A cérémonie particulière, interviews particulières : les lauréats des César 2021 ont en effet rencontré la presse… en distanciel. Par écrans interposés, comme un symbole de l'année écoulée. Morceaux choisis parmi les réactions des vainqueurs.
César 2021 : carton plein pour Albert Dupontel et son Adieu les consLaure Calamy - Antoinette dans les Cévennes (Meilleure Actrice)
Oui, Antoinette dans les Cévennes a été un beau succès, alors que c’était à un moment incertain. Et je salue Diaphana [distributeur du film, ndlr], parce que c’est vrai qu’à ce moment-là, il y avait une peur de ressortir les films mi-septembre. Et moi-même je me disais qu’ils étaient fous et qu’il fallait reporter à la fin octobre. Comme faisaient beaucoup de gens, parce qu’on ne savait pas. Et en fait ça montre bien que nous tous, les gens ont envie de cinéma. Je ne crois pas à sa disparition. On dit qu’à force de voir les films sur des plateformes les gens vont s’en détourner. Je n’y crois pas du tout ! Je pense que, au contraire, les gens ont envie d’être dans les salles de cinéma, de théâtre, dans les musées. Et cette sortie l’a montré.
Fathia Youssouf - Mignonnes (Meilleur Espoir Féminin)
Première lauréate de la soirée, Fathia Youssouf, était avec la presse lorsque Jean-Pascal Zadi a été sacré Meilleur Espoir Masculin et a cité son nom sur scène.
Fathia Youssouf : Oh ! Je ne savais pas. Je l’apprends là. Merci à lui, c’est vraiment gentil. C’est quelqu’un qui m’inspire oui. J’ai vu son dernier film [Tout simplement noir] il n’y a pas très longtemps, et j’ai vraiment aimé. Je lui ai parlé avant la cérémonie des César, et il m’a dit des mots qui m’ont touchée et inspirée. C’est vraiment une personne qui m’inspire. Je le remercie encore.
Jean-Pascal Zadi : Je lui ai dit qu'il fallait qu'elle ait confiance en elle, qu'elle n'en était qu'au début. Ce qui fait que finalement, elle va arriver à ses objectifs, ça va être évidemment de continuer l'école, qu'elle est très jeune. D'écouter sa Maman aussi, mais que ça allait aussi être du travail, rester sérieuse et obstinée dans le travail. Voilà ce que je lui ai dit.
Nicolas Marié - Adieu les cons (Meilleur Acteur dans un Second Rôle)
Je dis à Albert Dupontel que je l'aime, c'est mon sixième film avec lui. Il me confie des personnages décalés à chaque fois, ce sont les seuls que j'aime et pour moi c'est un grand bonheur (...) A chaque fois que je lis ses scénarios, je me dis : "Tiens, c'est [ce personnage] qu'il va me confier. Comme par hasard, c'est celui qui est le plus décalé." Je ne sais pas, peut être qu'il y a comme une communion entre lui et moi, une espèce de mystère de la vie.
Sébastien Lifshitz - Adolescentes (Meilleur Documentaire)
Pour moi, Adolescentes est un film qui parle de la jeunesse d’aujourd’hui. Le film s’est arrêté juste avant la crise du Covid, et aujourd’hui, quand je pense à Emma et Anaïs [les héroïnes de son film, ndlr], qui se prennent cette crise sanitaire en pleine figure, je m’inquiète évidemment et je pense à elles et à ce futur qui les attend. Elles sont inquiètes, elles ont un rapport au temps présent qui n’est pas simple. Et à travers elles, j’ai l’impression que le film parle de cette génération où tout semble fragile, précaire, instable, et que cette crise est venue encore plus aggraver.
Emma m’appelle parfois et me raconte qu’elle est déprimée, elle se met à pleurer pour un rien et on sent cette espèce d’hyper-fragilité que la situation a créée en ce moment. Quand je pense au film, évidemment, je pense tout de suite à elles. Et à travers elles, je pense à tous ces jeunes qui souffrent vraiment beaucoup en ce moment.
Adolescentes est un film qui parle de la jeunesse d'aujourd'hui (Sébastien Lifshitz)
Je n’ai pas regardé mon téléphone, mais apparemment j’ai 72 textos qui m’attendent (rires) Donc je pense qu’il doit y en avoir d’Emma et d’Anaïs. Elles auraient été tellement heureuses d’être là ce soir avec nous. Le Covid nous a empêchés de pouvoir les avoir près de nous, mais je pense énormément à elles et je suis censé les appeler tout de suite après.
Tina Baz - Adolescentes (Meilleur Montage)
Le montage a duré un an. Il y avait 500 heures de rushes, 5 ans de tournage, 1 100 séquences. On a eu le parti pris de travailler sans interview du tout. Nous avons dérushé au fur et à mesure mais pas monté au fur et à mesure. La structure est arrivée au fur et à mesure.
Je ne crois pas à la disparition du cinéma (Laure Calamy)
Stéphane Demoustier - La Fille au bracelet (Meilleur Scénario Adapté)
Je suis prêt à tout entendre que, pour des raisons sanitaires, les salles doivent fermer, mais je ne peux pas concevoir que si les grands magasins sont ouverts, les salles ne peuvent pas l'être. Là, ça devient un choix politique, ce n'est plus une décision sanitaire. Je n'ai jamais accès à une tribune, mon métier est de faire des films, pas de parler, mais puisque j'avais accès à une tribune, j'avais envie de dire ça, aussi parce que nous avons un système qui est extrêmement vertueux, qui est unique au monde ou presque, qu'on nous copie d'ailleurs.
Je ne peux pas concevoir que si les grands magasins sont ouverts, les salles ne peuvent pas l'être (Stéphane Demoustier)
Cela va très vite de détruire, c'est très long de construire. Cela s'est façonné au fil des années. Pendant la cérémonie, on voit des extraits de plein de chefs-d'œuvre, mais tout ça, c'est parce que derrière, il y a un système qui est pérenne, qui a été entretenu pendant de longues années. Ca irait très vite d'abandonner tout ça, et je pense qu'il y a un devoir, une responsabilité au contraire de l'entretenir et de le développer.
Aurel (réalisateur) et Serge Lalou (producteur) - Josep (Meilleur Film d'Animation)
Aurel : Ce César, c'est la cerise sur le gateau. On n'a pas été malheureux dans les récompenses avec ce film. C'est mon premier film et il ne faudrait pas que ça devienne une habitude car je ne suis pas sûr que ça se reproduise à chaque fois ! Les César arrivent après beaucouo d'autres et on a eu la chance d'avoir de très belles récompenses. C'est un immense plaisir, un immense honneur.
Serge Lalou : Une des choses que je trouve très forte dans le parcours de ce film, c'est qu'il y a une démarche extrêmement singulière d'Aurel, à la fois en terme de choix de sujet, de travail de scénario, et ensuite de réalisation, dans un domanine, l'animation. Toutes ces reconnaisances ancrent l'animation non plus comme un genre à part, mais comme un moyen d'expression à l'intérieur du cinéma d'auteur. Je trouve ça formidable. L'enthousiasme autour de Josep qu'on a rencontré du public, de la presse ou des collaborateurs est un enthousiasme que je rencontre sur d'autres films en fiction, en documentaire, et c'est le même public. C'est un langage qui a été adapté à ce sujet là, et le fait que ce soit célébré au moment où l'on fête le cinéma, c'est une grande joie.
Propos recueillis par Maximilien Pierrette & Brigitte Baronnet pendant la 46ème cérémonie des César