fois-ci, grâce à Tom, tous les acteurs se sont habitués aux principes fondamentaux et aux mécanismes du vol et de la force G, grâce à l'entraînement qu'ils ont suivi des mois à l'avance", raconte le producteur Jerry Bruckheimer. "Contrairement au premier film, nos acteurs sont réellement dans les cockpits des F/A-18 en vol, jouant leurs dialogues."
TOM GUN
Une exigence à des fins de réalisme, mais également pour ne pas perdre de vue le cœur du film. "L'une des choses que j'ai dites à Tom très tôt, c'est que le Top Gun original ne concernait pas seulement Maverick", explique le producteur et co-scénariste Christopher McQuarrie. "Il s'agissait de la culture de ces pilotes et de la concurrence à laquelle ils se livraient tous. Nous voulions apporter un peu de cela. Par conséquent, tous les personnages de pilotes de ce film sont plus richement développés, ils ont plus de profondeur."
"Cette diversité de pilotes permet de comprendre qui est Maverick aujourd'hui. Évidemment, ce film se déroule plus de 30 ans plus tard. Et nous ne voulions pas arrêter le film pour réfléchir à ce qu'ont été ces 30 années. Nous voulions que vous sentiez cette histoire se dérouler naturellement pendant le visionnage du film." Une histoire mise en scène par Joseph Kosinski… et les comédiens, contraints de gérer eux-mêmes les caméras en vol, et de prendre en compte leur positionnement ou la luminosité.
Mais ont-ils vraiment piloté pour autant ? Non. Même Tom Cruise. Si la star a pu effectuer des catapultages et appontages, au sein de son programme de qualification, la Navy américaine ne l'a pas autorisé à utiliser lui-même les F/A-18. Ne serait-ce que parce qu'on ne peut pas faire joujou avec un appareil qui coûte 70 millions de dollars. Même si les acteurs ne sont pas aux commandes, les scènes de vol n'en restent pas moins spectaculaires et immersives, à tel point que l'on peut ressentir l'effet de la pesanteur sur eux.
Ou plutôt l'ivresse de la vitesse chère à Maverick, auquel Tom Cruise a voulu offrir un retour en force avec un spectacle qui pourrait marquer les esprits. Tout en ajoutant une ligne de plus au palmarès de son interprète, tant pour son exigence que son côte casse-cou.
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