ÇA PARLE DE QUOI ?
En 1938, à une époque profondément imprégnée de tensions sociales et politiques, la ville de Los Angeles est bouleversée par un crime effroyable. Le détective Tiago Vega et son partenaire Lewis Michener s’embarquent dans une enquête épique dans la Cité des anges, sur fond de rites sataniques, de légendes mexicaines et de dangereuses missions d'espionnage du Troisième Reich. Très vite, Tiago et les siens doivent faire face à de puissantes forces qui menacent de les déchirer.
Penny Dreadful : City of Angels, crée par John Logan - Diffusée sur Canal+ tous les lundis depuis le 27 avril - Épisodes vus : 3 sur 10
ÇA RESSEMBLE A QUOI ?
C'EST AVEC QUI ?
On l'a découverte dans Les Tudors, mais c'est surtout grâce à Game of Thrones que Natalie Dormer s'est révélée au grand public, sous les traits de la conspiratrice Margaery Tyrell, dans une série qu'elle a quittée au moment où Penny Dreadful s'achevait. Vue également dans les derniers volets d'Hunger Games, ou la relecture moderne (et américaine) des aventures de Sherlock Holmes, Elementary, la Britannique est aujourd'hui la tête d'affiche de City of Angels, dans laquelle elle tient plusieurs rôles en un puisque son personnage change régulièrement d'apparence. L'occasion pour elle de se plonger dans un nouveau récit situé dans le passé, aux accents fantastiques et où la mort rôde sérieusement.
Vu dans It Follows, Don't Breathe et un épisode Fear the Walking Dead et Une nuit en enfer, Daniel Zovatto a quant à lui déjà affronté le Mal sous diverses formes et ne se sentira pas trop perdu dans la peau de Tiago Vega, détective chargé d'enquêter sur un meurtre à Los Angeles et que ses origines mexicaines vont confronter au racisme ambiant en cette année 1938. Il peut cependant compter sur son partenaire incarné par Nathan Lane, voix originale de Timon dans Le Roi Lion de 1994, et que l'on connaît surtout, malgré ses rôles dans The Good Wife et American Crime Story, pour ses rôles comiques, dans le remake de La Cage aux folles ou encore Modern Family.
Remarqué dans Le Pianiste et passé depuis par King Kong, Resident Evil 2, Avengers - L'Ere d'Ultron ou encore la scène d'ouverture de la saison 3 de Westworld, l'Allemand Thomas Kretschmann est également de la partie. Tout comme Rory Kinnear, seul acteur de Penny Dreadful à rempiler dans City of Angels mais dans un rôle différent, puisque sa créature de Frankenstein (qui s'était elle-même baptisée John Clare, en hommage au poète du même nom) a laissé place à un docteur sensible à l'idéologie nazie.
ÇA VAUT LE COUP-D'ŒIL ?
Le 19 juin 2016, le neuvième et dernier épisode de la saison 3 de Penny Dreadful s'achevait sur le carton "The End", qui signifiait la fin de l'aventure entamée deux ans plus tôt, à la grande surprise des fans, cueillis par cette annulation et que la suite publiée sous forme de comic books n'a pas particulièrement consolés. Mais il faut croire que John Logan n'en avait pas terminé avec sa création, qu'il ressuscite sous la forme d'un spin-off se déroulante près d'un demi-siècle plus tard et de l'autre côté de l'Atlantique. Comme le sous-entend le titre, en reprenant son surnom de "Cité des anges", City of Angels délaisse le brouillard londonien pour le soleil de Los Angeles, assombri par un meurtre macabre qui va confronter ses enquêteurs au racisme anti-mexicain, au poids de l'idéologie nazie sur le sol américain et à une créature surnaturelle, capable de prendre diverses apparences.
Dans ses trois premiers épisodes, City of Angels fonctionne davantage comme une anthologie par rapport à Penny Dreadful, qu'il n'est donc pas nécessaire d'avoir vue pour comprendre l'histoire du spin-off, dans la mesure où les deux séries sont moins liées par des personnages que par des thèmes communs tels que le Mal, les croyances, la monstruosité ou la peur de l'autre, ici abordés avec une volonté de faire écho à l'actualité. Pas besoin, en effet, de tout connaître du Los Angeles de l'époque pour savoir à quoi renvoient réellement les tensions croissantes entre Américains et Mexicains, alors que le terme de "guerre raciale" revient souvent. Ou pour savoir interpréter le glaçant "America first. America always. Peace above all" ("L'Amérique d'abord. L'Amérique toujours. La paix avant tout") prononcé par le Dr. Peter Craft (Rory Kinnear), médecin qui ne cache pas sa sensibilité pour le parti nazi, dont quelques représentants hauts gradés se cachent dans l'ombre.
Moins pulp que Penny Dreadful (qui tirait son nom de ces livres bon marché publiés sur du papier de qualité médiocre en Angleterre, comme les romans américains qui ont inspiré à Quentin Tarantino sa Palme d'Or), City of Angels se veut un peu plus réaliste et politique. Mais la série conserve l'aspect littéraire très marqué de son modèle, aussi bien sur la forme que le fond, avec des épisodes très écrits et lents, et une ambiance qui s'inspire moins des classiques que sont Frankenstein et Dracula pour mieux lorgner du côté de James Ellroy, dont l'influence se fait ressentir jusque dans les meurtres qui servent de point de départ au récit et, dans leur mise en scène, rappellent celle du Dahlia Noir (assassinat particulièrement sanglant et jamais élucidé d'une starlette en 1947) dont le romancier a tiré l'une de ses œuvres les plus marquantes.
Malgré une longue mise en place qui pourra décourager les plus impatients, nul ne peut reprocher à John Logan d'avoir changé d'ambiance, là où la tentation de nous servir un plat réchauffé aurait été grande. Par petites touches, le créateur et scénariste de la série bâtit un univers bien plus complexe, tentaculaire et chaotique qu'il n'y paraît, allant d'Hollywood aux quartiers hispaniques de Los Angeles, en passant par des clubs clandestins ou le bureau d'un maire qui cache plus d'un secret. Il nous plonge ainsi dans une ville aux allures de poudrière prête à exploser, ce que le personnage interprété par Natalie Dormer, le plus fascinant de ces premiers épisodes, semble bien décidé à faire. Capable de changer d'apparence, elle sème la destruction partout où elle passe et ce dès la scène d'ouverture en forme de flashback, qui la lie à Tiago Vega (Daniel Zovatto). Présentée comme la sœur et alter ego maléfique de Santa Muerte (représentation de la Mort symbole de guérison et de protection, ici joué par Lorenza Izzo), elle paraît incarner la tentation, la violence, la révolte.
Ses apparitions sont souvent synonymes de sursauts dans un récit qui prend son temps, peut-être un peu trop, pour poser la situation et les rôles de chacun dans une intrigue qui semble prête à décoller à l'issue de ce monologue plein de hargne de Natalie Dormer : "Nous allons d'abord les faire regarder, puis nous allons les effrayer (...) Nous sommes tout ce qui leur fait peur" Une tirade où il est autant question de race que d'homosexualité, et qui paraît à même d'embraser la situation, plus encore que la fusillade du premier épisode. S'il convient souvent de "chercher la femme" pour résoudre une enquête selon Lewis Michener, (Nathan Lane) celle-ci se présente comme la clé du récit, même s'il faudra garder un œil sur Molly (Kerry Bishé) et l'environnement strict dont elle souhaite s'échapper.
Après trois épisodes, City of Angels part plutôt bien même si la série demande de s'accrocher un peu et que son impact sera peut-être plus fort en regardant la saison dans son intégralité. Mais ces bases pleines de mystères et où la tension se fait de moins en moins sourde donnent envie d'en savoir plus pour obtenir les réponses à plusieurs questions : Qui a commis le crime macabre et fait en sorte que tout accuse les Mexicains ? Qui est vraiment Magda (Natalie Dormer) et quelle est son implication dans l'affaire ? Premier inspecteur d'orgine mexicaine de la police de Los Angeles, Tiago saura-t-il s'imposer ? Les débuts sont intrigants et pourront plaire aux téléspectateurs familiers des romans noirs et du rythme de Penny Dreadful, même si certains fans de la série originale risquent de se sentir moins investis face à cette approche moins romantique et surnaturelle, mais plus engagée.
Tout dépend de ce que l'on vient y chercher et de ce que l'on aimait dans la série-mère. Mais, en l'état, City of Angels est un spin-off moins gothique, plus ensoleillé mais toujours aussi littéraire, qui débute de façon solide mais à qui il manque encore l'élément qui le fera décoller pour de bon. Si le show suit son modèle sur ce point, il va falloir s'armer de patience mais celle-ci sera récompensée.
"Penny Dreadful : City of Angels" est diffusée en US+24 sur Canal+, tous les lundis pendant dix semaines.