Dans Bons baisers de Russie, l'infatigable James Bond se voit confier, en pleine guerre froide, la mission de faire passer à l'Ouest une jeune femme russe, Tatiana Romanova, ainsi qu'un lecteur de déchiffrement conçu par les Soviétiques. Mais cette opération est en fait un piège tendu par l'organisation criminelle du Spectre, qui entend venger la mort du Dr. No et s'emparer du lecteur… A l'occasion de la diffusion du film, ce soir sur France 4, focus sur Robert Shaw, l'interprète de Donald "Red" Grant, le redoutable assassin chargé d'éliminer Bond.
A douze ans, et ce après avoir vécu le suicide de son père médecin, le jeune Robert Archibald Shaw se lance dans le théâtre, une activité qui lui sert d’exutoire. De 1946 à 1948, il suit les cours d’art dramatique de la Royal Academy of Dramatic Arts et se produit sur les plus prestigieuses scènes de Grande-Bretagne, à Stratford-upon-Avon et au Old Vic.
L’œuvre de Shakespeare n’a alors plus de secret pour lui, et c’est avec des pièces comme "Othello" et "Le Songe d’une nuit d’été" qu’il part en tournée à travers l’Europe. Remarqué par Alec Guinness alors qu’il interprète "Beaucoup de bruit pour rien", il décroche un petit rôle à ses côtés dans la comédie De l'or en barres de Charles Crichton.
Nous sommes dans les années 1950 et les films de guerre sont alors foison. Robert Shaw se voit logiquement proposer des personnages de militaires comme dans Les Briseurs de barrages (1954) et Commando en Corée (1956). Mais c’est le petit écran qui lui permet d’accéder à des rôles de premier plan. Il est ainsi le héros de la série de cape et d’épée The Buccaneers de 1956 à 1957.
A la fin de cette décennie, il écrit son premier roman, "The Hiding Place", joli succès en librairie, et s’essaie à l’exercice du reportage en couvrant notamment les Jeux Olympiques de Rome en 1960.
Les années 1960 s’annoncent plus fastes. Robert Shaw donne la réplique d’égal à égal à Alan Bates et Donald Pleasence dans l’adaptation du Gardien d’Harold Pinter. Et il marque aussi les esprits par sa performance d’homme de main tout en muscles dans Bons baisers de Russie, deuxième James Bond sorti en 1963 (il fera à nouveau face à Sean Connery dans La Rose et la flèche en 1976).
Dès lors, les rôles qu’on lui offre sont souvent ceux de méchants ou de personnalités peu recommandables : dangereux criminel dans Tomorrow At Ten (1964), colonel nazi dans La Bataille des Ardennes (1965), sanguinaire révolutionnaire mexicain dans Les Brutes dans la ville (1971), etc.
Il lui arrive également d’interpréter des personnages de grande envergure, comme le roi Henry VIII dans Un homme pour l'éternité (1966) de Fred Zinnemann, le général Custer (1967) sous la direction de Robert Siodmak, le conquistador espagnol Pizarro dans The Royal Hunt Of The Sun (1969) ou encore Churchill dans Les Griffes du lion (1972) de Richard Attenborough.
Dans les années 1970, on le retrouve chez Losey (Deux hommes en fuite, 1970), Lester (La Rose et la flèche) et Frankenheimer (Black Sunday, 1977). A l’affiche de La Méprise, Palme d’Or en 1973 ex-aequo avec L'Epouvantail, Robert Shaw participe également à de grands succès commerciaux comme L'Arnaque (1973), film de George Roy Hill où il joue le dindon de la farce, Les Pirates du métro (1974), où il fait face à Walter Matthau, et surtout Les Dents de la Mer (1975) de Steven Spielberg. Son personnage de Quint, le baroudeur chasseur de requins, marque à jamais l’imaginaire collectif.
En avril 1975, en plein tournage du polar Un coup de deux millions de dollars, Robert Shaw, revenu à son domicile pour la pause déjeuner, découvre le corps inanimé de sa femme, Mary Ure, morte sur son canapé, vraisemblablement des suites d'une intoxication médicamenteuse. Pour l’acteur, le coup est rude. Dépression, alcoolisme encore plus prononcé… Ce mal peut en partie expliquer la crise cardiaque dont il est victime en 1978. Son dernier long métrage, Avalanche Express, un film d’espionnage également interprété par Lee Marvin, sort quelques mois après son décès.