Le 28 février 2020 se tenait la 45e édition des César, marquée par de fortes tensions, une manifestation provoquée par les nominations nombreuses pour Roman Polanski et son film J'accuse, et le départ fracassant d'Adèle Haenel.
Une édition plus tard, après une année totalement chamboulée par la pandémie, où en est-on ? Comment s'annonce la cérémonie des César 2021 ? Est-ce le début d'une nouvelle ère comme cela avait été annoncé ?
Effacer l'historique
L'intention est là, celle "d'effacer l'historique" et "retrouver l'ADN", comme le dit avec malice Marina Foïs, présentatrice de cette édition, dans la bande-annonce des César. Objectif : faire que la cérémonie redevienne une fête, une "kermesse", une célébration de tous les cinémas.
Lors de leur première grande interview au Parisien, les nouveaux dirigeants des César sont également allés dans ce sens : "On voudrait s'éloigner des polémiques qui vampirisent les César. S'il y a une chose qu'il faut faire pendant ce mandat, c'est débarrasser les César de leur image toxique", ont expliqué Véronique Cayla et Eric Toledano, respectivement présidente et vice-président de l'Académie des César.
Même son de cloche pour Roschdy Zem, qui présidera la 46e cérémonie. Dans un long entretien dans Les Inrocks cette semaine, l'acteur césarisé pour Roubaix une lumière en 2020 indique qu'il abordera le sujet de cette nouvelle ère dans sa prise de parole en début de cérémonie :
"On a un héritage à laisser. Il faut laisser l’endroit encore plus propre qu’on ne l’a trouvé. Car il ne l’était pas tellement. J’ai vécu des formes de violence que je n’ai pas envie que mes enfants vivent. Je ne peux pas vous dévoiler mon discours, que je dois encore travailler, mais c’est un message envoyé à la jeunesse."
On est entré dans une ère de reconstitution d'une famille.
"Il y avait une équation impossible entre les polémiques et le fait de célébrer le cinéma. N'oublions pas qu'à l'origine, les César faisaient rêver", rappelait Eric Toledano, coréalisateur d'Intouchables avec Olivier Nakache, dans les colonnes du Parisien.
"Ce qui m'intéresse maintenant, c'est d'agir (...) Les nouveaux statuts ont déjà apporté de la démocratie et de la parité. Il faut continuer sur ce chemin, comme sur celui de la diversité, qui nous tient à cœur à tous les deux", indique Véronique Cayla. Et d'ajouter : "On est entré dans une ère de reconstitution d'une famille".
Afin de donner cette nouvelle impulsion à l'Académie des César, dont l'opacité avait été vivement critiquée, les instances dirigeantes ont donc été renouvelées de fond en comble. De nouveaux statuts ont été votés, en vue de rendre l'élection de chaque membre démocratique, éliminant ainsi le principe de membres "historiques" dont Roman Polanski faisait partie.
La parité est bien engagée avec la création de binômes. 500 nouveaux membres ont été admis dans le collège des votants, le portant désormais à une répartition d'environ 66% d'hommes et 34% de femmes. Le sujet de la diversité est également lancé.
Nous poursuivrons la réforme après la cérémonie
Le tandem Cayla-Toledano souligne le fait que les réformes sont encore en cours, que toutes n'ont pas pu être menées dans le temps imparti, qui plus est dans ce contexte très particulier dans lequel va se tenir cette édition.
"Notre priorité, c'est que l'édifice tienne droit". "Nous avons dû aller très vite cette année pour recréer un climat de confiance, et nous poursuivrons la réforme après la cérémonie et tirerons un bilan des modifications opérées, les conserver ou non, ou en envisager d’autres", a précisé Véronique Cayla dans les colonnes du Film Français.
Cette dernière donne dans le même temps des pistes pour la suite. "Inventer par exemple des actions en banlieue ou dans les régions. Je suis en tout cas convaincue que la cérémonie évoluera après cette année étrange en raison de la situation sanitaire."
Pour l'Académie, malgré la pandémie, il était en tout cas hors de question de remettre en cause la tenue de l'événement : "Si l'on n'organisait pas de cérémonie, on abandonnerait les partenaires (chaîne, sponsors...) et on mettrait les César en péril. On serait par ailleurs dans une résignation insupportable. Si la culture ne montre pas sa force quand elle est très affaiblie, c'est dangereux. Il faut se serrer les coudes, parce qu'on a souffert ensemble."
Une inconnue subsiste néanmoins pour cette édition : celle de la présence ou non de Dominique Boutonnat, président du Centre National de la cinématographie. Sa présence pourrait susciter la controverse, en raison de sa mise en examen récente pour agression sexuelle et tentative de viol. Selon L'Express, il n'aurait pas été invité.
Précisons que la distinction de Dominique Boutonnat, venu en tant que représentant du CNC, lors de la remise des trophées du Film Français la semaine dernière a déjà eu des conséquences : comme l'indique Mediapart, elle a provoqué le départ de Céline Sciamma, réalisatrice de Portrait de la jeune fille en feu, distinguée pour la carrière internationale du film.
La cérémonie des César aura lieu ce vendredi soir à partir de 21h en direct de l'Olympia, diffusée en clair sur CANAL+.
La bande-annonce des César 2021, présentée par Marina Foïs :
