Avec L'Ennemi, le réalisateur belge Stephan Streker, distingué au Festival du film francophone d'Angoulême avec le film Noces, s'empare d'un fait divers qui a secoué la Belgique, mais relativement méconnu en France. L'histoire, librement adaptée de l'affaire Wesphael, s'intéresse à un célèbre homme politique, accusé d’avoir tué son épouse, retrouvée morte, une nuit, dans leur chambre d’hôtel. Est-il coupable ou innocent ? Personne ne le sait. Et peut-être lui non plus...
"J'avais entendu parler du fait divers mais je ne savais pas vraiment ce qu'il s'était passé. J'ai découvert sans le découvrir, car, très vite, Stéphane Streker nous a demandé justement de ne pas s'y intéresser du tout, de s'en éloigner pour être vierge et pour pouvoir intégrer ce que lui avait envie de raconter à travers ce fait divers."
Un mystère entoure cette affaire qui a beaucoup intéressé le réalisateur et scénariste Stephan Streker dans son approche. "C'est une histoire en Belgique sur laquelle tout le monde à un avis. Personne ne sait ce qu'il s'est passé, entre Louis Durieux (nom du personnage incarné par Jérémie Rénier, Ndlr.) et son épouse (jouée par Alma Jodorowsky). La seule chose que l'on sait, c'est qu'elle est ressortie morte de cette chambre d'hôtel à Ostende."
"Plein de gens ont un point de vue dessus, ont des certitudes, poursuit-il, et je trouvais très intéressant de faire un film où l'on montre un personnage qui est rempli de doutes. L'ennemi, c'est ça : c'est l'ennemi intérieur. Il n'est entouré que de gens qui ont des certitudes pour lui."
Et d'ajouter : "Au-delà de ça, c'est une histoire avec des enjeux moraux extrêmement forts. C'est une histoire passionnante à raconter, et qui me permettait de porter une réflexion sur la vérité, la culpabilité, et ce qui m'intéressait était les personnages appréhendés dans leur intimité. Ce que j'appelle leur intimité, c'est le rapport de soi à soi."
"C'est un rôle complexe, où il y a plusieurs lectures", complète Jérémie Rénier. "Et après justement le travail était d'ouvrir toutes les portes, de chercher toutes les lectures, d'essayer des choses avec Stephan Streker, de se poser des questions, et puis tout un travail du corps qui était pour moi nécessaire pour rencontrer le personnage. C'est intense parce que ça demande énormément de part de soi, de se livrer, de se déposséder de son corps, de son esprit, de sa pensée."
Propos recueillis au Festival du film francophone d'Angoulême 2020