Après le succès de 58 minutes pour vivre et ses 240 millions de dollars de recettes mondiales, le producteur Lawrence Gordon souhaite continuer à exploiter sa poule aux oeufs d'or avec la mise en chantier d'un 3ème volet de Die Hard. Le tournage du second opus n'est même pas encore terminé que l'homme d'affaires lance les hostilités. Il met la main sur un scénario original signé James Haggin intitulé Troubleshooter. L'histoire tourne autour d'une prise d'otage d'un paquebot de luxe par un groupe de terroristes.
UN SCENARIO EN ENFER
Gordon engage W. Peter Iliff, le scénariste de Point Break, pour qu'il réécrive le script à la sauce Die Hard. Après Die Hard dans un gratte-ciel et Die Hard dans un aéroport, le producteur veut faire un Die Hard sur un paquebot ! Pendant la révision du scénario de Troubleshooter, Iliff reçoit une proposition de New Regency Production.
La société le sollicite pour être le script doctor de Dread Naught, un scénario qui deviendra Piège en haute mer avec Steven Seagal, sorti en 1993. Illif décline l'offre de New Regency et la nouvelle d'un projet concurrent à Die Hard 3 se répand. La Fox tente alors de mettre un coup de pression à Lawrence Gordon pour que son film remporte la course face à son rival chez Regency.
UNE GUERRE ENTRE PRODUCTEURS
Nous sommes alors en 1991 et le projet va subir un nouveau coup dur. Une guerre est déclarée entre Joel Silver et Lawrence Gordon, auparavant associés sur les deux premiers Die Hard. Silver a tourné Hudson Hawk avec Bruce Willis et vient d'embaucher à nouveau l'acteur sur Le Dernier samaritain de Tony Scott. Pourtant, le comédien s'était déjà engagé auprès de Lawrence Gordon pour un autre film. Furieux, le producteur prend ça comme une trahison et se fâche avec Bruce Willis et Joel Silver.
À partir de ce moment-là, c'est l'effet boule de neige. La Fox stoppe le développement de Die Hard 3 à cause de Piège en haute mer, dont le tournage est imminent. De plus, Bruce Willis demande un salaire complètement démentiel de 17 millions de dollars, tout en crachant sur le scénario écrit par Iliff.
Comme l'indiquent Cédric Delelée et François Cau dans le Hors-série Mad Movies Classic "Die Hard, une saga en enfer", "L'acteur vedette, buveur et imbuvable, ne peut s'empêcher d'envisager un troisième Die Hard comme une régression dans sa carrière, lui qui vient de mener tant bien que mal des projets lui tenant beaucoup plus à coeur." Joe Roth, PDG de Fox, règle ce litige en accordant aux deux producteurs 750.000 dollars chacun afin qu'ils renoncent à Die Hard 3. Le divorce est consommé.
RELANCER LA SAGA DIE HARD
Sorti en octobre 1992 aux USA, Piège en haute mer marque les esprits et sonne le glas du projet Troubleshooter. Le script finira par être remanié pour devenir le très mauvais Speed 2 : Cap sur le danger en 1997. Joel Silver et Lawrence Gordon out, Fox se met à la recherche de la personne qui relancera la franchise Die Hard. Andrew Vajna, producteur historique des Rambo avec Stallone ou Double détente et Total Recall avec Schwarzenegger, est alors contacté par le studio.
Vajna n'est pas au bout de ses peines ! Le succès des deux premiers Die Hard a donné des idées à Hollywood, qui s'amuse à décliner le concept à toutes les sauces. Après Piège en haute mer, qui est un Die Hard sur un bateau, le début des années 90 voit émerger Die Hard dans un avion avec Passager 57 et Die Hard au sommet d'une montagne avec Cliffhanger. Autant dire que le choix dans les intrigues paraît complètement bouché.
Andrew Vajna cherche alors à s'attacher les services de Shane Black, scénariste star de L'Arme Fatale. Ce dernier décline la proposition, occupé par Au revoir à jamais. Le producteur se tourne alors vers John Milius, papa de Conan le barbare. Ce dernier souhaite envoyer John McClane dans la jungle avec Die Hard : Tears of the Sun. Le script est finalement rejeté. Le sous-titre, quant à lui, sera recyclé dans le film d'Antoine Fuqua, Les Larmes du soleil, sous l'impulsion de Bruce Willis.
Vajna remercie Milius et embarque Doug Richardson (scénariste de 58 minutes pour vivre) et John Fasano dans l'aventure. Leur mission ? Développer un scénario pour Die Hard 3 chacun de leur côté ! Le premier travaille sur une version dans laquelle la fille de McClane est kidnappée par des terroristes. Quant au second, il planche sur un Die Hard dans le métro de Los Angeles sur fond de cambriolage de la réserve fédérale.
"Ma seule contribution dans le film c'est le cambriolage de la réserve fédérale. En dehors de ça, il y a plus de moments de ma version de Die Hard 3 dans Speed, que dans Une journée en enfer. Vous vous souvenez du final de Speed, avec ce métro fou qui ne peut plus s'arrêter ? Eh bien, c'était mon troisième acte de Die Hard 3", révèle Richardson.
L'ATTAQUE DES CLONES DE DIE HARD
Andrew Vajna est au pied du mur. Die Hard dans un bus (Speed) et Die Hard dans un parc d'attractions (Le Flic de Beverly Hills 3) font leurs apparitions et Die Hard dans un train (Piège à grande vitesse) se prépare, accompagné de Die Hard dans un stade de hockey (Mort Subite). Le producteur ne sait plus quoi faire pour trouver une idée originale pour la saga de John McClane.
L'illumination viendra d'un jeune scénariste d'une trentaine d'années : Jonathan Hensleigh. Débutant dans le monde du cinéma, ce dernier a fait ses premières armes sur Les Aventures du jeune Indiana Jones. Il vient d'écrire un scénario intitulé Simon Says.
Son script raconte l'histoire d'un policier blanc contraint de faire équipe avec un activiste noir. Les deux hommes devront déjouer les plans d'un terroriste poseur de bombes jouant à "Jacques a dit" (ce jeu se nomme Simon Says en anglais).
LA NAISSANCE D'UNE JOURNEE EN ENFER
Jonathan Hensleigh a écrit le script en 11 jours puis a vendu le scénario à la Fox. Le studio envisage d'abord d'en faire une suite à Rapid Fire ou L'Arme Fatale 4. Finalement, Hensleigh donne le script en mains propres à John McTiernan, qui voit tout de suite le potentiel de l'histoire. Après les échecs de Medicine Man et Last Action Hero, le cinéaste est totalement disponible pour se refaire une santé avec un 3ème Die Hard.
Il demande au scénariste de revoir sa copie afin de changer Simon Says en Die Hard 3. Hensleigh fait alors une modification majeure : Simon sera le frère de Hans Gruber, bad guys de Piège de cristal. Ce dernier veut se venger de McClane, mais son véritable but est le cambriolage de la réserve fédérale.
Bruce Willis, malgré son caractère de cochon, est emballé par le projet, ainsi que la Fox. L'acteur vient de sortir de deux gros échecs, Piège en eaux troubles et Color of Night, et sent bien qu'il va devoir redorer son blason. Une journée en enfer arrive donc à point nommé.
Sorti en août 1995, Die Hard 3 est un triomphe, le monde entier saluant la meilleure performance de Willis dans le meilleur opus de la franchise. Le film récoltera 366 millions de billets verts dans le monde, soit environ 100 millions de plus que 58 minutes pour vivre.
LES PETITS DETAILS D'UNE JOURNEE EN ENFER