Heat, qui célèbre aujourd'hui les 25 ans de sa sortie, est plus qu'un simple polar. C'est une histoire vraie agrémentée d'une longue et drôle de gestation. Michael Mann entreprend l'écriture du scénario dès 1979 après avoir entendu son ami et ex-flic, Chuck Adamson, lui parler de la quête qu'il a menée dans les années 60 pour traquer le braqueur Neil McCauley. L'histoire finit dans les mains de NBC qui compte en faire une série. Malheureusement, ce projet n'aboutit pas et les téléspectateurs n'en découvrent que le pilote, le téléfilm L. A. Takedown en 1989.
Mais Mann est frustré. Il n'a pas donné à son idée l'ampleur qu'elle méritait. Six ans plus tard, il en reprend donc la trame et réalise Heat. Porté par de fabuleux comédiens, dont évidemment le duo Al Pacino / Robert de Niro, ce polar majuscule est considéré par beaucoup comme le plus grand film de Mann; en tout cas l'un des films majeurs des années 1990, dont la scène de fusillade est entrée par la grande porte au panthéon du 7e Art.
Ci-dessous, pour le plaisir, la formidable bande-annonce du film...
Une durée tirée à pile ou face
"Ce qui meut mes personnages, ce qui constitue leurs motivations profondes, ce n'est pas leur environnement. Ce qui me fascine, c'est le conflit, c'est de là que naît le drama, la narration. Les conflits des personnages n'ont de sens que si j'arrive à créer une histoire suffisamment incarnée et intime pour que les spectateurs puissent s'y identifier" expliquait le cinéaste, lors d'une masterclass donnée au festival Lumière à Lyon en 2017, où fut justement projeté son chef-d'oeuvre dans une version Director's Cut.
Et d'ajouter : "Heat serait très difficile à faire aujourd'hui". En cause, notamment : les contraintes budgétaires, encore plus fortes qu'avant, mais aussi l'éclairage même de la Cité des anges. Une catastrophe absolue pour un cinéaste comme Mann, qui filme comme personne la ville de nuit, avec son éclairage tamisé si particulier. Depuis plusieurs années en effet, la municipalité installe des éclairages à base de LED, moins énergivore et plus écologique, mais font irrémédiablement disparaître cette lumière orangée si caractéristique qui a fait le bonheur de générations entières de cinéastes...
"Le seul problème que j'ai eu, c'était la durée. J'ai appris plus tard que les boss de la Warner avaient joué à pile ou face pour savoir qui devrait m'annoncer qu'il faudrait couper une demi-heure de film. Sauf qu'ils avaient pris cette décision avant même de voir le film. Il y avait une grande projection, ils ont vu le film et ils ont dit : 'Ok, ce sera un film de 2h35.' De manière générale, c'était une sorte de hold-up, car tout était déjà prêt. J'avais le scénario, De Niro, Pacino et on s'est présentés au studio en leur disant : 'Voilà ce que le film va coûter, voilà le casting...' Ils ont donné leur feu vert et quand on est partis, on a entendu des hurlements en provenance du bureau d'où on sortait. Quand je les ai appelés pour savoir ce qui s'était passé, ils m'ont dit : 'Ne refaites plus jamais ça, ne nous présentez plus jamais un projet où tout est déjà fait et où on ne contrôle plus rien."
Un prequel à Heat... Et une suite
En 2016, on apprenait que le cinéaste souhaitait coécrire avec Reed Farrel Coleman un roman prequel à son long métrage culte, qui devait revenir sur le passé des personnages présents dans le film de 1995, dont ceux d'Al Pacino et Robert de Niro. Et adapter ce roman en film. Un projet mené plutôt discrètement, puisque Mann n'en reparlera qu'en mai 2020, au site Deadline : "Nous sommes entrain d'y travailler et je mets le temps qu'il faut, c'est un scénario dont je ne peux rien vous dire. Mais je veux absolument faire un film du prequel "Heat". Sans oublier... Une suite ! La saga "Heat" deviendrait donc une trilogie. Mais pour voir tout ça sortir de terre, il va falloir s'armer de patience, en plus d'être pour l'heure très hypothétique. Mann étant actuellement concentré sur la pré-production de son biopic consacré à Enzo Ferrari, qui a pris beaucoup de retard en raison de la pandémie.