Durant trois saisons, Hailee Steinfeld a incarné Emily Dickinson, la poétesse rebelle dans la série Dickinson diffusée sur Apple TV+. Dans cet ultime opus, on peut voir comment la Guerre de Sécession a pu impacter la vie de la jeune Emily. Nous avons discuté avec l’équipe de la série de ces adieux.
Dickinson, une série créée par Alena Smith avec Hailee Steinfeld, Jane Krakowski, Adrian Enscoe, Ella Hunt, Anna Baryshnikov, Chinaza Uche et Amanda Warren…
AlloCiné : C’est la dernière saison de Dickinson, pourquoi en finir avec cette série et à quoi peut-on s’attendre avec cette conclusion de l’épopée d’Emily Dickinson?
Alena Smith : J’ai toujours pensé que cette série serait une trilogie, une épopée comme vous le dites, en trois saisons. Pour moi ça a été fascinant d’explorer les origines d’Emily Dickinson, la poétesse la plus célèbre des Etats-Unis. Je crois qu’au cours de ces trois saisons nous avons pu suivre la maturité et l’ascension intellectuelle et émotionnelle de chaque personnage.
Cette saison explore encore plus en profondeur l’âme de cette famille, les Dickinson, et l’articulation entre chacun d’entre eux. Emily reste toujours celle qui réussit à maintenir cette famille ensemble malgré la Guerre Civile qui fait rage en Amérique. Le conflit politique externe rentre dans la sphère familiale. Au final, cette série est une étude sur la notion de famille dans ces temps explosifs des années 1860.
Chinaza Uche : Je crois que l’on se sent arrivé à bon port avec cette dernière saison. Il y a un sentiment de finalité pleine de paix et malgré le chaos de l’époque. C’est une saison qui va vous montrer que vous n’êtes jamais seuls dans la vie, qu’il y a toujours quelqu’un pour vous venir en aide, vous soutenir dans vos difficultés. C’est donc un beau message pour notre époque si difficile et où il n’est pas simple de se tracer une voie et un futur.
Hailee Steinfeld : Je pense que nous arrivons, avec cette saison, au terme de la maturité de mon personnage, Emily Dickinson. Il en va de même pour les autres personnages qui l’entourent. Après ses hauts et ses bas, Emily sait où se situer dans cette société en pleine crise avec la Guerre Civile américaine. Elle sait, maintenant, qui elle est vraiment et quelles sont ses capacités artistiques. Malgré tout, je pense que la série se termine avec beaucoup d’espoir et de positivité comme vous pourrez le voir.
Amanda Baryshnikov : Cette saison est vraiment la convergence de toutes les histoires de chaque personnage en un climax sulfureux. L’espoir résonne fort cette saison, c’est un processus pour se transformer et transformer son époque. Je crois que nous pouvons comprendre ceci avec les temps difficiles que nous venons de traverser ces deux dernières années.
Jane Krakowski : Je pense que c’est une fin poétique parfaite pour retracer cette vie exceptionnelle d’Emily Dickinson et de sa famille. Je crois aussi que l’on pourra faire des parallèles entre l’époque agitée d’Emily Dickinson et la nôtre avec des crises comme celles du Covid, de #MeToo et de Black Lives Matter. Nous sommes, nous aussi, dans un grand moment de transformation existentialiste.
Adrian Enscoe : Le drame familial s’intensifie dans cette saison et tout arrive à sa fin. Ou plutôt c’est un tournant inévitable qui attend chaque protagoniste de notre série. Mon personnage, Austin, se voit forcer de devenir "le changement qu’il souhaite pour le Monde".
Ella Hunt : Mon personnage de Sue veut intensifier sa relation avec Emily. Elle veut lui faire preuve d’un plus grand amour. On va la voir vivre pleinement, librement et enfin heureuse. Ce qui est en contraste complet avec la guerre civile qui fait rage.
Après toutes ces années, comment expliquer la fascination pour Emily Dickinson, que pouvons-nous en retenir ?
Alena Smith : Ce qui est intéressant c’est qu’Emily Dickinson n’était pas du tout appréciée à son époque. Ce n’est que maintenant que nous en avons fait une icône de la poésie. Je pense qu’elle est le reflet de notre société, en transition, comme l’était sa société pendant la guerre civile américaine. Egalement, je pense que l’étude de cette époque peut nous faire mieux comprendre les tensions et les conflits actuels dans notre société.
C’est incroyable de constater comment notre passé tumultueux définit toujours notre présent aussi instable et fragile. J’espère de tout cœur que les jeunes générations vont apprécier encore plus la force d’âme qu’était Emily Dickinson et comment elle a marqué son époque. J’encourage tout le monde à prendre un livre de poèmes d’Emily Dickinson et à la découvrir pleinement, avec toute sa lumière pour source d’inspiration.
Hailee Steinfeld : Je crois que sa poésie est intemporelle. Elle incarne une force impressionnante, surtout pour une femme de cette époque. Je crois aussi que, de nos jours, nombre de jeunes filles et de femmes peuvent s’identifier à elle. Quelque part, d’incarner Emily m’a rendue, moi aussi, plus forte que je ne l’étais. Je pense qu’à jamais elle sera pour moi un exemple et que je citerai ses poèmes comme source d’inspiration et de motivation.
Anna Baryshnikov : Emily était un témoin de son temps, que ce soit en décrivant le vol d’un papillon ou la souffrance humaine de ces horribles années de guerre civile. Je pense que les lecteurs ressentent toute la beauté et toute la laideur qu’elle sait si bien décrire. Pour moi, c’est incroyable de savoir qu’au pire de ce cauchemar américain elle arrivait à écrire un poème par jour. Quelle force, quel courage.
Adrian Enscoe : Pour moi, Emily Dickinson est une visionnaire et elle sera toujours en avance sur son temps. C’est l’une des premières femmes qui a su s’extraire de la "petite boite" que la société de l’époque lui avait imposée. Finalement, c’est une femme qui vous invite à devenir vraiment qui vous êtes au fond de vous-mêmes, et à ne pas avoir peur d'exprimer les sentiments profonds qui vous animent.
Ella Hunt : Je suis d’accord qu’avec les choix de vie qu’elle a faits, c’était une rebelle et une artiste totalement en avance sur son époque, tellement conservatrice, surtout pour une femme. Car les femmes n’avaient presque aucun droit. Dickinson me donne encore plus le courage et la force de mes convictions.
Jane Krakowski : Je pense que c’est une femme qui a su faire preuve d’une grande force intérieure, d’autant qu’elle était "queer" et avait une relation très intense avec Susan Huntington. Cela ne peut qu’inspirer aujourd’hui un grand nombre de jeunes filles qui peuvent la comprendre et qui sont comme elle, amoureuses d’une autre femme. Je pense que son honnêteté et sa sincérité toucheront de tous temps ceux qui la lisent. Emily Dickinson est vraiment un rôle modèle pour les jeunes filles de notre époque. J’espère au final que la luminosité des poèmes d’Emily Dickinson rayonne dans l’âme des lecteurs d’aujourd’hui qui dernièrement ont passé deux lourdes années de crises sanitaire et sociale.