"Dispute est un mot hollywoodien", écrivait Bette Davis dans This 'n That, ses mémoires publiées en 1987. Une citation qui pourrait, en quelques mots seulement, résumer Feud, série sortie 30 ans plus tard. Avant de réécrire l'histoire du cinéma dans Hollywood, Ryan Murphy s'intéressait à la rivalité qui opposait deux icônes : Bette Davis et Joan Crawford. Connues pour leur fort caractère et leurs nombreuses exigences, les deux actrices se rencontrent sur le tournage du film de Robert Aldrich, Qu'est-il arrivé à Baby Jane ?. C'était en 1962. Dans les coulisses comme sur le plateau, elles se livrent à un affrontement sans merci où tous les coups sont permis.
En 8 épisodes, Feud revient sur cette mésentente légendaire — qui a fortement contribué au statut culte du film —, mais aussi sur tout un système qui encourage la compétition entre les femmes, souvent mises au placard après un certain âge. Pour interpréter ce duo, qui d'autres que deux actrices oscarisées et tout aussi talentueuses ? Ryan Murphy confie cette mission à Jessica Lange et Susan Sarandon. À l'écran, elles reproduisent les mêmes intonations de voix et les mêmes gestes que leurs modèles. La précision de leurs interprétations est telle que plusieurs vidéos sur la Toile comparent les scènes de la série aux images d'archives. Le résultat est bluffant.
Découvrez la vidéo qui compare les séquences de Feud aux vrais événements :
Idéale pour les passionnés, la série devient réellement pertinente lorsqu'elle outrepasse le cadre du cinéma et aborde des sujets plus lourds, le premier étant la misogynie. Riches, célèbres, intouchables, et pourtant. Feud démontre que, malgré leur pouvoir, les actrices sont soumises aux diktats des grands studios et de ceux qui les dirigent. Une oppression réservée aux femmes. Si la rivalité entre les deux stars est traitée comme un ressort comique au premier abord, le sexisme ambiant, fil rouge de la série, prend le pas sur l'intrigue, au point de créer une atmosphère étouffante.
Aux côtés de Jessica Lange et Susan Sarandon, Ryan Murphy a rassemblé un casting en or. Ainsi, Stanley Tucci incarne le patron de la Warner, Jack Warner, Kathy Bates interprète Joan Blondell et Alfred Molina, lui, le réalisateur Robert Aldrich. Sarah Paulson, grande habituée des productions du showrunner, apparaît le temps de quelques secondes, en Geraldine Page. De son côté, Catherine Zeta-Jones prête ses traits à la grande Olivia de Havilland. Cette dernière, mécontente de l'image qu'elle renvoie dans la série, poursuit la chaîne américaine FX et Ryan Murphy pour "atteinte à la dignité". L'actrice hollywoodienne perd finalement son procès. Quand une querelle en engendre une autre.