Après La Rafle en 2010, Rose Bosch s'essayait en 2014 à un registre beaucoup plus léger avec Avis de mistral. Cette comédie dramatique raconte le conflit générationnel entre un grand-père (Jean Reno) et ses petits-enfants lors d'un été en Provence. La réalisatrice souhaitait tourner dans le sud où elle a grandi, dans des espaces vastes, loin des décors clos de La Rafle. Elle retrouve pour l'occasion Jean Reno, qu'elle avait dirigé dans son précédent long-métrage. Mais le duo devait à l'origine collaborer sur un projet aux antipodes d'Avis de mistral.
En effet, Rose Bosch planchait sur une épopée consacrée à Raspoutine, guérisseur russe ayant vécu à la fin du XIXème siècle et considéré par certains de ses contemporains comme un prophète. Un personnage si mystérieux qu'il n'a cessé de stimuler l'imaginaire des artistes, de Joseph Kessel avec son roman Les Rois aveugles au groupe de disco Boney M en passant par le film d'animation Anastasia.
Ce projet de longue date est notamment passé entre les mains de Roland Joffé, Costa-Gavras et Paul Verhoeven. Rose Bosch, alors seulement scénariste, avait contacté ce dernier afin qu'il le mette en scène mais leur collaboration s'est interrompue car ils n'étaient pas d'accord sur la manière de représenter le personnage. Le succès de La Rafle à sa sortie en salles a alors permis à Rose Bosch de faire de Raspoutine son prochain projet de réalisation. Elle décrivait le protagoniste de son futur film comme « un iconoclaste. Un anarchiste primaire. Un mystique sincère. Un guérisseur quasi chamanique. Celui que j’ai découvert est à des années-lumières du cliché machiavélique qu’on imagine. Tout ça fait de lui un personnage rock’n’roll, incroyablement moderne ». Si elle a choisi de confier le rôle-titre à Jean Reno, c'est pour son humilité, son humanité et son regard.
Le tournage du film devait débuter en Russie en février 2011 mais a été repoussé, pour finalement être annulé. La réalisatrice ne se voyait pas tourner ailleurs, comme elle l'expliquait à notre micro lors de la promotion d'Avis de mistral : « C'était le plus grand empire européen. Donc, on ne peut pas trouver des décors comme ça ailleurs, ce n'est pas possible ». Mais les conditions climatiques, des complications logistiques et la situation politique en Russie ont compliqué les choses : « Par exemple, je ne peux pas imaginer faire le film sans neige. [...] Quand même, Saint-Pétersbourg, l'hiver, c'est beaucoup mieux. Donc je voulais absolument tourner en février. Ça suppose que tout le monde, les comédiens, le budget, tout doit être prêt en même temps trois mois avant, car ce sont trois mois de préparation. C'est ce qui est le plus difficile ».
Au final, cette grosse production (25 millions d'euros de budget) tournée en langues anglaise, russe et française, intitulée Rasputin : The Healer ("Raspoutine : le guérisseur") n'a jamais vu le jour, bien qu'une première image de Jean Reno dans le rôle avait été présentée. Ce projet annulé, Rose Bosch a pu s'atteler à Avis de Mistral.